Photographie

[17/04/2012]

 

Le 6 avril 2011, la vente dédiée à la photographie de Sotheby’s était une réussite particulièrement belle avec 4,5 m$ de chiffre d’affaires (hors frais) et 82 % d’œuvres vendues. Sa concurrente Christie’s talonnait ce score le 8 avril avec 4,2 m$, tandis que Phillips de Pury & Company clôturait le bal avec une vente fleuve de 259 lots, pour lesquels 90 % trouvaient preneurs le 9 avril, dégageant 4,6 m$. Les trois maisons de ventes leaders enregistraient donc un produit de ventes global de 13,3 m$ pour leurs cessions new-yorkaises d’avril 2011. Un an plus tard, ce chiffre est révisé à la baisse de 1 m$, à cause d’un net recul de Sotheby’s dont le taux d’invendus est passé de 18 % à 31 %. Les autres challengers se sont bien maintenus : avec 4,2 m$ de résultat pour Phillips de Pury & Company le 4 avril 2012 (à peine 19 % d’invendus) et pas moins de 5,38 m$ pour Christie’s le 5 avril (19 % d’invendus) .

Le résultat de Sotheby’s n’aurait pas été si médiocre sans l’échec de vente de son lot phare : une boîte contenant 10 photographies de Diane ARBUS, chacune numérotée à 50 exemplaires. Ces clichés, tirés par Neil SELKIRK au début des années 70 (Diane Arbus décédait en 1971) étaient attendus entre 400 000 et 600 000 $. Pourtant, les clichés les plus célèbres de cette édition peuvent atteindre 80 000 $ en salles, en témoigne les Identical twins vendues en avril 2010 (Phillips de Pury & Company). Le même sujet, tiré du vivant de l’artiste et signé de sa main, cote quant à lui entre 200 000 et 400 000 $ en moyenne ! Si les classiques incontournables comme Ansel Easton ADAMS, William Henry Fox TALBOT, Robert FRANK, Irving PENN ou Robert MAPPLETHORPE se sont vendus sans trop de peine, des signatures plus contemporaines n’ont pas rattrapé leur cote de 2007. C’est le cas par exemple d’ Andres SERRANO dont la Black Mary (100,3 x 68,6 cm, ed. 10) n’atteignait pas son estimation basse de 30 000 $, quand elle se vendait 34 000 $ en 2001 et 36 000 $ en 2007.

Christie’s s’en sortait mieux, notamment grâce à Irving PENN, dont 25 clichés étaient offerts. La fameuse Black and white Vogue Cover atteignait 360 000 $, le second plus beau coup de marteau enregistré pour ce cliché très graphique de 1950 (record de 400 000 $ frappé en avril 2008 chez Christie’s). L’ancienne couverture de Vogue s’est imposée comme le meilleur résultat de ces trois jours de ventes dédiées à la photographie. Le 12 mars 2012, Christie’s dispersait pas moins de 36 clichés de William EGGLESTON à New York dont 16 trouvaient preneurs entre 100 000 et 480 000 $… Ce pionnier de la couleur dans la photographie d’art a vu sa cote exploser entre 2004 et 2008 (+23 %). Il fallait acheter en 2009-2010, époque où le marché contracté offrait de belles opportunités. Car à l’heure actuelle, les petits formats atteignent des seuils jamais vus jusqu’alors, à l’instar d’un petit cliché condensant l’Amérique des années 70 (Untitled (1973), 21,1 x 47,7 cm) frappé 200 000 $ ce 5 avril contre une fourchette initiale de 70 000 – 90 000 $. Christie’s soumettait 15 photos du même artiste ce 5 avril, dont la plupart était accessible entre 5 000 et 15 000 $. Autres résultats notables : Christian SCHAD, chantre de la Nouvelle Objectivité bien connu pour ses peintures, signait chez Christie’s son record en photographie pour la Schadographie Nr. 17, cédée 180 000 $.Les amoureux de photographies mythiques se sont par ailleurs âprement disputés le fameux Self Portrait with Wife and Models d’Helmut NEWTON (vendu 75 000 $ quand des clichés moins célèbres s’échangeaient entre 9 500 et 12 000 $), le Trolley – New Orleans de Robert FRANK (adjugé 360 000 $ contre une estimation haute de 150 000 $), ou encore un lot comprenant 29 photogravures d’Edward STEICHEN pour 100 000 $. Parallèlement, les signatures contemporaines ont maintenu leur cote face aux grands classiques et des œuvres signées Massimo VITALI, Adam FUSS, Vik MUNIZ, Candida HÖFER ou Hiroshi SUGIMOTO trouvaient preneurs entre 45 000 et 55 000 $.

La cote des photos des années 60 à 80 grimpe elle aussi en flèche, si bien que Phillips de Pury & Company enregistrait un record impressionnant pour Candy Cigarette (1989, ed. 25) de Sally MANN, vendue 220 000 $ contre une estimation haute de 60 000 $ ; un nouveau sommet pour Francesca WOODMAN (Untitled, Rome, 1977, cédée 140 000 $ contre une estimation de 15 000 à 20 000 $)… et surtout une adjudication de 520 000 $ pour l’Untitled Film Still # 49 (1979) de Cindy SHERMAN estimé 120 000 $ de moins !Comme à l’accoutumé, ces grandes ventes offraient aussi leur lot d’œuvres abordables comme des tirages chromogéniques de la fameuse Cindy Sherman ou des tirages albuminés d’ Eugène ATGET à partir de 2 000 $.

Les prochaines grandes ventes de photographies ont lieu à Londres en mai : Christie’s propose une centaine de lots estimés entre 30 000 et 120 000 £ le 16 mai dont un Diptych d’ Andreas GURSKY (Art Market Confidence Index, est. 80 000-120 000 £), le Guggenheim Museum, New York vu par Hiroshi SUGIMOTO (est. 70 000-90 000 £) ou une large épreuve Self-Portrait with Wife and Models ‘Vogue’ Studios, Paris 1980 (est. 70 000-90 000 £) d’ Helmut NEWTON.
Une semaine avant cette nouvelle cession de ventes, le monde de la photographie contemporaine attend avec impatience la Post-War and Contemporary Art Evening Sale de Christie’s (New York) qui inclut à cette vente du 8 mai un Untitled # 96 de Cindy SHERMAN, issu de la série Centerfold (1981). Rappelons qu’un autre exemplaire décrochait pas moins de 3,4 m$ en mai 2011, devenant pour quelques temps la photographie contemporaine la plus chère du monde. L’exemplaire soumis aux enchères le 8 mai sera un bon test pour le marché très haut de gamme de la photographie.