Mark Rothko

[30/11/2008]

 

La Tate Modern de Londres rassemble des œuvres tardives de Mark Rothko jusqu’au 1er février 2009. L’exposition plonge le spectateur dans des « champs colorés » sombres, des espaces chromatiques propices à la méditation. Marcus Rothkowitz est né en Lettonie en 1903, élevé aux Etats-Unis dès l’âge de 10 ans. Il consacre sa vie à l’art à partir des années 20, fonde l’Artist Union de New York en 1934 puis côtoie les futurs grands artistes de l’Ecole de New York, dont Jackson POLLOCK et Adolph GOTTLIEB. Par facilité, son nom (américanisé en 1940) fut rattaché à l’Expressionnisme Abstrait américain. Cependant, Mark ROTHKO est dégagé de cette influence à la fin des années 40. Son répertoire plastique rompt alors avec la figuration, se limitant à des zones colorées vibrantes qu’il considère comme des espaces d’énergie vivants, des concrétions de l’esprit, et non comme des zones d’abstraction. Ses toiles sont des substrats spirituels, qualifiées par Clement Greenberg de Color Field Paintings.

A la fin des années 50, les couleurs s’assombrissent. Rouges sourds, bruns et noirs composent essentiellement la palette jusqu’au suicide de l’artiste en 1970. Cette veine sombre était moins appréciées par les collectionneurs que les toiles aux couleurs vives jusqu’en 2007, année où un Untitled aux déclinaisons de noirs, achevé quelques mois avant le décès de l’artiste décrochait plus de 10 millions de dollars (14 novembre 2007, Sotheby’s).

En 1961, le Museum of Modern Art de New York lui consacrait une grande exposition individuelle. Quatre ans plus tard aux enchères, une Color Field painting de 1955, Deux rectangles sombres sur fond rouge (204 x 107 cm), était adjugée 10 000 dollars. En 1966, une toile similaire, Red Number 22 (1957) était enlevée 5 500 dollars de plus… Vingt ans plus tard, les belles toiles emportaient des enchères millionnaires, puis chez Sotheby’s en 1999, l’œuvre N°15 vibrante de jaune et de rouge, décrochait pour la première fois 10 millions de dollars en salle. Cette même toile fut à nouveau soumise à enchères en mai 2008 chez Christie’s : elle s’arrachait 45 millions de dollars ! Il ne s’agit pourtant pas de l’enchère la plus spectaculaire pour Rothko, détenteur de la plus forte adjudication de l’année 2007 avec White Center, adjugée 65 millions de dollars le 15 mai chez Sotheby’s, le plus beau coup de marteau pour une œuvre d’après-guerre. Sa cote fut considérablement dopée en 2007 par six œuvres frappées plus de 10 millions de dollars, propulsant son produit des ventes annuel à 207 M$. Jusqu’alors, les années les plus fastes dégageaient entre 35 et 50 millions de dollars. Entre janvier et novembre 2008 le produit des ventes enregistré flirte avec les 50 millions de dollars, grâce au coup de marteau de 45 millions de dollars pour No.15 (1952).Rothko réalise une année 2008 honorable qui eut été exceptionnelle si la toile Orange, Red and Yellow (205 cm x 175 cm) peinte en 1956, ne fut pas boudée en mai chez Sotheby’s… C’était l’un des tableaux phares de la vente d’art d’Après-guerre et contemporain du 14 mai 2008, alors que le marché était encore euphorique.

Le record de l’année fut pour Rothko celui du taux d’invendus : 26,6% des œuvres proposées entre janvier et novembre furent boudées. Un taux trois fois plus élevé qu’à l’habitude (9% d’invendus entre 1998 et 2007).