New-York amputé par la crise

[11/05/2009]

 

Après une chute de –10% des prix de l’art sur le premier trimestre 2009 et une baisse cumulée d’environ –30% de l’art Impressionniste et Moderne depuis janvier 2008, le coup d’envoi des ventes Impressionnistes et Modernes de New-York était attendu comme un véritable test pour le marché haut de gamme. Le couperet est tombé le 6 mai, au terme des deux ventes du soir de Christie’s et Sotheby’s. Leurs chiffres d’affaires sont largement amputés et des pièces majeures furent ravalées ou retirées de la vente, faute d’un réajustement suffisant des fourchettes d’estimation.

Face à la restriction de la demande, les auctioneers avaient dégraissé leurs catalogues de ventes de moitié par rapport à 2007. Conséquence logique : ils enregistrent un faible taux d’invendus (20% en moyenne) et des résultats en chute libre. La correction est surtout sévère pour Sotheby’s qui attendait 81,5M$ de sa vente du 5 mai et doit se satisfaire de 52,9M$. Rappelons que le 7 mai 2008, Sotheby’s enregistrait 208M$ pour sa vente Impressionniste et moderne. Ce résultat décevant tient non seulement au mauvais contexte financier, mais aussi au découragement des acheteurs face aux estimations agressives de deux lots phares: le Chat d’ Alberto GIACOMETTI et La Fille de l’artiste a deux ans et demi avec un bateau de Pablo PICASSO. Ils furent tous deux ravalés quelques millions avant d’atteindre leurs estimations basses de 16 M$. Sous de meilleurs hospices en mai 2008, Sotheby’s hissait Le baiser de Picasso, une grande toile de 1969, à 15,5M$. Désormais, les enchères à plus de 10M$ se font rares : seul Christie’s peut s’enorgueillir d’une adjudication à 8 chiffres sur ces deux jours. Elle fut signée pour le Mousquetaire a la pipe de Picasso frappé 13M$. L’œuvre n’en était pas à son premier passage en salle et était adjugée 6,4M$ par le même auctioneer en novembre 2004.

Les deux mastodontes se sont livrés à une course aux records pour Tamara DE LEMPICKA, dont les toiles sont habituellement rares en salles. En 2008, seules cinq toiles ont alimenté le marché des enchères contre douze en mai 2009, grâce à la dispersion chez Sotheby’s de 10 œuvres issues de la collection du créateur Wolfgang Joop. Le Portrait of Marjorie Ferry se démarquait des autres et signait un record à 4,3M$ le 5 mai. Le lendemain, Christie’s enterrait ce score en dispersant un Portrait de Madame M. pour 5,4M$.

Au terme de ces deux soirées de ventes, Christie’s affiche un meilleur bilan que son rival grâce aux 89.4M$ dégagés en 38 coups de marteau. Passée la déception d’une toile de Max ERNST pressentie pour un record mais finalement retirée de la vente (Malédiction à vous les mamans estimation 7 M$-9M$), des résultats forts honorables furent signés pour le Buste de Diego (Stele III) par Alberto Giacometti (6.8 M$) et pour un autre Picasso, Femme au chapeau, adjugé 6,8M$ (sous son estimation basse de 8M$). Le meilleur résultat de Sotheby’s fut enregistré pour une toile de Piet MONDRIAAN de 1932 vendue au double de l’estimation à 8,2M$. Cette toile était indéniablement portée par le récent record de 24,6M$, frappé lors de la fameuse dispersion Y.Saint Laurent & P.Bergé en février 2009 (Christie’s, Paris, 19,2M$).

Si le produit des ventes de Sotheby’s replonge le marché new-yorkais dans le marasme, la majorité des acteurs du marché de l’art entretien un bel optimisme (AMCI à plus de 30 points au 7 mai) porté par les belles opportunités d’achats des récentes baisses de prix.