Le Top du Lion d’Or

[05/05/2017]

Le vendredi, c’est Top ! Un vendredi sur deux, Artprice vous propose un classement d’adjudications par thème. Dans le cadre de l’ouverture de la Biennale de Venise, le classement de la semaine dévoile les meilleures adjudications mondiales des 10 derniers artistes récipiendaires du fameux Lion d’Or…

Rang Artiste Adjudication ($) œuvre Vente
1 STURTEVANT (1930-2014) 5 093 000$ “Warhol Diptych” Christie’s New York 13/05/2015
2 John BALDESSARI (1931) 4 408 000$ Quality Material Christie’s New York 16/05/2007
3 Michelangelo PISTOLETTO (1933) 3 960 559$ “Amanti (Lovers)” Christie’s Londres 01/07/2014
4 El ANATSUI (1944) 1 445 000$ Paths to the Okro Farm Sotheby’s New York 15/05/2014
5 Barbara KRUGER (1945) 902 500$ Untitled (When I hear the word culture I take out my checkbook) Christie’s NY 08/11/2011
6 Franz WEST (1947-2012) 720 838$ Larvae Phillips de Pury & Company Londres 29/06/2008
7 Carol RAMA (1918-2015) 288 882$ “Arcadia (Ti Amo… Ti Amo)” Sotheby’s Londres 08/03/2017
8 Carolee SCHNEEMANN (1939) 185 000$ Eye Body: 36 Transformative Actions Christie’s New York 12/05/2015
9 Yoko ONO (1933) 116 500$ Play It By Trust Sotheby’s NY 13/05/2010
10 Malick SIDIBÉ (1936-2016) 25 753$ “Combat des amis avec pierres” Artcurial Paris 24/10/2010
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La Biennale de Venise s’est tenue pour la première fois en 1895 en tant qu'”Exposition Internationale d’Art de la Cité de Venise”. Cette grand-messe de l’art contemporain fête cette année sa 57e édition du 13 mai au 26 novembre 2017, sous le commissariat de la Conservatrice en chef du Centre Pompidou Christine Macel, autour de 84 pays et leurs pavillons nationaux. Chaque édition apporte son lots de découvertes et d’honneurs, la Biennale offrant un Lion à plusieurs artistes lors de chaque édition, un prix qui s’avère bien souvent être un véritable tremplin pour les plus jeunes en quête de reconnaissance et de visibilité. Parmi ces « lions » si convoités, un (voire deux) Lion(s) d’Or récompense tous les deux ans l’ensemble de la carrière d’un artiste, certains déjà célèbres et très cotés, d’autres moins. Le gagnant de l’année est une gagnante : l’américaine Carolee SCHNEEMANN qui consacra toute sa vie à la question de la féminité au sein des sphères artistique et sociale. Son Lion d’or permet, par un heureux clin-d’oeil, d’établir une parité homme-femme dans le classement d’adjudications suivant.

D’autres artistes femmes américaines furent honorées du lion d’Or avant Carole Schneeman : Barbara Kruger en 2005, Yoko Ono en 2009 (la même année que l’artiste conceptuel Américain John Baldessari), Elaine Sturtevant en 2011 (la même année que l’artiste l’Autrichien Franz West). En prenant un peu de recul, on constate que l’obtention d’un Lion d’or peut contribuer à modifier en profondeur la demande et avoir des répercutions à plus ou moins long-terme sur le marché des enchères. Chez Barbara KRUGER notamment, puisque l’on constate qu’entre l’obtention de cette récompense et un record d’enchère établi en 2011, l’indice de ses prix affiche une ascension remarquable de plus de 444%. Nul doute que les vendeurs ont grandement bénéficié du graal vénitien pour revendre leurs œuvres au meilleur moment. L’indice est retombé depuis et la cote s’est stabilisée. Même constat avec Yoko ONO, dont le record d’adjudication fut établi l’année suivant l’obtention de son prix. Dans ce cas particulier, l’effet Lion d’Or a opéré pour dynamiser un marché peu alimenté en œuvres plastiques, Yoko Ono étant plus célèbre pour produire des événements (performances) que des œuvres matérielles…

La cinquième femme du classement est l’Italienne Carol RAMA, récipiendaire du Lion d’or en 2003, au même titre que son compatriote Michelangelo Pistoletto. Si Pistoletto s’avérait déjà être reconnu comme une figure majeure de l’histoire de l’art et du marché à la réception de son prix, Carol Rama ne bénéficiait pas d’une telle configuration. Demeurée trop longtemps discrète, Carol Rama a véritablement bénéficié de l’aura du Lion d’Or dans les années suivant son obtention : au soutien de galeries tels que Repetto à Londres et Maccarone à New York s’est adjoint celui de grandes institutions culturelles, dont le Musée d’Art moderne de la Ville de Paris qui lui dédiait sa première rétrospective française en 2015, année de sa disparition. Le marché des enchères fut plus long a digéré cet éveil. Les choses se sont mises en place en 2015 pour préparer une année explosive en 2016 (meilleur chiffre d’affaires annuel de sa carrière avec 626 000$) et surtout, un record absolu tombé le 8 mars 2017 chez Sotheby’s à Londres, pour une sculpture (“Arcadia (Ti Amo… Ti Amo)”) doublant largement son estimation optimiste pour s’envoler à près de 289 000$. Le Lion d’Or pour l’ensemble d’une carrière à ceci de plus vertueux que le marché des enchères : il récompense systématiquement les artistes de leur vivant…

Notons par ailleurs que deux artistes africains furent honorés ces dernières années par un Lion d’or : le Ghanéen El Anatsui en 2015 et, avant lui, le photographe malien Malick SIDIBÉ (1936-2016), qui fut le premier artiste Africain à recevoir le prix international de la Fondation Hasselblad en 2003, puis le premier africain honoré d’un Lion d’or en 2007 pour l’ensemble de son oeuvre. Découverte aux premières Rencontres de la Photographie africaine de Bamako en 1994, la photographie de Malick Sidibé fut portée par le grand spécialiste de l’art contemporain africain André Magnin (qui lui consacre une biographie en 1998 et expose toujours ses oeuvres). Aujourd’hui, son travail est aussi soutenu à New York chez Jack Shainman Gallery ou à Bruxelles chez Nathalie Obadia, et ses œuvres ont été consacrées auprès du grand public par des expositions à la Fondation Cartier à Paris, au musée Guggenheim à New-York ou à la National Portrait Gallery de Londres. Le Lion d’or de Sidibé marque un tournant dans la position de l’Afrique en tant que vivier d’artistes reconnus par l’ensemble des acteurs culturels internationaux. Par ailleurs, ce prix a inauguré une accélération immédiate des transactions, le produit de ventes annuels de ses œuvres vendues aux enchères passant de 5000 $ à 44 000$ entre 2006 et 2007. Aujourd’hui, Malick Sidibé clôt le classement avec un record de 25 753 $, bien loin derrière les 5,093m$ décrochés par l’appropriationiste américaine STURTEVANT (1930-2014). D’un marché à l’autre, l’amplitude des cotes paraît bien difficile à combler…