Les Russes de la première Ecole de Paris

[25/02/2008]

 

Au début du XXème siècle, Paris est une capitale de l’art et son rayonnement aimante les artistes venus d’Europe et de l’Est. On les regroupe sous l’appellation de Première Ecole de Paris. La capitale française séduit notamment de nombreux artistes russes entre 1900 et 1920 qui se concentrent dans le quartier de Montparnasse, lieu d’une véritable émulation créatrice.

Arrivé à Paris en 1910, Marc CHAGALL développe un art indépendant nourri par sa culture juive et séduit un large panel de collectionneurs : Etats-Unis et Royaume-Uni dégagent près de 80% du chiffre d’affaires en ventes publiques, France et Suisse se partagent 20% du marché. En 1990, le succès de Chagall est planétaire avec 24 toiles millionnaires en salles sur l’année dont un record de 13,5 millions de dollars pour une toile de 1923 intitulée Anniversaire, lors d’une vacation new-yorkaise de Sotheby’s. Suite à la crise du marché de l’art du début des années 90, aucune œuvre de Chagall ne fut adjugée au-delà des 10 millions de dollars pendant les douze années qui suivirent ce sommet.
Depuis 2002, il renoue avec les succès d’antan, fleurtant même avec son ancien record en mai 2007 grâce aux 12,25 millions de dollars décrochés par Le Grand cirque, une technique mixte de plus de trois mètres d’envergure (Sotheby’s NY). Ce regain de confiance entraîne dans le sillage de Chagall des artistes comme Chaim Soutine et Alexander Archipenko.

On assiste en effet à une explosion du produit des ventes de Chaïm SOUTINE depuis 2001. Sur les six dernières années, la vente de ses œuvres a généré pas moins de 24 adjudications millionnaires et il a atteint des sommets en 2006 et 2007. En 2006 à Londres, son Bœuf écorché de 1924 décrochait 7 millions de livres chez Christie’s, soit plus de 12 millions de dollars. L’année suivante, L’homme au foulard rouge signait son record à hauteur de 7,8 millions de livres chez Sotheby’s alors que Christie’s adjugeait cette toile l’équivalent de 1,4 million de livres en 1997. Ces succès n’engendrent pas de frénésie spéculative et les ventes londoniennes du début du mois de février 2008 ont illustré l’exigence des collectionneurs: seule une toile trouvait preneur sur les huit soumises à enchères. Intitulée Les Platanes à Céret, la toile fut vendue pour 550 000 livres au marteau chez Christie’s tandis que le même sujet plus abouti était adjugé 780 000 livres en juin dernier chez Sotheby’s.

Alexander ARCHIPENKO a aussi le vent en poupe avec une première adjudication millionnaire signée en juin 2005 pour Woman. Cette toile, dans la veine cubiste, décrocha 1,3 millions de livres, près de 2 millions d’euros, chez Christie’s. Les toiles cubistes d’Archipenko sont si rares en ventes que les petits formats (une trentaine de centimètres) s’arrachent aisément plus de 500 000 dollars. Par contre, des œuvres postérieures aux années 20 sont accessibles entre 20 000 et 150 000 dollars.
Dans cette même fourchette de prix, il est plus facile d’acquérir une sculpture en bronze, dont la production est plus dense : une ou deux toiles sont proposées chaque année aux enchères contre une vingtaine de sculptures. Lors des vacations londoniennes de février 2008 par exemple, un corps de femme en bronze sur socle de marbre de 1914, Flat Torso, partit pour 65 000 livres, environ 130 000 dollars (Sotheby’s).

Les ventes anglosaxonnes proposent les pièces majeures des artistes les plus cotés comme Chagall, Soutine ou Gontcharova. Cependant, la France demeure un grenier d’œuvres pour tout amateur de cette première Ecole de Paris. On y trouve la plupart des sculptures d’Ossip ZADKINE, de nombreuses toiles de Nathalie GONTCHAROVA et surtout la grande majorité des travaux de Léopold SURVAGE (90% des transactions) et de Serge CHARCHOUNE (87% des transactions).
Charchoune (Sarsun), par exemple, a progressé de plus de 350% sur dix ans (entre 1997 et 2007). Accessible en salle autour de 5 000 euros pour des petits formats et entre 10 000 et 50 000 euros pour des œuvres abouties, il demeure rare dans les vacations anglo-saxonnes.