Quelques questions sur les ventes impressionnistes et modernes.

[24/04/2012]

 

Le 1er et 2 mai, Christie’s puis Sotheby’s mettent en vente 108 lots impressionnistes et modernes lors des cessions du soir à New York. En seulement deux soirs, les sociétés espèrent vendre entre 265 m$ et 385 m$ d’œuvres d’art (sans compter l’estimation non officielle du Cri d’Edvard MUNCH qui est murmurée autour de 80 m$). L’année dernière, ces même vacations avaient rapporté 285 m$. Alors, qu’attendre de ces ventes ? Artprice répond aux interrogations entourant ces vacations spectaculaires.

Le Cri de Munch réalisera t-il un nouveau record ?

Estimé, non officiellement, autour de 80 m$, le Cri de Munch est le lot phare des ventes new yorkaises impressionnistes et modernes. Image iconique ne nécessitant aucune introduction ou commentaire, le pastel présenté ici est l’une des quatre versions réalisées par l’artiste et la seule en main privée, les trois autres étant présentées dans des musées norvégiens. A l’heure actuelle, seulement quatre œuvres dépassèrent les 80 m$ aux enchères, et Pablo PICASSO avec son Nude, Green Leaves and Bust caracole en tête des enchères les plus chères avec un résultat de 95 m$ adjugé en 2010. Si la maison de ventes Sotheby’s réussit à se départir du Cri au-dessus de 95 m$, elle ne réalisera pas seulement un record pour l’artiste mais bien un record mondial pour une œuvre d’art aux enchères, et attendez-vous à un grand nombre de papiers sur la folie du marché de l’art par la suite !

Combien de records d’artistes ?

Si le Cri d’Edvard Munch est parti pour réaliser au moins un record d’artiste (sa plus belle adjudication fut réalisée pour l’œuvre Vampire vendue 34 m$ en novembre 2008), combien d’autres records sont attendus par les maisons de ventes ? Aucun, si l’on en croit leurs estimations hautes, car aucune œuvre n’est évaluée au dessus des records connus pour les artistes. Sur les 43 artistes présentés, seul Munch est pressenti pour un nouveau sommet.
L’année dernière, Maximilien LUCE (Notre-Dame de Pari vendue 3,7 m$), Paul DELVAUX (Les cariatides vendue 8 m$) et Maurice DE VLAMINCK (Paysages de banlieue vendue 20 m$) obtinrent leur nouveau record lors des mêmes vacations.

Assistera-t-on encore à un défilé d’œuvres de Picasso ?

Seulement 14 œuvres signées Pablo Picasso sont proposées cette année, soit 13% de moins que lors des ventes impressionnistes et modernes new yorkaises de novembre dernier, moins qu’en mai de l’année passée lors des mêmes cessions ou qu’en novembre 2010. En fait, il faut revenir à novembre 2009 pour voir moins de 15 œuvres de Picasso présentées lors des sessions du soir à New York chez Christie’s et Sotheby’s. Les maisons de ventes ont donc choisi de présenter d’autres artistes : dont 7 œuvres de René MAGRITTE et 6 de Joan MIRO. Le marché de l’art compte bien capitaliser sur les récentes bonnes performances de ces artistes : Joan Miro vient de signer son nouveau record en février dernier (Painting Poem (1925) vendue 23.6 m$) et 3 des 6 plus beaux résultats de René Magritte furent frappés ces 12 derniers mois. Pour accompagner le Cri, 5 autres œuvres de Munch seront aussi présentées aux enchères durant ces deux journées, toutes estimées au-dessus de 1,5 m$. Rappelons que l’artiste n’a pas vendu plus de 4 œuvres supérieures à 1,5 m$ depuis 2006 (cette année-là, il vendait sur 12 mois, 6 œuvres entre 1,9 m$ et 9,6 m$).

L’art est-il encore rentable ?

Oui ! Et encore plus rentable quand il s’agit d’œuvres haut de gamme. Chez Christie’s et Sotheby’s, la moitié des œuvres présentées ont déjà fait l’objet d’un passage en salle. Bien sûr, aucune œuvre n’est présentée sous le prix d’acquisition d’origine, et certaines belles plus-values sont attendues.
Chez Christie’s d’abord, Le Repos de Picasso est présenté entre 5 et 7m$ dix ans après son acquisition pour 2,8 m$ en novembre 2002, s’il part dans son estimation, l’œuvre aura réalisé entre 6 et 9,5% de plus-value annuelle. Femme dans l’atelier est un autre Picasso qui devrait réussir une plus value annuelle entre 10 et 12%, puisqu’il est présenté entre 3 et 5m$ alors qu’il passait aux enchères en 1984 pour 220 000 $. Second artiste le plus cher du marché (au moins encore pour quelques jours), Alberto GIACOMETTI est aussi l’un des plus rentables : la sculpture Buste de Diego partait à 3,2m$ il y a 7 ans, cette année elle est présentée entre 8 et 12 m$, une rentabilité annuelle espérée entre 14 et 20% !
Chez Sotheby’s le lendemain, une des œuvres phares de la vente et signée Chaïm SOUTINE : Le chasseur de chez Maxim’s est présentée entre 10 et 15 m$ alors qu’elle s’échangeait il y a à peine 8 ans pour la moitié du prix (6 m$), et en 1978 pour 120 000 £ ! Achetée pour 2m$ il y a 14 ans, Printemps Nécrophilique de Salvador DALI est aussi présentée le 2 mai au soir et estimée entre 8 et 12 m$. Si l’œuvre part dans cette fourchette, elle rapportera à son propriétaire entre 300 et 500% de l’investissement initial.Une même version de l’œuvre de Constantin BRANCUSI : Prometheus (1911) partait il y a 10 ans pour 1,6 m$ chez Phillips New York, il y a 13 ans pour 1,1 m$ chez Christie’s New York, et 300 000 $ il y a 30 ans chez Sotheby’s New York. Cette année, Prométhée est annoncée entre 6 et 8 m$ !

Le 2 mai au soir, la maison de ventes Sotheby’s pourrait réaliser plus de 320 m$ si elle dépasse le total de ses estimations hautes (incluant l’estimation non officielle pour le Cri), réalisant le meilleur résultat depuis 2006 pour une vente impressionniste et moderne (le 8 novembre 2006, Christie’s réalisait une vente totalisant 418m$) et la meilleure vente de l’histoire de la maison de ventes Sotheby’s (le précédent record de Sotheby’s totalisait le 9 novembre 2011 plus de 270 m$ de produits des ventes). Tandis que la veille, la maison de ventes Christie’s pourrait ne pas dépasser les 140 m$ (ses attentes les plus optimistes).