L’Art vidéo – L’image mobile

[19/09/2007]

 

L’artiste est, selon la formule consacrée de Wassily Kandinsky, « l’enfant de son époque ». A ce titre, quoi de plus normal que de s’approprier, outre les images et les idées de son temps, les technologies contemporaines. Le boom de la télévision dans les années 60 éveilla des artistes, aux Etats-Unis comme en Europe, aux possibilités d’un « art vidéo ». Les manipulations de l’image, la puissance narrative, la dimension temporelle sont autant de qualités qu’offre la vidéo et que les artistes explorent depuis près de 50 ans.

Les balbutiements de l’art vidéo eurent lieu avec Wolf VOSTELL qui, par ailleurs, déborda largement ce champ d’expression puisqu’il fit aussi partie de Fluxus et des premiers affichistes avec Raymond HAINS, Jacques VILLEGLÉ et François DUFRENE. L’Allemagne, son pays de naissance, réalise 79% des transactions. Les amateurs anglo-saxons de son travail devront suivre ces dispersions germaniques, ainsi que les ventes françaises et espagnoles qui réalisent respectivement 12% et 5% des ventes. Ses oeuvres demeurent abordables avec 90% des adjudications inférieures à 5 200 euros. Les rares installations vidéos soumises aux enchères sont cependant de plus en plus disputées : en mai 2007 par exemple, Requiem fit grimper les enchères à 17 000 euros chez Christie’s (Paris)… un sommet pour l’artiste.

Autre pionnier du langage vidéo, Nam June PAIK est connu et collectionné dans le monde entier : les anglo-saxons réalisent 40% des transactions et la France, l’Allemagne et la Suisse dispersent 45% de son œuvre soumise à vacation. Il entreprit des expériences de distorsions de l’image dès le début des années 60 et se consacra à la réalisation de robots cybernétiques constitués de moniteurs dès 1985. Selon l’envergure des installations et le nombre de moniteurs dont elles sont composées, les adjudications tombent entre 20 000 et 100 000 euros en moyenne. Mai 2007 fut un mois record pour l’art vidéo puisque Paik signa son record 4 jours avant celui de Vostell : Christie’s Hong-Kong dispersa une installation télévisuelle anthropomorphique, Baby Buddha, qui culmina à 2,3 millions de hong-kong dollars, près de 219 000 euros.Des œuvres mineures sont tout de même accessibles entre 1 000 et 3 000 euros comme le robot composé d’un appareil photo et autres objets métalliques qui fut adjugé pour 2 654 dollars (2 180 euros, Phillips, de Pury & CompanyNY) en avril 2006.

Malgré sa position précoce dans l’histoire de l’art vidéo et ses beaux résultats, Paik demeure moins coté que Bruce NAUMAN, de 9 ans son cadet. Précisons que Nauman est l’un des artistes les plus prisés de la scène contemporaine. Des collectionneurs fortunés sont près à débourser un, voire plusieurs millions de dollars pour des installations de l’artiste, qui ne sont d’ailleurs pas toujours pourvues de vidéo. En novembre 1997, par exemple, Sotheby’s adjugea le gigantesque Good Boy, Bad Boy (néon, verre, métal, 37,5 x 349,5 x 548,5 cm) pour 2 millions de dollars. Au dixième de cette somme, un collectionneur emporta une installation vidéo portant le même titre en mai 2007 chez Christie’s NY. Cette dernière, éditée à 40 exemplaires, explosa sa fourchette d’estimation de 40 000 – 60 000 dollars pour un coup de marteau à 210 000 dollars (près de 155 000 euros).

Parmi la jeune génération d’artistes « multimédia », Pipilotti RIST, Gary HILL, Tony OURSLER, Pierre HUYGHE, Dominique GONZALEZ-FOERSTER, Bill VIOLA ou Pierrick SORIN bénéficient certes d’une audience de plus en plus large, mais leur marché est, aux enchères, encore balbutiant. Par exemple, les deux installations multimédias de Pierrick Sorin proposées aux enchères à ce jour furent boudées. Quant a Gary Hill, Pierre Huyghe ou Dominique Gonzalez–Foerster, moins de 10 œuvres sous chacune de leur signature fut, pour l’heure, soumises à vacation.
Bill Viola rencontre plus de succès. Son entrée dans le monde des enchères le 27 juin 2002 fut percutante avec Incrémentation qui décrocha 40 000 livres sterling, l’équivalent de 62 200 euros. L’année de cette première adjudication, une installation vidéo, Going Forth By Day (2002), fut présentée au Solomon R. Guggenheim Museum de New York. Une preuve que l’art vidéo peut atteindre des prix particulièrement élevés quand les artistes consacrés par les institutions culturelles passent en vente publique.
Pourtant il aura fallu attendre près de 20 ans après sa première exposition personnelle pour qu’il apparaisse en salle des ventes; une illustration de la difficulté de la vidéo et des installations à pénétrer le marché des ventes publiques. Malgré sa notoriété, on ne compte que 6 œuvres vidéos de Viola dispersées en quatre ans (entre 2002 et 2006).