Ventes tests à New-York

[01/05/2008]

 

Dans quelques jours, Sotheby’s et Christie’s vont orchestrer à New York leurs ballets d’enchères millionnaires au rythme des icônes de l’impressionnisme et de l’art moderne. A une semaine de l’événement, la tension est des plus fortes car ces importantes vacations font figure de test. La confiance des collectionneurs face à l’incertitude économique actuelle sera mise à l’épreuve.

Certes, la faiblesse du dollar peut rendre un peu de vigueur sur ce marché refuge, mais il se pourrait que la prudence l’emporte et que la hausse des prix sur le secteur haut de gamme soit freinée. L’impressionnisme et le postimpressionnisme avaient déçu en novembre dernier, notamment chez Sotheby’s avec un Van Gogh, ravalé alors qu’il en était attendu plus de 28 m$, et sur lequel l’auctioneer avait consenti un prix de garantie. Cette erreur avait été alors sanctionnée dès le lendemain par un effondrement du cours de bourse de la maison de vente. Une semaine plus tard, le succès des ventes d’art contemporain avait redonné un moral d’acier aux collectionneurs en prouvant que le marché était resté fort.

Pour sa vacation « Impressionist and modern art », Sotheby’s, dont le titre est valorisé à Wall Street moins de 30$ contre plus de 57$ en octobre 2007, mise davantage sur l’art moderne. En tête d’affiche : une toile spectaculaire de Fernand Léger estimée 35-45 m$ et un Edward Munch valorisé à 24-28 m$. Ces deux œuvres font encore une fois l’objet de prix minimum garantis, tout comme le lot phare de la vente Christie’s, un tableau de Monet intitulé « Le Pont du chemin de fer à Argenteuil » et dont il serait attendu près de 35 m$. Même si ces rares œuvres n’ont pas été présentées aux enchères depuis des décennies, le jeu de la concurrence pousse les deux auctioneers à prendre encore des risques importants.
Le challenge est relevé par un autre défi lancé au marché : absorber pas moins de 11 œuvres majeures d’Alberto Giacometti en quelques heures. Les deux rivales ont réussi à réunir chacune d’importantes pièces du sculpteur suisse, dont « La Place II » et « Grande femme debout II » chez Christie’s ainsi que « Femme de Venise VII », un « Buste de Diego » et une toile intitulée « Portrait de Caroline » chez Sotheby’s. Certes, l’artiste a décroché un nouveau record en mai 2007 avec « L’homme qui chavire », une sculpture de 1947 adjugée 16,5 m$ pour une estimation de 6,5-8,5 m$. Certes sa cote a encore progressé de +12% en 2007. Certes il vient de faire l’objet d’une importante rétrospective au centre Pompidou (Paris). Mais est-il possible dans le contexte actuel de disperser pour plus de 70 m$ d’œuvres d’Alberto Giacometti sur deux jours ?

Forts des enseignements de novembre, les deux auctioneers continuent à miser sur l’art contemporain, véritable locomotive du marché. Si la demande est soutenue, en une semaine ce secteur pourrait rapporter près d’un milliard de dollars aux deux auctioneers, un volume de ventes jamais atteint à ce jour et bien plus que les sessions « Impressionist and modern art ». Pas moins de 14 lots présentent des estimations atteignant ou dépassant les 10 millions de dollars. En lot phare, l’exceptionnelle estimation de 70 m$ pour un tryptique 1976 de Francis Bacon semble narguer les observateurs craignant que la récession économique américaine n’affecte le secteur le plus spéculatif et volatil du marché de l’art…