Marlene Dumas – Le corps à l’état brut

[10/07/2012]

 

Parmi les artistes féminines les plus cotées du marché, Marlène Dumas a une place singulière et incontournable sur la scène contemporaine. Depuis plus de 35 ans, elle interroge sans pudeur les interprétations du regardeur en le confrontant à ses représentations controversées du corps humain. La simplicité déconcertante de ses portraits explore avec sincérité et brutalité les maux de la vie.

Originaire d’Afrique du Sud, Marlene DUMAS est née à Cap Town en 1953. À la fin de ses études d’arts plastiques à la Michaelis School of Fine Art (1972-1975), elle quitte son pays natal pour l’Europe. Elle s’installe dès lors aux Pays-Bas où elle poursuit ses études artistiques à l’Atelier ’63 de Haarlem (1976-1978). Elle entreprend ensuite des études de psychologie à l’Université d’Amsterdam (1979-1980) avant d’exposer pour la première fois à Paris en 1979.

Son travail se concentre sur la figure humaine à partir des années 80. Elle explore alors des thématiques existentielles dont le racisme, la sexualité, la religion, les notions de culpabilité et de pardon, l’innocence, la violence, la maternité et l’enfance. A ces notions récurrentes, elle juxtapose des questionnements liés à sa propre histoire. Elle joue de couleurs souvent délavées pour ses dessins et franches pour ses peintures, à l’image de la fascinante huile Jule, Die Vrou, un visage de femme baigné de rouge où seuls les yeux et les lèvres, attributs de la séduction et de la sexualité, sont précisément représentés. Cette œuvre d’une grande tension psychologique trouvait acquéreur pour 1,1 m$ le 10 novembre 2004 (Christie’s New York).
Marlène Dumas confronte le corps à des formes obscures du désir, des situations perverses qui interrogent le spectateur sur sa perception de l’œuvre.

Ses débuts aux enchères
Ses premiers pas en vente publique datent de 1994 et débutent logiquement dans son pays d’adoption : les Pays-Bas. Cette année-là, 3 dessins et peintures trouvent acquéreurs entre 790 $ et 3 100 $. Témoignant du soutien des maisons de ventes et des collectionneurs, l’acrylique et crayon sur toile The girl can’t help it passe alors deux fois en salle, est frappée 1 115 $ en mars puis trouve preneur 9 mois plus tard pour 3 110 $ (Christie’s Amsterdam, le 7 décembre 1994). L’année 1999 marque un tournant dans sa carrière avec sa première exposition au Musée Hedendaagse Kunst d’Anvers. L’évènement confirme son envergure sur la scène internationale et les effets sur la progression de ses prix se font vite sentir, si bien que dans la foulée Christie’s New York réalise sa première vente au-dessus de 22 000 $, avec l’encre sur papier Checkered Skirt (le 20 mai 1999).

Un marché haut de gamme
Lorsqu’en 2001/2002, le Centre Pompidou puis le New Museum of New York organisent la première rétrospective itinérante de ses œuvres sur papier Name No Names, sa cote grimpe de plus belle. Dans un premier temps, Christie’s New York confirme la progression de ses prix en signant en 2002 un nouveau record de 42 000 $ pour Candle Burning (le 14 novembre) puis l’artiste franchit à trois reprises le seuil des 100 000 $ (en 2003), jusqu’à dépasser le million en 2004 avec Jule, Die Vrou puis avec The Garden et The Teacher (Sub a) respectivement adjugées 1,2 m$ et 2,9 m$ en 2005 (Christie’s New York, le 8 novembre et Christie’s Londres, le 9 février).
Continuant son ascension fulgurante, son indice des prix affiche une hausse de plus de 200 % entre 2000 et 2008 ! En dehors de la frénésie du marché d’alors, sa rétrospective « Measuring Your Own Grave » au Museum of Contemporary Art de Los Angeles, puis au MoMA de New York, n’est sans doute pas étrangère à cette impressionnante progression. Adjugée 5,61 m$ (2,28 m£) en 2008, The Visitor est depuis la plus belle enchère de Marlène Dumas. Cette imposante huile sur toile (180 x 300 cm, 1995) dévoile une scène où six prostituées tournent le dos au spectateur et fixent un passage éclairé, dans l’attente d’un visiteur…
310ème artiste la mieux vendue en 2011, son chiffre d’affaires annuel dépassait alors les 3,5 m €. Ses huiles sur toile (seulement 84 adjudications contre 239 pour ses dessins et aquarelles,) sont plus rares et mieux valorisées. Pour une œuvre caractéristique, comptez un budget minimum de 100 000 $ à 200 000 $, huiles sur toile et aquarelles confondues. Les opportunités d’achat sont désormais rares à moins de 20 000 $, et il s’agit généralement d’aquarelles moins abouties comme 2 Candles Burnt Up (adjugée 18 000 €, Christie ‘s New York, le 9 novembre 2011). Désormais, seules ses estampes sont abordables à moins de 5 000 $.