Maintenant à New York : grandes foires et ventes de prestige

[07/05/2013]

 

Le calendrier des grandes foires se calque à celui des grandes ventes aux enchères. Ainsi, la Frieze (10-13 mai, Randall’s Island, Manhattan, 180 galeries), qui a drainé dans son sillage plusieurs autres foires d’art contemporain, dont Pulse (9-12 mai, The Metropolitan Pavilion, 60 galeries) et Cutlog (10-13 mai, Suffolk St, Lower East side, 40 galeries), organise ses previews à l’heure des ventes impressionnistes et modernes de Sotheby’s et Christie’s (les 7 et 8 mai 2013), avant l’ouverture des grandes ventes d’après-guerre et contemporain (les 14 et 15 mai).

Christie’s et Sotheby’s calquent leurs ambitions sur l’excellence du cru 2012

En mai 2012, les ventes d’après guerre et contemporain de Christie’s et Sotheby’s New York dégageaient 578,3 m$ de produit de ventes (hors frais), un record dans l’histoire de leurs ventes d’art contemporain. Le cru 2013 s’annonce sous de bons auspices : l’indice de confiance du marché de l’art qui se trouve au même niveau qu’en 2012 (AMCI d’Artprice à 27,5 points), témoigne d’une forte volonté d’achat et surtout, plusieurs pièces proposées s’avèrent être très haut de gamme, plus haut de gamme d’ailleurs que pour les ventes de prestige d’art impressionniste et moderne. On peut en effet s’attendre à dix enchères supérieures à 10 m$ lors des ventes modernes Christie’s et Sotheby’s (cinq pour Christie’s et cinq pour Sotheby’s, 7 et 8 mai 2013) ainsi qu’à 19 promesses de ventes au-delà de ce seuil pour les sessions d’après-guerre et contemporain.

Parmi les lots phares, Christie’s peut prétendre à un nouveau record avec Le Petit pâtissier de Chaïm SOUTINE. Pour cette œuvre de 1927 estimée entre 16 m$ et 22 m$, la maison de ventes s’est engagée sur un prix garanti. La garantie des prix, dont bénéficient plusieurs lots offerts en mai, témoigne de la grande confiance des maisons de ventes en la bonne tenue du marché haut de gamme, car les sociétés prennent un risque économique en se portant garantes d’un prix de vente minimum (lequel reste confidentiel). Sotheby’s espère engranger plus de 60 m$ en deux coups de marteau : l’un pour Les Pommes de Paul CÉZANNE (1889, 38,5 cm x 46 cm, est. 25 m$ – 35 m$), l’autre pour L’Amazone d’Amedeo MODIGLIANI (est. 20 m$ – 30 m$). Le lendemain, trois études au fusain pour L’Amazone seront proposées entre 70 000 $ et 100 000 $ (estimations basses, Sotheby’s, le 8 mai 2013).

La semaine suivante, Yves KLEIN, Francis BACON, Gerhard RICHTER, Jean-Michel BASQUIAT, Barnett NEWMAN, Jackson POLLOCK, Clyfford STILL, Mark ROTHKO, Cy TWOMBLY, Jeff KOONS et Roy LICHTENSTEIN prétendent tous à des résultats à huit chiffres.
Là encore, il est question de prix garantis, notamment sur une œuvre majeure de Roy Lichtenstein, Woman with flowered hat. Le prix de cette œuvre demeure bien mystérieux, son estimation elle-même n’est pas divulguée par la maison de ventes (vente Christie’s du 5 mai 2013). Christie’s espère certainement signer un nouveau record pour l’artiste, une adjudication plus belle encore que celle frappée l’année dernière par sa concurrente. Sotheby’s adjugeait en effet Sleeping girl, une toile de 1964, à son estimation haute de 40 m$ le 9 mai 2012. Le lot offert cette année par Christie’s est une œuvre « picassienne » de 1963, issue d’une suite de quatre toiles peintes par Lichtenstein d’après des portraits de femmes de Picasso, dont trois sont déjà bien en mains : Femme au chapeau (1962) dans une collection privée, Femme d’Alger (1963) dans la collection Eli et Edyth Broad, Femme dans un fauteuil (1963) à la Nationalgalerie de Berlin.

L’indice des prix de Lichtenstein affiche une progression de 300 % sur la décennie et l’artiste a encore une marge de progression, n’ayant pas encore atteint les sommets d’Andy Warhol. Outre le Pop Art, Christie’s et Sotheby’s prennent position sur les signatures phares de l’expressionnisme abstrait américain. Une niche dont la gamme de prix est de plus en plus importante, comme en témoignaient les résultats spectaculaires atteints en 2012.

Les promesses de l’expressionnisme abstrait américain

Parmi les pièces maîtresses de ces sessions new-yorkaises, Ornement VI, toile monumentale de Barnett NEWMAN est attendue entre 30 m$ et 40 m$ le 14 mai chez Sotheby’s.
Les atouts de cette pièce de Newman sont multiples : l’œuvre, majestueuse et très bien datée (1953), fut offerte par l’artiste à son épouse Annalée, puis gagna la collection Weisman en 1961. Il s’agit par ailleurs d’une denrée rare, car les cinq autres toiles de la série ne sont plus sur le marché : quatre sont en place au sein de collections muséales (Museum of Modern art de New York, Wadsworth Atheneum à Hatford, Allen Memorial Art Museum dans l’Ohio) et la dernière soumise à enchère signait l’actuel record de l’artiste à hauteur de 20 m$ (Ornement V, 1952, 152,4 cm x 96,5 cm, passait son estimation haute de 5 m$ le 8 mai 2012 chez Christie’s).

Cette œuvre de Newman se disputera la vedette avec une œuvre de Jackson POLLOCK offerte entre 25 m$ et 35 m$ le lendemain chez Christie’s (le 15 mai, Number 19, 1948).

La société de ventes Christie’s met en avant une prestigieuse sélection d’expressionnistes abstraits avec Jackson POLLOCK, Clyfford STILL, Willem DE KOONING, Mark ROTHKO, Franz KLINE, Philip GUSTON et Joan MITCHELL. Elle mise sur « Le » mouvement historique de l’art contemporain américain et sur l’un des segments les plus rentables du marché, celui-là même qui lui permettait, en mai 2012, de dégager 118 m$ en trois coups de marteau (Mark ROTHKO, Jackson POLLOCK et Barnett NEWMAN). Christie’s doit à l’expressionnisme abstrait américain le plus beau coup de marteau jamais enregistré en Occident pour une œuvre d’après-guerre. Celui-ci résonnait le 8 mai 2012 au Rockefeller Center pour Orange, Red, Yellow de Mark Rothko, à 77,5 m$.

Certes, aucune estimation ne laisse présager un tel score pour l’édition 2013. Cependant, nous ne sommes jamais à l’abri de surprises lors de ces ventes de prestige : l’an dernier, la fameuse Orange, Red, Yellow de Rothko surpassait son estimation haute de… 32,5 m$ !