LE TOP DES ANNÉES 1900

[06/06/2014]

 

Le vendredi, c’est Top ! Un vendredi sur deux, Artprice vous propose un classement d’adjudications par thème. Cette semaine : les dix meilleures enchères pour des oeuvres réalisées dans les années 1900.

Le Top des Années 1900
Rang Artiste Adjudication Oeuvre Vente
1 Pablo PICASSO 93 000 000$ Garçon à la pipe (1905) 05/05/2004 (Sotheby’s NEW YORK NY)
2 Pablo PICASSO 50 000 000$ Femme aux bras croisés (1901-1902) 08/11/2000 (Christie’s NEW YORK NY)
3 Pablo PICASSO 48 231 510$ Les noces de Pierrette (1905) 30/11/1989 (Binoche-Godeau PARIS)
4 Pablo PICASSO 45 814 900$ Portrait d’Angel Fernandez de Soto (1903) 23/06/2010 (Christie’s LONDON)
5 Claude MONET 39 000 000$ Nymphéas (1905) 07/11/2012 (Christie’s NEW YORK NY)
6 Gustav KLIMT 36 000 000$ Birch Forest (1903) 08/11/2006 (Christie’s NEW YORK NY)
7 Pablo PICASSO 34 025 720$ Au Lapin Agile (1905) 15/11/1989 (Sotheby’s NEW YORK NY)
8 Claude MONET 32 696 400$ Nymphéas (1904) 19/06/2007 (Sotheby’s LONDON)
9 Claude MONET 31 627 200$ Waterloo Bridge, temps couvert (1904) 18/06/2007 (Christie’s LONDON)
10 Claude MONET 30 054 600$ Bassin aux nymphéas et sentier au bord de l’eau (1900) 30/06/1998 (Sotheby’s LONDON)

 

Changement de millénaire, épanouissement de l’homme moderne, grande époque d’un art Nouveau, ornemental, sensuel, joyeux, et bouillonnement avant-gardiste en Europe d’où émerge les plus grands courants artistiques, la vitalité créative des années 1900 est sans précédent. C’est l’époque du Post-impressionnisme (1885-1905), du Fauvisme (1905-1910 avec Matisse, Marquet, Van Dongen, Braque, Derain, Friesz et Vlaminck), de l’Art Naïf (Henri Rousseau), du Cubisme analytique (dont la période la plus féconde du se situe entre 1907 et 1912 avec Braque et Picasso), de l’Expressionnisme (le groupe Die Brücle est fondé en 1905 par Ernst Ludwig Kirchner, Fritz Bleyl, Erich Heckel et Karl Schmidt-Rottluff à Dresde), du Futurisme (1904-1920, dont l’énergie de la vitesse s’exprime à travers Giacomo Balla, Umberto Boccioni, Gino Severini, Luigi Russolo), et des pionniers de l’art abstrait Wassily Kandinsky, Frantisek Kupka, Kasimir Malevitch et Piet Mondrian.

Malgré la pléthore d’artistes incontournables dont s’enorgueillissent les plus grands musées de la planète, seuls trois noms émergent dans ce classement où le ticket d’entrée affiche 30 m$ : Pablo PICASSO tient à lui seul la moitié du Top, suivi par Claude MONET avec quatre places et Gustav KLIMT.

Une fois encore, le grand gagnant est Pablo Picasso, notamment grâce au Garçon à la pipe (1904), une oeuvre charnière entre les périodes bleue et rose réalisée lorsqu’il avait vingt-quatre ans. En 2004, le Garçon à la pipe défraye la chronique en décrochant 104 m$ (93 m$ hors frais), devenant l’oeuvre d’art la plus chère du monde à l’époque et la première de l’histoire à passer le seuil des 100 m$ en salles (frais inclus). Le jeune Garçon à la pipe avait intégré la collection Whitney en 1950 pour 30 000 $ et sa revente en 2004 permettait de battre alors une oeuvre de Van Gogh, le Portrait du Docteur Gachet qui avait atteint 82,5 m$ frais inclus en 1990. A l’issue de l’année 2004, Picasso affichait 241 millions de $ de chiffre d’affaires (soit trois fois plus qu’en 2003) et son marché représentait à lui seul 6,7% du produit de vente mondial de Fine Art.
L’année 1905, est importante chez Picasso, pas seulement pour le Garçon à la pipe. C’est l’année de son installation à Paris, au Bateau-Lavoir. Il prépare une première exposition parisienne, rencontre sa première compagne Fernande Olivier et ses mécènes américains Gertrude et Léo Stein. Une seconde toile réalisée en 1905 est présente au classement : Au Lapin agile convoque le célèbre café de la butte Montmartre ou se retrouve les artistes Max Jacob, André Derain, Guillaume Apollinaire, Georges Braque, Maurice Utrillo, Amedeo Modigliani et bien sûr Pablo Picasso. L’artiste offrit la toile à Frédé, le maître des lieux, lequel en toucha 1 000 francs en 1912. En 1989, la scène de café Au Lapin agile est vendue l’équivalent de 34 m$… L’oeuvre est aujourd’hui exposée au Metropolitan museum of art de New York.
Les trois autres toiles de Picasso du classement sont des raretés de la période Bleue. La plus célèbre, Les Noces de Pierrette, renvoie à la frénésie acheteuse des magnas japonais à la fin des années 80. Les Noces sont en effet payées plus de 48 m$ en 1989 par un banquier d’affaires japonais, Tomonori Tsurumaki. La société de Tsurumaki, Nippon Tri-Trust, s’effondre peu après et l’oeuvre atterrit dans la société Hazama avant d’être proposée comme garantie d’un prêt accordé par la société de crédit Lake. Les Noces de Pierrette deviennent ensuite possession de GE Capital et ne sont pas visibles aujourd’hui, car conservées dans un coffre.

Deuxième artiste phare de ce classement, Claude Monet affiche ici quatre de ses six records d’enchères. Le chef de file de l’impressionnisme est convoité au plus haut niveau pour les Nymphéas, son sujet le plus coté aux enchères. Près de la moitié de ses adjudications dépassant les 10 m$ récompensent ce thème aquatique et floral. Son record d’enchères grimpe à 71,8 m$ (80 m$ frais inclus) pour Le Bassin aux nymphéas, une œuvre de 1919 vendue en juin 2008. Sa toile du début des années 1900 la plus chère représentent des Nymphéas de 1905, vendus 39 m$ (43,7 m$ frais inclus) en 2012 après avoir passé 33 ans dans la même collection. Il s’agit du deuxième meilleur résultat de l’artiste aux enchères, toutes périodes confondues.

Le troisième artiste au podium est Gustav Klimt, avec Birch Forest (1903), une toile adjugée 36 m$, soit 40,3 m$ frais inclus. Birch Forest faisait partie d’une vente d’exception le 8 novembre 2006 chez Christie’s, qui présentait quatre toiles majeures de l’artiste. L’occasion est rare car le marché est sous-alimenté, mais ces tableaux, confisqués par les nazis à la famille Bloch-Bauer, avait été récemment restitués par l’Autriche à l’héritière des propriétaires. Les quatre toiles ont rapporté quelque 192 m$ (hors frais), avec une enchère haute de 78,5 m$ (87,9 m$ avec frais) pour Portrait d’Adele Bloch-Bauer II, datée de 1912. Fruit de ces exceptionnels résultats, la cote de Gustave Klimt progressait de +46% en 2006.

Improbable chef-d’oeuvre de Klimt, Nymphéas de Monet à la lisière de l’impressionnisme et de l’art abstrait, mythiques périodes Rose et Bleue de Picasso, ce Top de 1900 trie les trésors modernes sur le volet à des niveaux de prix qui n’ont rien de déraisonnable compte tenue de la santé du marché (même Jeff Koons affiche trois résultats à plus de 30 m$!).
Contrairement aux précédents classements, tous les résultats ne datent pas des années 2000. Deux d’entre eux nous ramènent en 1989, époque d’une bulle spéculative sans précédent (entre 1987 et 1990) sur le marché de l’art, qui portait les artistes modernes à des prix alors inédits. Moteur de cette envolée des prix à l’époque, les Japonais sont omniprésents dans les salles de ventes de New York, Londres, Paris, et Tokyo et auraient acheté dans la seule année 1989 près de 2 milliards de dollars d’œuvres d’art. Aujourd’hui, les plus grands acheteurs sont américains, chinois, européens et du Moyen-Orient.