Une saison d’exception pour Christie’s Hong Kong

[03/12/2019]

“Malgré les défis géopolitiques actuels, le marché est confiant” : telle est l’affirmation de Francis Belin, Président de la zone Asie-pacifique pour Christie’s, à la clôture de ventes hongkongaises de fin novembre.

En cinq jours, les ventes organisées par la société de vente sur place affichent en effet un résultat de 337m$, dont 159,7m$ pour les ventes d’art du XXème siècle et contemporain et 136,9m$ pour la vente du soir, contre 52m$ seulement pour la même session l’an dernier. Cette dernière vacation d’art du XXème siècle et contemporain marque une première dans l’histoire de Christie’s Hong Kong, puisque le produit des ventes n’avait jamais été aussi important sur place. Le succès de cette session a été porté par quelques œuvres magistrales et par de nouveaux records remportés par des artistes asiatiques et occidentaux, notamment Sanyu, Kim Whan-Ki et Eddie Martinez.

Pour thierry Ehrmann, fondateur d’Artprice et président d’ArtMarket.com : “Hong Kong est un peu comme la Silicon Valley : un tout petit coin du monde sur lequel tous les yeux sont rivés ! Au même moment, des élections bousculent le pays, Alibaba fait une entrée fracassante en bourse, et une pluie de records s’abat en salles de ventes. Le marché de l’art hongkongais porte ce qui sera peut-être le premier grand mouvement artistique du XXIème siècle : un art qui prône plus de légèreté, avec enfin un véritable kitsch décomplexé, auquel Christie’s a donné le nom de Hi-Lite“.

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Ayako Rokkaku – Untitled (2015)

Un chapitre dense était en effet consacré au HI-LITE, cette nouvelle “tendance” du marché qui rassemble des artistes “dont l’esthétique néo-pop, les connections avec l’art commercial, les dessins animés et la street culture ont valu une renommée mondiale. Beaucoup de pièces sélectionnées pour cette vente présentent un style visuel similaire : des formes aplaties, des couleurs vives et des lignes épurées, qui font référence à des images issues des médias populaires, ainsi qu’à la mode, la musique, le graffiti et l’animation”. Ces artistes dont les cotes flambent sont occidentaux (avec Kaws en tête de liste) ou asiatiques, avec les très demandés Ayoko Rokkaku, Liu Ye, Takashi Murakami ou Yoshitomo Nara. Ils ont assimilé dans leur travail les codes de la mode, du marketing, de la culture pop, de la street culture et des manga. 100% des œuvres siglées HI-LITE se sont vendues le 23 novembre dernier, dont une toile attendue de l’artiste japonais le plus cher du monde, Yoshitomo NARA. Présentée comme un véritable “chef-d’oeuvre” par Christie’s,  Can’t Wait ’til the Night Comes (que l’on pourrait traduire par “Je meurs d’impatience de voir la nuit tomber”), représente le grand visage (près de deux mètres) d’une des fillettes que peint l’artiste, laissant ici pointer une petite dent de vampire. Prix du petit monstre assoiffé de sang : 11,9m$, ce qui ne constitue par pour autant le record de Nara, lequel, rappelons le, se hisse à près de 25 m$ pour une œuvre vendue à Hong Kong par la société concurrente Sotheby’s en octobre dernier (Knife Behind Back, le 6 octobre 2019).

Il y a plus impressionnant encore que les scores du HI-LITE sur le marché hongkongais, notamment l’envolée flamboyante du prix des œuvres du franco-chinois SAN Yu. Une toile majeure a ainsi attiré des acheteurs issus de 50 pays selon la maison de ventes. Intitulée Five Nudes, ce travail magistral sur le nu féminin daté de la fin des années 50′ n’est pas sans évoquer la fameuse Danse de Matisse (réalisée 40 ans plus tôt) que l’artiste admirait tant. L’oeuvre s’est vendue pour 38,8m$, soit le meilleur prix jamais atteint pour une œuvre de l’artiste. L’oeuvre n’en était d’ailleurs pas à son premier passage en salle de ventes, et à observer son score précédent, son prix a augmenté de plusieurs millions, en l’occurrence de pas moins de 22,3 m$ comparé à sa précédente adjudication il y a huit ans, lors d’une vente au Grand Hyatt de Hong Kong chez Ravenel.

Sanyu

San Yu – Valeur actualisée de Five nudes, 1950′

Par sa radicalité et sa capacité à “fusionner les traditions de l’Est et de l’Ouest comme personne d’autre avant lui”, pour reprendre les mots d’Eric Chang, vice-président de l’art asiatique du XXème siècle et contemporain chez Christie’s à Hong Kong, San Yu s’est érigé comme un artiste incontournable du Marché asiatique. Pour les mêmes raisons que pour les grands abstraits franco-chinois ZAO Wou-Ki et CHU Teh-Chun, les cotes flambent et la demande ne tarie pas pour les œuvres fortes, du coté asiatique comme du coté occidental.

Top des nouveaux records d’artistes à Hong Kong

S2 2019

San Yu – Five nudes (1950) – 39 m$ (Christie’s)

Yoshitomo Nara – Knife Behind Back (2000) – 25 m$ (Sotheby’s)

Whan-Ki Kim – 05-IV-71 #200 (Universe) (1971) – 13 m$ (Christie’s)

Liu Ye – Smoke (2001/02) – 6,7 m$ (Sotheby’s)

Huang Daozhonu – Collection of poems – 5,5 m$ (Christie’s)

Zheng Wuchang – Landscapes (1939) – 2,1 m$ (Sotheby’s)

Eddie Martinez – High flying bird (2014) – 2 m$ (Christie’s)

Li Chen – Dragon riding Buddha (2001) – 1,4 m$ (China Guardian)

Fei Danxu – Tour of Tao Guang temple (1834) – 1,3 m$ (Christie’s)