Trésors volés des nazis

[12/11/2013]

 

L’histoire ressurgit parfois brutalement. C’est le cas depuis quelques jours avec l’information rendue publique de plus de 1 400 oeuvres volées par les nazis et retrouvées dans l’appartement munichois de Cornelius Gurlitt au printemps 2011. Parmi elles, des centaines de toiles de maîtres dont Max BECKMANN, Emil NOLDE, Franz MARC, Henri MATISSE, Pablo PICASSO, Pierre-Auguste RENOIR, Paul KLEE… amassées par le marchand d’art Hildebrand Gurlitt, père de Cornelius.

Certaines toiles furent achetées, d’autres spoliées à des collectionneurs juifs dans les années 30 et 40. Ces oeuvres modernes, qualifiées d’art dégénéré par les nazis, étant bannies des musées, Hildebrand Gurlitt avait ainsi pour mission de les vendre et de récolter des fonds destinés à assoir Linz en tant que puissante capitale culturelle du IIIème Reich. Le marchand a profité de cette mission pour construire sa propre collection d’oeuvres, collection qu’il déclara perdue après les terribles bombardements de Dresde en février 1945.

La révélation de l’existence de ce trésor est tombée après des mois de recherches – menées dans le plus grand secret – sur l’identification des oeuvres, leur origine et leurs ayants-droits. La liste des oeuvres n’est pas encore révélée mais la présence d’un tableau de Matisse est avancée, Matisse volé par les nazis en 1941 dans une banque de Libourne où le grand marchand Paul Rosenberg (1881-1959) le pensait à l’abri. Plusieurs oeuvres ayant appartenu à Rosenberg – qui fut notamment le principal marchand de Pablo Picasso dès 1918 – feraient partie de la liste. Avant de quitter Paris pour se réfugier à New York, il a tenté de cacher aux nazis quelques centaines de tableaux de grandes signatures telles que Picasso et Matisse bien sûr, mais aussi Braque, Monet, Delacroix ou Van Gogh… les dispersant en France et ailleurs. La plupart de ceux restés en France (environ 260 dont une centaine dans sa résidence de Floirac) se sont retrouvés dans les mains nazis.

Certains de ces trésors vont surgir sur le marché dans les prochains mois ou les prochaines années et l’histoire à laquelle ils sont intimement liés contribuent à en faire des oeuvres d’exception, capables de déjouer bien des pronostics d’estimation. Parmi les toiles ayant déjà fait l’objet de précédente restitution aux héritiers de Paul Rosenberg, on compte notamment une toile de la série des Nymphéas de Claude Monet (dérobée à Floirac et restituée à Anne Sinclair en 1999), série la plus cotée de l’artiste dont l’adjudication record culmine à 71 8 m$ (plus de 80,5 m$ frais inclus, Le bassin aux nymphéas, 1919, 100,4 cm x 201 cm, vente Christie’s Londres du 24 juin 2008).

D’autres oeuvres modernes précédemment restituées ont déjà marqué l’histoire des enchères : citons la Femme en rouge et vert (1914) de Fernand Léger, cédée 20 m$ le 4 novembre 2003 (plus de 22,4 m$ frais inclus, Christie’s New York), L’Odalisque, harmonie bleue de Matisse (1937) vendue 30 m$ le 6 novembre 2007 (plus de 33,6 m$ frais inclus, Christie’s New York), ou les quatre Gustav Klimt vendus 192 m$ le 8 novembre 2006. Christie’s enregistrait alors un record absolu aux enchères pour Klimt avec une adjudication de 78,5 m$ (87,9 m$ avec frais) pour le Portrait d’Adele Bloch-Bauer II.