À quels records s’attendre?

[31/01/2020]

Coup d’envoi des grandes ventes de l’année 2020  : Christie’s et Sotheby’s s’apprêtent à disperser 58 œuvres impressionnistes, modernes et surréalistes les 4 et 5 février à Londres. Faut-il attendre de nouveaux records pour ces ventes de prestige, alliant les meilleures signatures du 19ème siècle et du début du 20ème ? Nous avons éplucher pour vous les catalogues afin d’étudier les œuvres susceptibles de passer des caps important dans l’histoire des enchères. Quatre ont retenu notre attention, sous les signatures de George Grosz, Tamara de Lempicka, Jean Metzinger et Pyke Koch.

George GROSZRoute Dangereuse (1918)

Estimée entre entre 6 et 8,6m$ chez Christies le 5 février – Record actuel de l’artiste : 2m$ en 1996 (Wildwest, 1916)

Avec Route Dangereuse, George Grosz a produit une peinture totalement moderne, une fusion visionnaire de la ferveur expressionniste et de la fragmentation cubo-futuriste. Rare et historiquement marquante, elle a les qualités d’un record à coup sûr.

Un œuvre historiquement forte : Berlin, la nuit, 1917. Route dangereuse dépeint l’époque apocalyptique et décadente de la Première Guerre mondiale dans les rues de Berlin. L’oeuvre fait partie d’une série représentant Berlin la nuit – considérée comme l’une de plus belles séries de Grosz – réalisée entre le printemps 1917 et la fin de la guerre en novembre 1918. La plupart des toiles de Berlin la nuit (une vingtaine) ayant été perdues ou détruites, celle proposée par Christie’s d’autant plus désirable que c’est une rareté.

Tamara DE LEMPICKAPortrait de Marjorie Ferry (1932)

Estimée entre 10,5 et 16 m$ chez Christies le 5 février – Record actuel de l’artiste : 13,4 m$ en novembre dernier

Les belles toiles de Tamara de Lempicka ne sont pas faciles à dénicher. Mais Sotheby’s vendait, en novembre dernier, une pièce maîtresse au prix record de 13,4m$ (La tunique rose, 1927). Preuve de l’appétit sur cette signature, l’oeuvre doublait allégrement son estimation basse. C’est donc le bon moment pour soumettre une autre œuvre importante sur le marché. Présenté le 5 février chez Christie’s, le Portrait de Marjorie Ferry pourrait s’envoler plus haut que La tunique rose, selon une estimation haute de 16 m$. Si l’oeuvre atteint ce prix, le vendeur pourra se féliciter d’une plus-value de plus de 10 millions de dollars. Ce Portrait de Marjorie Ferry est en effet dans la même collection depuis 10 ans. Il l’avait acheté en mai 2009 chez Sotheby’s pour un peu moins de 5m$.

Le Portrait de Marjorie Ferry peut décrocher un record tant il est emblématique et sensuel. Daté de 1932, ce portrait est réalisé au sommet de la gloire de Lempicka, portraitiste la plus demandée de l’époque par les riches Européens et Américains. Elle peint ici Marjorie Ferry (à la demande de son riche époux), une chanteuse de cabaret anglaise se produisant à Paris. Le modèle est prétexte à une œuvre d’une grande sensualité – nudité drapée de satin, blondeur du modèle, courbes des lignes, abandon du geste, détermination du regard… – typique de l’hédonisme des années 30′ et du style singulier qui a fait la gloire de Lempicka.

Jean METZINGER – Le Cycliste (1912)

Estimée entre 2 et 2,6m$ chez Sotheby’s le 4 février – Record actuel de l’artiste : 2,4 m$ en 2007 (Paysage, c.1916-1917)

Parfaitement datée, excécutée et d’un sujet typique, Le Cycliste a toute les chances d’établir un nouveau record pour Metzinger. Son estimation haute de 2,6m$ le donne d’ailleurs gagnant face au Paysage détenant le record actuel de l’artiste. Le Cycliste est l’une des trois peintures de ce sujet réalisées par Metzinger en 1912, une année clef dans l’histoire du cubisme, puisque Metzinger et Albert Gleizes publient, cette même année, le premier texte majeur sur le mouvement, Du Cubisme.

Un bel exemple de la Modernité : en décomposant la forme pour traduire la vitesse, Metzinger se rapproche du premier précepte futuriste annoncé dans le manifeste de Filippo Tommaso Marinetti en 1909 : “Nous déclarons que la splendeur du monde s’est enrichie d’une nouvelle beauté: la beauté de la vitesse.” Le Cycliste est une œuvre cubo-futurisme, fusionnant les recherches des deux avants-garde, le cubisme et le futurisme. Or, cette fusion opère à merveille dans ce tableau, représentant l’un des sujets favoris de Metzinger, le cycliste. Le cycliste est un sujet si emblématique de l’aboutissement de l’oeuvre de Metzinger que la Collection Peggy Guggenheim de Venise lui a d’ailleurs dédié une exposition : Cyclisme, cubo-futurisme et la quatrième dimension: Jean Metzinger sur la piste cyclable (2012).

Pyke KOCHFlorentine Garden (1938)

Estimée entre 263 000 $ – 394 000$ – Sotheby’s le 4 février – Record actuel de l’artiste : 533 000 $ en 2016 (Rustende schoorsteenveger, 1936)

Le peintre néerlandais Pyke Koch était animé d’un tel désir de perfection qu’il travaillait lentement et qu’il a délibérément détruit une grande partie de sa production. Il nous reste aujourd’hui quelques 120 peintures et 80 dessins, dont beaucoup résident dans des collections importantes aux Pays-Bas. La singularité et la rareté de cet artiste constituent donc des atouts en or pour atteindre un joli score le 4 février chez Sotheby’s. Première toile mise aux enchères depuis le record de Pyke Koch en 2016, Le Jardin florentin peut faire la surprise en outrepassant les prévisions.

Pour devenir la plus belle adjudication de Pyke Koch, il faudrait que l’étrange beauté de ce Jardin florentin crée un petit emballement et que la toile excède son estimation haute (394 000$). Ce ne serait pas la première fois qu’une toile de Pyke Koch ferait la surprise, puisque celle qui détient l’actuel record du peintre doublait les prévisions les plus optimistes en 2016, pour atteindre 533 000$. Il se trouve que la toile présenter par Sotheby’s a plusieurs atouts : elle est de belles dimensions (62,5 x 77,5 cm), elle est plus grande que la toile détenant l’actuel record, elle a été exposée à la XXIe Biennale de Venise en 1938 et, enfin, elle est restée dans la même collection pendant 30 ans.

Résultats des ventes la semaine prochaine !