L’Art Ancien en Occident
Avec 5% du chiffre d’affaires pour 9% des lots vendus, le marché des Maîtres Anciens voit son influence faiblir peu à peu à l’Ouest. Les grandes ventes sont désormais décalées par rapport aux prestigieuses sessions d’Art Moderne & Impressionniste ainsi que celles d’Art Après-Guerre & Contemporain. A moins d’un lot exceptionnel (comme le Salvator Mundi en 2017), le marché des Maîtres Anciens reste généralement discret, peu volatile, mais rentable sur le long-terme.
Répartition du produit de ventes en Occident par période de création
Particularités
Le marché des Maîtres Anciens soulève de nombreuses questions qui concernent moins, ou pas du tout, les autres périodes de création : questions liées à la provenance des œuvres, leur authenticité, leur conservation, leur sortie du territoire, etc. C’est un marché qui recèle de nombreuses histoires et de surprises, parfois agréables, parfois moins, avec des oeuvres oubliées, mal-attribuées, abîmées, etc.
Ce 27 novembre 2018, une Figure de sainte, en buste, avec une palme et lisant les Ecritures était mise en vente par Christie’s à Paris. Lors de sa précédente vente à l’Hôtel Drouot en 1865, cette peinture, issue de la collection de Son Altesse Royale la duchesse du Berry, avait été attribuée à Léonard de Vinci lui-même. Mais depuis plus d’un siècle, l’œuvre est considérée comme de la main de Bernardino LUINI, un proche du grand maître. La peinture, classée « Monument historique » par un décret du 2 décembre 1965, fait l’objet d’une « restriction quant à sa circulation hors du territoire français». Estimée entre 450.000$ et 680.000$, l’oeuvre a cependant atteint 1,36m$ cette année.
Mise en vente le 30 octobre 2018 à New York, la Madone Peruzzi a, pour sa part, été attribuée «à Raphaël ou à un proche associé» par Christie’s. Cette précision revêt toute son importance car le dessin aurait pu être une étude d’une pièce maîtresse de Raphaël, la Petite Madone Cowper (c. 1505) conservée à la National Gallery of Art de Washington. Ce qui manque à la Madone Peruzzi pour être valorisée à huit ou neuf chiffres, c’est la précieuse signature de Raphaël ; en son absence, l’oeuvre a été achetée 552.500$.
Attribuée à Raphaël ou à un proche associé
La Madonne Peruzzi : la Madonne et l’enfant
Au coeur de l’Industrie Muséale
Après le segment de l’Art Contemporain, le marché des Maîtres Anciens renferme sans doute les plus grands enjeux politiques. Les belles pièces sont devenues tellement rares qu’elles attisent la compétition entre collectionneurs, mais aussi entre les musées du monde entier. Une compétition dans lequel les états usent régulièrement de leurs pouvoirs.
En 2016, l’Etat Français a ainsi refusé de délivrer le visa d’exportation d’une peinture trouvée dans un grenier à Toulouse (France) deux ans auparavant, qui pourrait être l’oeuvre du Caravage. Mais au terme de deux nouvelles années d’immobilisation, l’État Français n’a cependant pas fait d’offre d’achat, et la peinture – enfin libre de circuler – est attendue en salle de ventes en 2019. L’expert Eric Turquin, en charge de la vente, pourrait faire voyager l’oeuvre avant de la rappeler sur le territoire français, et laisser au Marché le soin de lui donner un prix. Il est probable que la pièce quittera alors l’Europe pour de bon.
Placement longue durée
En Occident, les mois de juillet et de décembre sont devenus essentiels pour le segment des Maîtres Anciens. A chaque fin de semestre, des pièces exceptionnelles font leur apparition dans les salles de ventes londoniennes. Ces œuvres sont pour la plupart restées longtemps dans la même collection. Aussi les attentes sont-elles grandes. Mais la valeur de ces pièces est souvent difficile à estimer, car il n’existe peu ou plus rien de tel sur le Marché. L’épuisement de l’offre, couplée à une demande croissante et mondialisée, peut faire flamber les prix.
Top 10 des œuvres anciennes aux enchères en 2018
Trois de ces œuvres ont été acquises aux enchères au cours des trente dernières années, enregistrant chacune une plus-value considérable. Bien que les durées de détention dépassent largement la durée moyenne sur le reste du Marché de l’Art, la rentabilité de ces investissements surpasse les performances habituelles des produits financiers :
- Flemish proverbs, after Pieter I Brueghel, achetée 733.700$ le 06/05/1993 (Christie’s Amsterdam)
- Portrait of Mary, Princess Royal, achetée 778.300$ le 17/11/1989 (Christie’s Londres)
- Portrait of Carlo Alberto Rati Opizzoni, achetée 1,8 m$ le 27/01/2005 (Sotheby’s New York)
Pieter BRUEGHEL II (c.1564-1637/38)
The Netherlandish Proverbs