Le Nouveau Réalisme

[09/04/2007]

 

Le Nouveau réalisme est à l’honneur cette année : suite à l’hommage rendu à Yves Klein au musée Georges Pompidou jusqu’en février dernier, tout le mouvement fait l’objet d’une exposition aux Grand Palais de Paris jusqu’au 2 juillet 2007. La cote des Nouveaux Réalistes a progressé de plus de +120% depuis 2000. Toutefois, les productions de ces artistes sont encore valorisées à 30% en dessous des niveaux de prix atteints en 1989-1990.

Le groupe des Nouveaux Réalistes émerge en France autour d’une déclaration rédigée en 1960 par le critique Pierre Restany chez Yves KLEIN. Conscients de leur « singularité collective », les nouveaux réalistes recyclent des objets industriels : CÉSAR les compresse, Fernandez ARMAN les casse ou les accumule, Daniel SPOERRI les fige en Tableaux-pièges, Jean TINGUELY les mécanise, Klein les transcende via la couleur, Raymond HAINS, Jacques VILLEGLÉ et Mimmo ROTELLA les déchirent… opérant une vision poétique de la réalité quotidienne.

Yves Klein a marqué l’histoire de l’art par la profondeur de son bleu IKB (International Klein Blue). Les Etats-Unis et le Royaume-Uni soutiennent activement l’artiste français et réalisent 80% du produit des ventes contre 9% sur l’hexagone. L’œuvre Yves Klein, est la plus appréciée du groupe et a dépassé le seuil du million de dollars à 20 reprises dont 7 fois en 2006 !
Son record date de novembre 2000 avec RE1 qui a décroché 6,1 millions de dollars chez Christie’s New York. Aujourd’hui, il faut compter entre 50 000 et 80 000 € en moyenne pour un monochrome de 20 cm de côté, mais les amateurs se disputent âprement les pièces, comme le 10 mai 2006 chez Christie’s NY ou Ikb (21,2 x 17,7cm) doublait son estimation haute pour partir à 140 000 $ (110 138 €). Ses Anthropométries, où les corps de femmes imprégnés du fameux pigment sont utilisés comme pinceaux, sont également très prisées. Le 8 février 2007, la maison Christie’s dispersait une Anthropométrie de 65×50 cm à Londres qui fut adjugée pour 240 000 £ (364 000 €). Les anthropométries de plus d’un mètre de coté peuvent dépasser les 500 000 £ comme la veille chez Sotheby’s Londres ou Ant 69 (109 x 69 cm) partait pour 550 000£ (834 000 €). Les amis Nouveaux Réalistes de Klein, tels qu’Arman et César, détournaient des objets de consommation courante dans leurs œuvres. Le « gardien du bleu » s’est aussi prêté à l’exercice en revisitant des reproductions de sculptures emblématiques telles que le fameux Esclave de Michel-Ange (300 exemplaires). En 2000, un Esclave était accessible pour moins de 20 000 € (vente de Briest à Paris, le 27 octobre 2000). Il faut compter aujourd’hui entre 40 000 et 50 000 € pour la même œuvre.
Des éditions post-mortem comme les tables basses en Plexiglas renfermant du pigment bleu, rose ou encore des feuilles d’or, s’échangent actuellement entre 15 000 et 25 000 €. En 1997, une table bleue de la même série était accessible autour de 5 000 €… A l’heure actuelle, pour un budget avoisinant les 5 000 €, l’amateur peut espérer emporter de petites pièces telle qu’un Carton d’invitation bleu affranchi avec le timbre bleu de 1957 ou de 1959. L’un de ses cartons d’invitation était adjugé pour 4 800 € le 25 novembre 2005 à Paris (P.Bergé-Buffetaud-Godeau-Chambre-De Nicolay).

Avec 400 à 500 pièces proposées annuellement aux enchères, l’artiste niçois Arman est le sculpteur contemporain français le plus représenté en salles des ventes. Dans les années 60´, il réalise ses « colères » et ses « coupes » : objets brisés, sectionnés en tranches ou encore brûlés. A la fin des années 70´, Arman s’inspire de ses anciennes séries pour des sculptures en bronze, qui s’échangent aujourd’hui entre 1 000 et 10 000 € en moyenne. Face à la pléthore de ces tirages sur le marché, 50% des œuvres demeurent accessibles et trouvent acquéreurs pour moins de 3 000 €. En parallèle, les pièces historiques peuvent décrocher plus de 100 000 € : entre 2005 et 2006, 12 sculptures ont dépassé ce seuil, deux fois plus que sur les 15 années précédentes ! Depuis son décès en octobre 2005, la demande s’est particulièrement intensifiée pour les pièces anciennes, si bien que la boîte de sardines Full Up, tirée à 500 exemplaires, ayant fait office d’invitation à la galerie Iris Clert en 1960, est partie pour 3 100 € chez Leclere à Marseille le3 mars 2007. Cette pièce s’était vendue l’équivalent de 680 € en 2001. Autre exemple de cette inflation : une version de Poubelle, contenant une accumulation de papiers et détritus, éditée à 100 exemplaires en 1964 se vendait 1200 € chez Calmels-Chambre-Cohen. En mars 2006, chez Cornette de Saint-Cyr, les amateurs se la sont arrachée à 4 700 €. Le marché d’Arman est dynamique en France avec 53 % du produit des ventes réalisé sur l’hexagone mais l’artiste est aussi très apprécié par les collectionneurs anglo-saxons (23% du produit des ventes réalisé aux Etats-Unis et aux Royaume-Uni) et italiens (14% du produit des ventes).
César est l’un des artistes les plus populaires en France mais il est aussi représenté par les grandes maisons de ventes anglo-saxonnes. Ses bronzes de grandes dimensions (de plus d’1 mètre à 3 mètres) s’échangent entre 100 000 et 250 000 € en moyenne comme Fanny Fanny (233×245,1×121,9 cm) réalisée en 1990 qui fut emportée pour 240 000 £ (plus de 187 000 €) le 16 novembre 2006 chez Christie’s NY. Comptez désormais 20 000 – 30 000 € pour une poule en bronze signée César de 20 à 30 cm de haut. Il est difficile de trouver des sculptures de l’artiste à moins de 2 000 € : ses petites compressions de 6 cm de haut réalisées à partir de capsules de bouteilles s’échangent aujourd’hui entre 2 500 et 3 000 €, contre à peine 1 000 € à la fin des années 1990.

Deux artistes suisses comptent aussi parmi les nouveaux réalistes sculpteurs : il s’agit de Jean Tinguely et de Daniel Spoerri. Le marché de Jean Tinguely est international avec 39% des transactions réalisées au Royaume-Uni et 61% en Suisse et en Europe. Malgré cette visibilité élargie, sa cote n’est pas au beau fixe et reste encore légèrement dévaluée par rapport à 1997. Ses œuvres paraissent abordables avec 80% d’adjudications inférieures à 5 000 € mais il est nécessaire de préciser que 70% des lots concernent des estampes et des dessins tandis que la majorité de son produit des ventes est dégagé par ses sculptures mécanisées qui engendrent 74% du produit des ventes.
Daniel Spoerri a vu sa cote doubler entre 2004 et 2006. Ses Tableaux-pièges, qui piègent le réel en figeant des reliefs de repas, sont ses pièces les plus recherchées et s’échangent entre 15 000 et 40 000 €. L’univers plus ludique de Niki de Saint-Phalle, qui a gagné sa notoriété avec la série des Nanas (figures féminines épanouies et hautes en couleurs) séduit les collectionneurs de toutes nationalités. En effet, 17% du produit des ventes est réalisé aux Etats-Unis. Niki renoue avec sa cote de 1990, au pic de la bulle spéculative : à l’époque une Nana assise de 1968 (77x73x81 cm ) était adjugée moins de 100 000 £ (autour de 130 000 €). La même œuvre dispersée en décembre 2006 chez Sotheby’s Paris a trouvé preneur à 180 000 €.

Suite à sa disparition, Raymond Hains a connu la plus forte hausse des prix du groupe depuis 2005 : +260% ! Ses affiches lacérées des années 60’ font l’objet de toutes les convoitises. Il faut désormais compter 30 000 – 40 000 € pour un format d’un mètre de côté, contre moins de 10 000 € dans les années 1990. Mais l’artiste a aussi créé des petites pièces qui s’échangent encore à moins de 1 500 €, comme le petit arrachage de 1959 (8 x 6 cm) dispersé pour 1 100 € le 20 mars 2006 chez Cornette de Saint-Cyr. Hains entamait son ascension de son vivant avec la dispersion de La lessive génie qui quintuplait son estimation chez Sotheby’s Londres le 25 octobre 2005 (50 000 £, soit 73 800 €). Lors de cette même vente, son ami Jacques de la Villeglé signait son record pour Avenue de la Liberté, Charenton qui décrochait 75 000 £, soit 110 700 euros. A l’instar de Hains, ses arrachages des années 60 et de formats honorables cotent désormais entre 30 000 et 40 000 €. Les œuvres récentes sont beaucoup moins prisées et plus accessibles comme l’affiche lacérée Sans titre de 1992 qui changeait de main pour 1 800 € le 27 mars 2007 chez Piasa (Paris).Les décollages de Wolf Vostell sont rares mais ne prêtent pourtant pas à surenchère. Vostell est le plus abordable des « décollagistes » avec près de 90% des œuvres adjugées moins de 5 000 €. Une œuvre de 1959 fut par exemple emportée pour 3 700 € le 11 novembre 2006 chez Sturies Andreas à Dusseldorf. Enfin, François Dufrene dépasse allègrement la barre des 5 000 € pour des œuvres de la même période. En octobre 2006, le marteau tombait à 26 000 £ (près de 38 600 €) chez Christie’s pour son décollage de 1960 intitulé Apéritif.