Photojournalisme – Mémoire collective et photographie

[16/01/2006]

 

Edward STEICHEN, Cecil BEATON, Henri CARTIER-BRESSON, Robert CAPA, Raymond DEPARDON, Robert DOISNEAU, Walker EVANS, Dorothea LANGE, Marc RIBOUD en sont quelques une des figures majeures.
Le photojournalisme à longtemps été considéré comme une pratique annexe au champ de l’art, de même que la photo scientifique ou ethnographique. Le photojournaliste témoigne de son temps et capture le réel grâce à l’appareil photographique. Ses images ont un poids culturel indéniable puisqu’elles sont gravées dans la mémoire collective, essentiellement grâce à leur diffusion médiatique. Néanmoins, les photo reporters possèdent des qualités d’ordre esthétique (ultra définition de l’image, importance du cadrage, etc.) qui les ont consacrés sur la scène artistique. Ainsi, en 2004, avaient lieu une rétrospective Robert CAPA à la BNF, une exposition de photos de la guerre de Tchétchénie par Stanley Greene au MOCA de Lyon, ou encore l’ouverture du musée War Photo Limited a Dubrovnik, premier musée entièrement dédié aux reportages des photographes de guerre contemporains

Le marché du photojournalisme est en pleine effervescence! Le chiffre d’affaire pour ces travaux photographiques a augmenté de plus de 500% en 10 ans. Cet engouement est surtout manifeste aux Etats-Unis (51% du chiffre d’affaire), en France et en Grande-Bretagne.

En France, la majorité des œuvres de Marc RIBOUD et Raymond DEPARDON s’échangent à moins de 1000 euros ; celles de Robert DOISNEAU entre 1 000 et 2 000 euros (hormis pour le légendaire Baiser de l’Hôtel de ville qui dépasse régulièrement son estimation (à noter les 155 000 euros décrochés le 25 avril 2005 pour le tirage dispersé chez Arturcial – Briest – Le Fur – Poulain – F Tajan) ; les adjudications pour Henri CARTIER-BRESSON partent entre 1000 et 5000 euros et trouvent, comme pour Doisneau, un écho favorable aux Etats-Unis (59% des transactions).Aux Etats-Unis, Walker EVANS et Dorothea LANGE, engagés par la Farm Security Administration durant le New Deal, ont magistralement témoigné de la misère rurale des années 30. Ils affichent une cote plus gonflée que celle des français (entre 1000 et 10 000 euros en moyenne) et dans une ascension étonnante (la côte de Lange a pris 200% en deux ans !) L’américain d’adoption Robert CAPA, qui fonda l’agence Magnum avec Cartier-Bresson, fut le seul photographe présent lors du débarquement allié en Normandie. Ses clichés demeurent rares en ventes publiques et sa cote le rapproche plus de Cartier-Bresson que de ses compatriotes.

Les prix de Henri CARTIER-BRESSON ont amorcé une très nette progression depuis son décès en 2004. De nombreux amateurs se sont rués sur ses photos lors des ventes de 2005, si bien que le taux d’invendus a régressé de plus de 60% !Si la majorité des transactions s’effectue dans une fourchette de 1000 à 5000 euros, les dernières ventes ont confirmé sa place dans les résultats records : Christie’s adjugeait cette année On the banks of the Marne 110 000 USD (90 827 euros). La photo témoigne d’une scène pittoresque, un pic-nic au bord de la Marne, et reflète les mutations de la société française des années 1930. Le cliché date de 1938, soit deux ans après les premiers congés payés. Le tirage est pourtant postérieur (1955) et les amateurs, sélectifs dans ce domaine, recherchent en priorité les tirages vintages des années 30-50.

Luxembourgeois émigré aux Etats-Unis, Edward STEICHEN fut directeur de la photo aérienne des forces alliées pendant la première guerre mondiale. Cependant, ses travaux portent essentiellement sur les portraits de personnalités (Garbo, Churchill, etc.) ou des mises en scène. Plébiscité par les américains, la majorité de ses œuvres s’échangeaient entre 1000 et 10 000 euros mais les dernières ventes ont fait grimper sa cote. Christie’s Paris dispersait en novembre dernier la collection Claude Berri : les photos des années 20 ont fait de beaux résultats (adjudications entre 25 000 et 85 000 euros) et le superbe Balzac de Rodin culmina à 130 000 euros ! Les enchères sont plus optimistes sur le sol américain : Sotheby’s NY adjugeait, en novembre dernier, un portrait de Gloria Swanson de 1924 pour 230 000 USD. Le même sujet avait déjà surpris en 2004 en partant à 130 000 USD pour une estimation haute de 30 000 USD ! Ses photogravures suscitent moins d’enthousiasme. L’amateur peut acquérir ces « morceaux d’histoire » pour moins de 1000 euros.