L’Ecole de NewYork

[02/01/2007]

 

Après la seconde guerre mondiale, de jeunes artistes ont renouvelé la peinture américaine. Influencés par le surréalisme, ils s’émancipent de la réalité pour s’engager dans une peinture libre dont on distingue deux tendances : “l’Action painting” et la “Colorfield painting”. Le terme d’”Action painting” désigne l’importance de la gestualité chez certains expressionnistes abstraits. Cette peinture d’action s’invente de façon pulsionnelle, témoignant de l’énergie vitale et du corps en mouvement de l’artiste, comme dans les drippings de Pollock ou les coups de brosses agressifs de Kline. La “Colorfield painting” se décline en champs colorés, comme autant d’espaces vibratoires propices à la méditation. Le spectateur est absorbé par les environnements sensibles de Barnett Newman ou de Mark Rothko. D’autres artistes sont difficiles à classer mais participent à cette aventure abstraite : citons Adolph GOTTLIEB, Arshile GORKY, Ad REINHARDT et Clyfford STILL.

Les expressionnistes abstraits sont actuellement les artistes d’après-guerre les plus cotés du marché. Willem DE KOONING détient la plus haute enchère en ventes publiques. Il a établi son nouveau record le 15 novembre 2006, avec Untitled XXV, arraché pour 24,2 millions de dollars au marteau (Christie´s, NY). Lors des dernières ventes d’automne, la maison Christie’s n’a dispersé pas moins de 12 œuvres signées de Kooning, dont des huiles de la fin des années 50 et 60 accessibles entre 150 000 et 250 000 € (16 novembre, NY).

En 1947, Jackson POLLOCK abandonne l’utilisation classique du pinceau pour le dripping (projection de peinture sur la toile). Pollock est l’un des artistes les plus chers en ventes avec Number 12 (1949) partie pour 10,4 millions de dollars chez Christie’s NY le 11 mai 2004. Il signait alors sa plus haute enchère, mais ce record fut détrôné par la transaction privée annoncée à grand battage médiatique en novembre dernier : Number 5 de 1948 aurait changé de main pour 140 millions de $ !
Les collectionneurs s’arrachent aussi les œuvres antérieures aux drippings, comme le 14 novembre dernier ou Blue, white & orange Composition (1945) doublait son estimation basse pour s’envoler à 1,6 million de dollars (Sotheby’s, NY). Les dessins atteignent également des sommets : en novembre toujours, la petite encre P12, estimée entre 60 000 et 80 000 $ par la maison Christie’s, s’envolait pour 270 000 $. A l’heure actuelle, seules ses gravures sont accessibles pour moins de 10 000 $.
En 2005, Franz KLINEFranz Kline décrochait l’une des plus hautes enchères de l’année avec Crow Dancer (1958) qui décrochait 5,7 millions de $ (Christie’s NY, 11 mai 2005). Les pièces maîtresses sont dispersées à Londres et à New-York mais il demeure possible d’accéder à des œuvres moins prestigieuses et moins onéreuses dans des maisons de ventes plus confidentielles : citons la technique mixte proposée par Lempertz à Cologne le 2 juin dernier qui partait pour 14 000 €.
Comme Kline, Robert MOTHERWELL a privilégié le noir et le blanc comme base chromatique. En 2006, 25 toiles furent soumises aux enchères : pas de record millionnaire cette année mais des œuvres accessibles comme son « Drawing » de 1958, qui trouvait preneur pour 10 000 £ (Sotheby’s, Londres, juin 2006).

Mark ROTHKO a développé une approche méditative de la peinture grâce à ses « champs colorés ». En novembre 2005, il signait un nouveau record de 20 millions de dollars pour Homage to Matisse (1954, Christie’s NY). Depuis, aucune œuvre de cette envergure n’a été proposée. Aujourd’hui, il faut compter plus d’un million de dollars pour une belle toile, tandis que 10 ans avant son record, certaines étaient accessibles autour de 100 000 $, à l’image de l’acrylique de format 100×65 cm adjugée 85 000 £ lors de la vente du 28 juin 1995 chez Sotheby’s Londres.
Le marché de Barnett NEWMAN demeure ténu. Seules 18 peintures ont été proposées en 20 ans et deux huiles furent présentées en 2006 (Tajan, Paris). Ces deux toiles étaient des œuvres mineures (moins de 20 cm de côté) qui ne trouvèrent pas preneur malgré leur date historique (vers 1945). Des petites peintures de Newman sont abordables pour moins de 5 000 € : en juin 2005, un heureux amateur emportait une huile de l’artiste pour 4 800 $ (Swann Galleries, NY). Les collectionneurs sont exigeants et les prix s’envolent pour les œuvres abouties : citons par exemple l’encre proposée par Christie’s NY en novembre dernier qui s’est vendue pour 300 000 $ au marteau, renouant avec sa cote de 1990, au pic de la bulle spéculative.

Pour Newman comme pour les autres artistes de l’école de New York, le marché est asséché en formats monumentaux, qui participent au prestige des plus grandes collections muséales et privées au monde. En 2006, leur cote a encore progressé de 12%, atteignant le double du niveau de 1990.