Le Top des artistes Français vendus aux Etats-Unis

[25/05/2018]

Le vendredi, c’est Top ! Un vendredi sur deux, Artprice vous propose un classement d’adjudications par thème. Cette semaine, observons la réception de l’art contemporain français outre-atlantique.

Entre la fin du XIXème siècle et la première moitié du XXème siècle, le mythe de l’artiste moderne et de toutes les avants-garde s’est construit sur le formidable terreau créatif du territoire français. Encore de nos jours, les artistes de cette période de l’histoire se positionnent comme les plus cotés sur le marché international, notamment dans les grandes salles de ventes américaines. Les exceptionnels résultats des dernières ventes de prestige du mois de mai témoignent, une fois de plus, de l’importance de l’ancrage et de la formidable valorisation des artistes impressionnistes et modernes qui travaillèrent en France à l’heure ou celle-ci s’imposait, aux yeux du monde entier, comme le premier territoire de liberté et de stimulation créatrices. Rappelons en effet qu’en quelques jours, pendant les grandes sessions de ventes de mai, un Nu couché de Modigliani s’est vendu 157 m$, la Fillette à la corbeille fleurie de Picasso est partie pour 115m$, et que d’autres grands maîtres de la modernité, tels que Henri Matisse et Claude Monet, ont emporté leurs nouveaux records absolus.

Si le territoire français a perdu le formidable pouvoir d’attraction dont il avait bénéficié avant la seconde-guerre mondiale, il n’en est, pas moins que tout autre pays, une source intarissable de talents, d’individualités fortes et de chemins artistiques singuliers. Il semble pourtant que ces artistes peinent à s’imposer en-dehors de leur territoire, notamment sur le terrain des enchères américaines.

Certes, de rares artistes français vivants – tels que Daniel Buren, Pierre Soulages ou encore Bernard Venet – ont aujourd’hui percé dans les grandes salles de ventes. Ceux-ci sont collectionnés à de forts niveaux de prix, en France comme aux Etats-Unis. Mais qu’en est-il de la génération suivante ? Celle des artistes nés après 1950…

Rang Artiste Adjudication ($) Produit de ventes US 2017 Lots vendus
1 Laurence JENKELL (1965) 337 500$ 425000 2
2 MR BRAINWASH (1966) 97 500$ 193445 27
3 INVADER (1969) 53 125$ 152200 6
4 Bernard FRIZE (1954) 47 500$ 119610 4
5 Cyprien GAILLARD (1980) 75 000$ 95000 2
6 André DUBREUIL (1951) 52 500$ 85000 3
7 Philippe PASQUA (1965) 35 000$ 35000 1
8 Vicky COLOMBET (1953) 31 250$ 34275 2
9 Valérie BELIN (1964) 22 500$ 22500 1
10 Sophie CALLE (1953) 16 250$ 16250 1
copyright © 2018 artprice.com

Quels artistes contemporains trouvent un écho favorable US ?

Le classement de la semaine se concentre sur les 10 meilleures enchères obtenues pour des artistes contemporains français au cours de l’année 2017. Et les résultats révélés peuvent paraître incongrus en regard de la notoriété des artistes concernés… Le travail néo-pop de Laurence Jenkell parvient en effet à séduire les collectionneurs américains à plus de 300 000 $. Son bonbon géant en aluminium Polimiroir (sur 8 exemplaires) se trouvait être l’objet du désir de plusieurs amateurs lors d’une vacation de Sotheby’s organisée en novembre dernier ; si bien que le résultat obtenu pour sa rutilante sculpture excède très largement les résultats d’artistes dont la reconnaissance institutionnelle n’est plus à démontrer, des artistes tels que Xavier Veilhan (ayant représenté la France à la dernière Biennale de Venise), Cyprien GAILLARD (distingué par le Prix Marcel Duchamp en 2010) ou encore Sophie CALLE, dont les expériences artistiques et existentialistes font l’unanimité (ou presque).

Il faut cependant considérer ces résultats de 2017 avec réserve, ceux-ci ne reflétant qu’une petite partie de l’iceberg. Afin d’avoir une meilleure appréciation de la réalité du marché des grands artistes contemporains français, considérons leurs résultats de façon élargie. On s’aperçoit alors que la moitié des recettes générées par la vente des oeuvres de Sophie Calle, par exemple, provient justement des Etats-Unis (entre 2008 et 2018). L’oeuvre de cette artiste est donc appréciée par les américains, d’autant que son record d’enchère – emporté pour 218 500 $ en 2011 (The Sleepers (Les dormeurs) – provient de New York (Christie’s).

Ainsi, le classement de la semaine révèle moins le manque de valorisation des artistes français sur le marché américain (on connait néanmoins la sous-valorisation des « stars » contemporaines de l’art français face à celles de l’art américain), que le manque d’un flux plus constant d’œuvres hautement qualitatives des artistes français dans les salles de ventes américaines…

Difficile en effet de stimuler la demande si les œuvres ne sont pas au rendez-vous en salles. Les acteurs français du marché de l’art rechignent peut-être, pour la plupart, à ”jouer” avec le monde des enchères, contrairement aux Américains, plus décomplexés dans leur relation art et argent…