L’Inde, le nouvel Himalaya du marché ?

[15/09/2008]

 

Cette semaine, à New York sont orchestrés de nombreuses ventes thématiques dédiées au marché asiatique, devenu en moins de trois ans l’un des secteurs les plus porteurs.
Avec la Chine, l’Inde est l’autre prétendant à la direction du marché de l’art international. Au milieu des années 90, la forte croissance indienne fait émerger une nouvelle génération de mécènes prêts à investir dans l’art de leurs concitoyens. Aujourd’hui, la demande est mondiale et grandissante, portée par un climat très spéculatif aux possibilités d’allers retour alléchants. Les nouvelles étoiles de l’art indien sont disputées à Hong-Kong et Dubaï, Londres et New-York, New Delhi et Paris. Après la Chine, l’Inde apparaît comme un nouvel Eldorado pour les collectionneurs attirés par la spéculation.

Le sculpteur Anish KAPOOR, est une parfaite illustration de cette flambée des prix. Introduit pour la première fois sur le second marché dans les années 1980’ pour 15 400 €, l’artiste a vu sa cote prendre deux zéro de plus ces quatre dernières années, notamment par le biais de ses grandes sculptures en albâtre. Mesurant près de 2 mètres de haut, celle dispersée le 1er juillet 2008 à Londres est partie pour 1,72 m£ (2,2 m€). Désormais, certaines de ses sculptures miroir atteignent de tels niveaux de prix, à l’instar de Blood Mirror, un disque de 2 mètres adjugé 520 000 £ (789 000 €) en février 2007. La cote de Kapoor ne cesse de progresser depuis 2004, même sur les multiples. Par exemple, Blood Solid, un bronze laqué rouge tiré à 8 exemplaires, a été adjugé une première fois 80 000 $ en 2004. La version proposée deux ans plus tard chez Sotheby’s a trouvé acquéreur pour 92 000 £ (136 000 €) et celle dispersée cette année a atteint 250 000 $ chez le même auctioneer à New-York (162 000 €).

Autre élu de la scène artistique indienne, Subodh GUPTA âgé de 44 ans, était inconnu des salles des ventes internationales quatre ans plus tôt. Aujourd’hui, il est considéré comme le Damien Hirst indien en regard de sa notoriété, et ses prix flambent! En 2005, Sotheby’s dispersait sa toile Fisherman pour 13 000 $ (10 700 €). C’est à cette époque que le marchand Pierre Huber l’exposa sur son stand à la Frieze Art Fair. En 2007, les prix de ses toiles avaient largement décuplé pour s’échanger entre 130 000 et 280 000 € en moyenne ! Son succès est mondial : prisé à Hong Kong, Londres ou New York, il l’est aussi en France.
Les grandes maisons de ventes, Christie’s et Sotheby’s en tête, soutiennent le marché à un rythme de plus en plus soutenu en multipliant les ventes spécialisées. En France, le premier chapitre dédié à l’art moderne et contemporain Indien fut écrit par Artcurial le 3 décembre 2007, lors d’une vacation d’art chinois et indien. Il trouvait un écho favorable (1,4 million d’euros de produit de ventes) avec quelques succès notables, dont celui du jeune Manjunath KAMATH (1972). Son acrylique intitulée Teeth Politics (2007) achevée peu avant sa mise à l’encan, partait pour 36 000 €. Poursuivant sur sa lancée, Artcurial incluait de l’art indien dans sa vente d’art contemporain du 3 avril 2008 et déclassait le précédent sommet de Sudodh Gupta ! L’installation Vehicle for the seven Seas de Gupta obtenait en effet 425 000 €, plus de trois fois l’estimation… une enchère record portée par un collectionneur français ! Succès de courte durée, puisqu’un mois plus tard, à Hong Kong, Saat samundar paar (10), est partie pour 8 mHKD (651 000 €) et au 1er juillet 2008 une toile de 2005 s’est envolée pour 520 000 £ (657 000 €) à Londres chez Sotheby’s.

L’une des grosses surprises de l’année 2007 est le jeune Raqib SHAW, dont Garden of earthly Delights III s’est totalement envolé à hauteur de 2,4 m£ (3,45 m€) à Londres le 12 octobre, établissant un record pour une œuvre d’art contemporain indien. Il faut dire que cette pièce majeure avait un bon pedigree. Acquise à la Victoria Miro Gallery en 2004 elle avait été exposée au MoMA (NY) en 2006.
D’autres artistes indiens sont en train de prendre d’assaut les premières places dans le classement des artistes actuels les plus cotés. Le 20 septembre 2007, le peintre Atul DODIYA a décroché une enchère de 450 000 $ (322 000 €) pour Three Painters. Introduit depuis 2006 aux enchères, Bharti KHER a vu, en avril 2008, l’un de ses paysages s’arracher 165 000 £ (209 000 €) à Londres, pour une estimation de 40 000 – 60 000 £. Un mois plus tôt, un diptyque de TV SANTOSH est partit pour 280 000 $ (178 000 €) chez Christie’s New York. Parmi les autres résultats à 6 chiffres enregistrés, signalons encore celui de Shibu NATESAN pour l’équivalent de 113 000 € et de Jitish KALLAT, 105 000 €, décrochés en mai dernier à Hong Kong.

Dopée par des ventes spécialisées, la cote de l’art contemporain indien affiche une progression impressionnante : en juillet 2008, on enregistrait un indice des prix en hausse de +3 230% sur la décennie !