La photographie surréaliste – La beauté convulsive

[27/09/2007]

 

La photographie surréaliste naît officiellement en 1924 avec le Manifeste du mouvement par André Breton. La soif d’expériences nouvelles qui motive la création surréaliste alimente l’exploration du médium photographique sous diverses formes. Parmi les procédés exploités, citons les solarisations de Man Ray qui consistent à réexposer le négatif à la lumière, les brûlages de Raoul Ubac, les photomontages de Pierre Molinier ou les jeux de miroirs d’André Kertész… autant de techniques qui déréalisent les sujets et les objets et leur confèrent une part de mystère, faisant éclore une beauté irrationnelle, merveilleuse et convulsive.

MAN RAY fut peintre et Dada au côté de Marcel Duchamp avant de se consacrer à la photographie. Portraitiste aux premières heures, il adopte au début des années 20 la rayographie, technique photographique sans appareil ou les objets sont directement posés sur du papier sensible. Le prix de ses rayographies s’envolent plus que tout autre cliché : en 2006, par exemple, six photographies de Man Ray furent adjugées pour plus de 200 000 $ chacune… toutes étaient des rayographies réalisées entre 1926 et 1930. L’une d’entre, Rayograph (Electricité) culmina à 200 000 £ (plus de 290 000 €, Christie’s Londres, le 17 mai). Cependant, de tels sommets sont rares et les aficionados du cliché surréaliste peuvent acquérir des œuvres de cette série au dixième de ce montant comme Necklace and Bracelet in white Horsehair by Elsa Triolet de 1932/1933 qui changea de main pour 20 000 £ (près de 30 000 ) en mai dernier chez Christie’s Londres.
Pour moins de 5 000 euros, l’amateur de rayographie devra se contenter d’un tirage postérieur comme ceux réalisés par Pierre Gassmann après la mort de l’artiste.Outre ce type d’œuvres et dans cette gamme de prix, des sujets plus « classiques », portraits ou rencontres incongrues d’objets, sont abordables, y compris lorsqu’il s’agit de tirages argentiques vintage. Par exemple, L’oeuf et le coquillage, un cliché de 1931 proposé chez Hampel à Munich en juin 2007, fut soumis aux enchères pour une fourchette d’estimation de 400 – 600 €… mais le cliché ne rencontra pas son public et resta invendu.

Quatre années après la dispersion historique de la collection du pape du surréalisme André Breton (15 avril 2003), qui faisait tomber des enchères records dont celle d’Hans BELLMER pour La poupée (1936, 185 000 €), de Manuel ÁLVAREZ BRAVO pour Parabola optica (parabole optique) (130 000 €) ou de Raoul UBAC pour Le triomphe de la stérilité – Penthésilée (95 000 €), ces artistes n’ont pas réitéré ces exploits. Précisons qu’un pedigree aussi prestigieux que celui de la collection Breton couplé à une qualité d’œuvres extraordinaire déclencha un enthousiasme immodéré chez les collectionneurs. Sans le sceau de cette collection, des mises en scène de Poupées de Bellmer, moins abouties que celle de 1936 colorée à l’aniline s’échangent autour de 10 000 €, à l’instar de celle proposée chez Mathias-Le Roux-Morel-Baron-Ribeyre (Paris) en novembre 2006 qui quadrupla tout de même son estimation basse en trouvant acquéreur pour 10 600 euros!

Autre exemple, le produit des ventes dégagé pour Raoul Ubac en 2003 s’éleva à près de 400 000 €, tandis qu’en 2005 ses œuvres dégagèrent «seulement » 90 411 € pour un nombre de transactions quasi identique à celui de 2003. A l’heure actuelle, comptez entre 10 000 et 20 000 € si vous convoitez un photomontage ou une composition solarisée des années 30 sous l’objectif d’Ubac.
Quant à Pierre Molinier, son meilleur produit des ventes ne fut pas dégagé en 2003, bien qu’il afficha cette année une progression de +460% par rapport à l’année précédente (142 421 € de produit des ventes en 2003), mais en 2005 à hauteur de 211 873 €. Ce bon résultat de 2005 reflète le succès de la dispersion du 8 juin 2005 consacrée à Molinier et orchestrée par P.Bergé-Buffetaud-Godeau-Chambre-De Nicolay à Paris. Pas moins de 126 photos furent proposées lors de cette vacation dont la majorité furent adjugées entre 350 et 750 euros, bien que certaines épreuves furent enlevées entre 1 000 et 3 000 € comme Le podex d’amour, un photomontage adjugé 2 600 €.