Largilliere bientôt millionnaire ?

[08/09/2020]

La Belle Strasbourgeoise est un étendard, un symbole, à la fois aristocratique et populaire. Elle est une parfaite image française, presque solennelle du XVIIIè siècle naissant, libre, élégante et féminine. (Christie’s)

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Sous cette description enthousiaste, extraite du catalogue de la collection du Commandant Paul-Louis Weiller, Christie’s annonce un portrait de Nicolas DE LARGILLIERE (1656-1746), d’un peu plus d’un mètre trente de hauteur sur un mètre de largeur. L’oeuvre est attendue sous le feu des enchères le 15 septembre à Paris sous le numéro de lot 212. Cette belle Strasbourgeoise pourrait-être, de l’avis de certains, la propre fille de l’artiste. Elle en impose en tout cas par l’extraordinaire chapeau habillant son chef de deux grandes cornes « aristocratiques », typiques du folklore strasbourgeois dès la fin du XVIIè siècle.

« Cette œuvre également connue sous le nom fameux de “La Belle Strasbourgeoise” est sans conteste l’oeuvre la plus célèbre de l’un des plus grands maîtres du genre en Europe : Nicolas de Largilliere. On doit sa renommée à une autre version, conservée dans les collections du Musée des Beaux-Arts de Strasbourg depuis son acquisition en 1963 sur le marché de l’art anglais. Par la force de son image, “La Belle Strasbourgeoise” est l’un des portraits français les plus diffusés dans le monde, assurant ainsi sa notoriété et son aura », peut-on encore lire dans le catalogue de la maison de ventes.

Mais la version présentée par Christie’s est plus minutieuse et plus baroque que celle conservée au musée de Strasbourg. Elle affiche par ailleurs un pedigree bien documenté depuis le XIXè siècle : collection Arthur Barker, puis J. Stewart Hodgeson Collection, avant 1893. Acquis en 1893 chez Christie’s, Londres par l’intermédiaire le marchand d’art et collectionneur britannique Sir George Donaldson pour 250 guineas (soit 262.5£). Elle gagne ensuite la collection du Major Baring et est finalement convoitée par le commandant Paul-Louis Weiller en 1967 auprès de la Galerie Frank Partridge & Sons à Londres.

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“Cet étendard pourrait atteindre le million et signer le nouveau record de Nicolas de Largillière.”

 

la belle strasbourgoise Nicolas de Largilliere (1656-1746), La Belle Strasbourgeoise. Huile sur toile
131,5 x 105,5 cm

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L’estimation basse de Christie’s affiche 600.000€, mais cette œuvre unique, cet « étendard », pourrait atteindre le million et signer le nouveau record de Nicolas de Largillière. L’actuel record se monte à 684.000€, pour un double portrait intimiste, celui de François Pommyer et Yves Joseph Charles Pommyer vendu en 2001 à New York par Sotheby’s. L’oeuvre avait déjà fait l’objet d’une vente en salle en 1993, à Londres sous le marteau de Christie’s (Portrait of François Pommyer and Yves Joseph Charles Pommyer).

La Belle strasbourgeoise n’est pas le seul chef-d’oeuvre de cette collection du Commandant Paul-Louis Weiller, dont la vente disperse 163 lots les 15 et 16 septembre. Beaux meubles, vaisselle précieuse et toiles choisies, parmi lesquelles une Lucrèce magistralement exécutée par un suiveur de Cranach (XVIè siècle) (estimée entre 40.000 et 60.000€ et une paire d’huiles sur toile de Francesco GUARDI (1712-1793) estimée 300.000 et 500.000€ (Un caprice avec un obélisque à l’entrée d’un port fortifié; Un caprice avec une arche en ruines sur le lagon).

Guardi Francesco Guardi (1712-1793). Un caprice avec un obélisque à l’entrée d’un port fortifié.

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Nicolas de Largilliere (1656-1746) : Après une jeunesse passée à Anvers et de 1675 à 1679, Nicolas de Largilliere a travaillé en Angleterre, assistant Lely et Verrio. Il déménage à Paris en 1679, où il devient le portraitiste le plus important de l’époque, n’ayant rivalisé que Rigaud, presque son contemporain.