Lucio Fontana : En quête d’immatérialité

[27/12/2006]

 

Né en Argentine d’un père italien, Lucio FONTANA déploie son langage artistique en Italie après la seconde guerre mondiale. En quête de sensibilité immatérielle, il acquiert un monochrome bleu d’Yves Klein en 1957 à Milan. Les œuvres de Fontana sont aussi monochromes et fendues au cutter ou perforées, dans ce qu’il nomme ses Concetti spaziali (Concepts spatiaux) et ses Tagli (fentes). La déchirure est une ouverture sur le vide, un geste lyrique sur l’infini. L’œuvre de Fontana est une peinture du geste, de celui qui agresse la toile, qui la troue et la lacère, pour tenter de trouver un au-delà de la surface des choses : une béance immatérielle. De son vivant, sa démarche est restée incomprise. Aujourd’hui, les collectionneurs se disputent ses œuvres. Après l’effondrement du marché au début des années 90, voilà 10 ans que son ascension ne faillie pas : sa progression frôle les 330% depuis 1996.

Le prestigieux musée Guggenheim de New York rend hommage au maître du spatialisme jusqu’au 21 janvier 2007. Les américains sont sensibles au travail de Fontana dont le marché est essentiellement anglosaxon et italien. Les œuvres les plus signifiantes, les plus prisées et les plus onéreuses sont les fameux Concetti Spaziali.

Les Concepts spatiaux :Les Concetti spaziali de Fontana font la fierté des Parts One (vacations des œuvres les plus prestigieuses) de Sotheby’s et Christie’s. Le 16 octobre 2006, la maison Christie’s n’en dispersait pas moins de 14, dont quatre dépassèrent le million de dollars et dont un signait un nouveau record à 1,9 millions de £, soit plus de 2,8 millions d’€ ! Ces œuvres sont de grands formats sur toile (parfois de plus d’un mètre de côté), mais l’artiste a réalisé des concepts spatiaux de moindre dimension dont certains s’échangent pour moins de 100 000 € comme le Concetto spaziale, Attesa (62×55 cm) enlevé pour 75 000 € lors de la dispersion Farsetti du 27 mai 2006. Autour de 10 000 €, l’amateur peut espérer emporter un petit format d’une dizaine de centimètres à l’instar du joli Concetto spaziale sur aluminium rouge de 1965-66 dispersé par la maison Finarte (Rome) le 12 avril 2006, ou de l’œuvre sur feuille d’aluminium (11,5 x 9 cm) adjugée pour 11 500 € chez Cornette de Saint Cyr à Paris le 18 décembre dernier.Sur le même concept, Fontana a également réalisé des Teatrini, des petites scènes de théâtre en bois laqué qui se situent entre le tableau et la sculpture. Ces œuvres sont moins prisées et a format égal, les Teatrini sont moins cotés que ses œuvres sur toiles : comptez entre 100 000 et 300 000 € pour un Teatrino contre 200 000 à 1 million d’euros en moyenne pour une belle peinture lacérée.

L’œuvre céramique : L’artiste italo-argentin fut sculpteur avant d’être peintre et a pratiqué la céramique dès 1931. Dans ce registre, les premières œuvres ont oscillé entre abstraction et figuration expressionniste, avant d’adopter les préoccupations des peintures spatialistes. En octobre 2006, Sotheby’s adjugeait la céramique la plus chère de Fontana : d’une dimension hors norme (plus d’un mètre), Il guerrieroparti pour 270 000 £ (plus de 400 000 €, Londres). L’œuvre est historiquement incontournable car réalisée en 1949, soit l’année où l’artiste inaugurait ses premières performations. En 2004, un concept spatial en céramique était accessible pour 6 500 € à Milan (Sotheby’s, 23 novembre). Aujourd’hui, ce type de sujet change rarement de main pour moins de 10 000 €. Certaines céramiques colorées dont le travail d’espace et de matière est moins abouti que les Concetti, sont accessibles pour une moindre somme, comme la céramique peinte Battaglia qui signait une enchère à 4 000 € le 24 mai 2006 chez Sotheby’s à Milan.

Les lithographies :En règle générale, la plupart de ses estampes, parfois agrémentées de collages ou de déchirures, s’échangent entre 1 000 et 3 000 €. Cependant, les lithographies suivent la progression générale des prix de l’artiste, si bien qu’une composition géométrique tirée à 75 exemplaires et estimée à 1 000 € s’est envolée pour 8 000 € le 10 octobre 2006 chez Bloss en Allemagne. L’occasion d’obtenir l’une des plus belles signatures de l’art du XXème siècle est aussi soumise à surenchère sur les œuvres multiples.