Du plus cher au plus abordable, découpage par segments de prix

Du plus cher au plus abordable, découpage par segments de prix

Le segment le plus haut de gamme est nourri par les formidables collections que nous évoquons plus haut. Celles-ci permettent d’afficher 24 œuvres à plus de 50 millions de dollars contre un précédent record de 15 œuvres valorisées à ce niveau en 2021. Par ailleurs, des centaines de lots couvrant toutes les périodes de création alimentent le marché haut de gamme. Finalement, le nombre d’œuvres millionnaires s’établit à 1 682 cette année, un chiffre déjà atteint, voire dépassé les années précédentes.

Les transactions millionnaires restent donc assez stables sur la décennie. Elles s’accélèrent pour les créations d’Après-Guerre et contemporaines tandis qu’elles décélèrent pour l’Art Ancien, dont les œuvres remarquables sont de plus en plus soumises au principe de rareté, malgré une hausse quasiment constante des transactions depuis 10 ans. Parmi les 100 plus hautes adjudications de l’année, on ne dénombre que quatre œuvres anciennes, deux de BOTTICELLI, une toile de CHARDIN et un dessin de MICHELANGELO, alors que les œuvres d’Après-Guerre représentent un tiers du Top 100.

Évolution des indices de prix par période de création

Évolution des indices de prix par période de création

→ Les dispersions de grandes collections offrent quelques records sensationnels pour l’Art du 19e siècle et l’Art Moderne, mais les œuvres importantes restent rares sur ces segments, contrairement aux créations d’Après-Guerre et contemporaines sur lesquelles le marché se reporte depuis 10 ans, d’où une forte croissance des indices de leur prix. Aujourd’hui, l’évolution des prix pour la création la plus récente s’impose comme la plus dynamique du marché.

100m$ : une nouvelle échelle de valeur ?

Les prix ont profondément évolué au cours des années : si aucune œuvre n’atteignait 100 millions de dollars aux enchères il y a 20 ans, ce seuil de prix a été dépassé à 23 reprises depuis, dont six fois en 2022, ce qui n’était jamais arrivé auparavant, le précédent record étant de trois pour l’année 2017.

La première fois qu’une œuvre d’art atteint le palier des 100 millions de dollars, nous sommes en 2004, avec le Garçon à la pipe de PICASSO. En 2015, quand l’artiste renouvelle son record avec Les femmes d’Alger (Version ‘O’), il dépasse cette fois les 179m$… S’ensuit une escalade vertigineuse avec la vente, en 2017, du Salvator Mundi (救世主) de Léonard DE VINCI, qui s’arrache au prix de 450,3m$. Celui-ci crée un fossé avec les précédents records connus dans le monde des enchères et contribue à normaliser le seuil symbolique des 100 millions de dollars pour tout chef-d’œuvre véritable.

En 2022, les six lots excédant les 100 millions sont une toile iconique de WARHOL et cinq œuvres majeures issues de la collection de Paul Allen, sous les signatures de SEURAT, CÉZANNE, VAN GOGH, GAUGUIN, et KLIMT, des œuvres muséales, rarissimes du fait de leur qualité et de leur provenance remarquable. Ce qui apparaît comme une profusion de records tient au fond à la qualité exceptionnelle de quelques œuvres venues alimenter le marché des enchères en 2022. Le nombre de frappes millionnaires est très marginal à l’échelle de l’ensemble du Marché (0,24% des lots vendus dans le monde), mais l’enjeu réside dans leur poids économique, car c’est à elles que l’on doit la moitié du produit des ventes mondial.

Cependant, l’emballement médiatique qui accompagne les grandes ventes ne doit pas faire oublier que les prix les plus forts ne sont que le sommet de l’iceberg d’un marché mondial majoritairement abordable.

Distribution du marché des enchères mondial de Fine Art et NFT par gammes de prix (2022)

Distribution du marché des enchères mondial de Fine Art et NFT par gammes de prix (2022)

→ L’année 2022 restera dans les mémoires comme la plus faste de l’histoire quant au nombre d’œuvres dépassant les 100 millions de dollars. Mais l’autre réalité du Marché de l’Art est la quantité phénoménale d’œuvres très abordables vendues à travers le monde : plus de la moitié sont acquises pour moins de 800$.

La moitié des œuvres aux enchères valent moins de 800$

Les œuvres valorisées entre 50 000$ et un million représentent environ 12 000 lots, soit moins de 2% du marché. Plus l’on descend dans les gammes de prix, plus les échanges s’accentuent : 5% des lots se vendent entre 20 000 et 50 000$, 11% valent entre 5 000 et 20 000$, tandis que le quart des échanges concernent les œuvres cotées entre 1 000 et 5 000$ et que la moitié des transactions s’opèrent sous le seuil des 800$.

Les transactions ne cessent d’ailleurs de s’intensifier pour les œuvres les moins cotées. Des collectionneurs de plus en plus nombreux et de plus en plus jeunes, convaincus désormais que l’art peut être un achat plaisir et sans risque, soutiennent activement le marché de l’estampe et des multiples en trois dimensions, un marché qui donne accès à des artistes célèbres, souvent pour quelques centaines de dollars seulement.

Répartition par décile des ventes aux enchères de Fine Art et NFT en 2022

x% des lots vendus moins de
100,00 % 195 040 000 $
99,00 % 229 264 $
98,00 % 99 820 $
97,00 % 61 022 $
96,00 % 43 390 $
95,00 % 32 661 $
94,00 % 25 500 $
93,00 % 20 683 $
92,00 % 17 220 $
91,00 % 14 520 $
90,00 % 12 500 $
80,00 % 4 459 $
70,00 % 2 221 $
60,00 % 1 247 $
50,00 % 762 $
40,00 % 494 $
30,00 % 313 $
20,00 % 188 $
10,00 % 94 $
© Artprice

Pour répondre à cette demande croissante, les maisons de ventes ont densifié l’offre abordable et leurs transactions inférieures à 500$ augmentent bien plus rapidement que sur tout autre segment de prix. Aujourd’hui, les œuvres vendues pour moins de 500$ constituent le volume de transactions le plus important du marché (41%). En incluant les œuvres entre 500 et 1 000$, c’est près de 400 000 lots qui se sont vendus cette année, soit plus de la moitié du volume des transactions mondiales. Le segment des œuvres à moins de 1 000$ a bondi de +52% depuis la période anté-pandémique.

Lucas-CRANACH-1472-1553-The-Nymph-of-the-Spring

Lucas I CRANACH (1472-1553)
The Nymph of the Spring. Huile sur panneau, 82,1 x 120,5 cm
11,3m$, Christie’s, Londres, 7 juillet 2022, Old masters, evening sale

→ Peinte entre 1540 et 1545, cette œuvre de Lucas CRANACH L’ANCIEN est la plus grande et sans doute la plus ambitieuse des douze peintures de nymphes existantes du peintre allemand. Vendue pour 11,3m$ en juillet lors de la vente des Maîtres Anciens de Christie’s Londres, elle constitue la deuxième meilleure adjudication du peintre, après The Bocca della Verità (La Bouche de la vérité), acquise pour 14,5m$ en juillet 2015 chez Sotheby’s.