Pékin : le goût de la tradition

[13/09/2011]

 

Pékin rivalise avec New York en terme de résultats de ventes mais force est de constater que les artistes récompensés, qui s’avèrent être uniquement des artistes asiatiques, sont des dessinateurs et des peintres parfois exceptionnels. A Pékin, la tradition du médium l’emporte quand ce n’est pas celle du sujet.

Liu Chunxi / le jeune poids de la tradition
Au regard critique sur la société et la culture de AI Weiwei, les riches collectionneurs chinois préfèrent les sujets traditionnels de LIU Chunxi. A trente ans, ce jeune millionnaire aux enchères est inconnu en Occident et pourtant, le 20 décembre 2010, ses œuvres dispersées chez Beijing CNTC International Auction généraient près de 10 m€ ! Ses bouddhas, cygnes noirs aux lotus, paons et arbres en fleurs peints sur soie avec une formidable dextérité se vendent parfois au-dessus du million d’euros. Ce 20 décembre, pas moins de six œuvres signaient des enchères millionnaires avec un record équivalent à 2,5 m€ pour Divinity (141×242 cm, 22 mҰ). Né en 1981, Liu Chunxi, qui a grandi dans un temple religieux, dessine des bouddhas depuis l’âge de cinq ans. Il intègre l’École des Beaux-arts de Pékin, la plus cotée de Chine, à seize ans. Les sujets de prédilection restent traditionnels après cette formation mais la patte de l’artiste est plus émancipée et moderne. Ses œuvres ont déjà voyagé en Asie au grè d’expositions à Hong Kong, en Corée du Sud, au Japon et en Malaisie.
Grâce à la vente de ses œuvres, Beijing CNTC International Auction s’est positionné cette année en cinquième position des sociétés de ventes de Pékin, pour l’art contemporain.

Les autres maisons de ventes doivent leur réussite à des artistes plus connus en Occident tels que Chen Yifei, Wang Yidong, Liu Xiaodong, Zeng Fanzhi, Liu Chunxi, Ai Xuan, Leng Jun, Zhou Chunya, He Jiaying.

Chen Yifei au top du marché pékinois
Fort d’un produit de ventes avoisinant les 20 m€ cette année (juillet 2010-juin 2011), CHEN Yifei fut l’artiste contemporain le mieux vendu à Pékin. Il signe aussi la meilleure adjudication contemporaine de Pékin. L’année dernière, ses performances, deux fois moindres et déjà remarquables (8,8 m€ en 14 adjudications) lui permettaient de détrôner Damien HIRST de 500 000 €. Cette année, son nouveau record d’enchère équivaut à 7,78 m€ grâce à la dispersion de Wind of Mountain Village, grande huile sur toile vendue le 28 mai 2011 chez China Guardian. A l’instar de Liu Chunxi, les qualités de son travail passent par une superbe maîtrise technique et une peinture traditionnelle dans la mesure où ses œuvres sont figuratives. Ses qualités s’avèrent rassurants pour les collectionneurs asiatiques, moins enclins à invertir, à de tels niveaux de prix, sur des œuvres conceptuelles, des installations ou des media plus actuels.

Dans la même veine, l’artiste AI Xuan décrochait cette année un record avec sa toile The Sacred Mountain vendue plus de 2,1 m€. Les exemples de l’extraordinaire cote d’une peinture figurative au réalisme impeccable sont légion. Citons encore WANG Yidong, l’un des artistes les mieux vendus à Pékin (second en terme de produit de ventes avec 14,18 m€ cette année 2010/2011) ou LENG Jun, dont le portrait photo réaliste d’une jeune femme s’est arraché 3,22 m€ (1er décembre 2010 chez Poly). Par ailleurs, les beautés mièvres sur rouleaux de soie de HE Jiaying atteignent des centaines de milliers d’euros.

La création contemporaine et les résultats obtenus aux enchères à Pékin illustrent clairement la coexistence de deux marchés : l’un aux affinités traditionnelles, voire conservatrices, porté par de richissimes autochtones et l’autre, plus grinçant et plus international, porté par les signatures telles que ZHOU Chunya, LIU Xiaodong ou le célèbre ZENG Fanzhi, dont la toile A Series No.3 : Marriage, plantait d’ailleurs une enchère équivalente à 3,7 m€ le 2 juin 2011 chez Poly.