Jan Fabre – L’artiste et l’entomologiste

[13/07/2008]

 

Anversois de naissance, Jan Fabre trouve une filiation française à travers sa fascination pour les travaux de son homonyme Jean-Henri Fabre (1823-1915), entomologiste et poète du XIXème siècle qui décrivit avec rigueur et passion la vie des insectes, notamment celle des coléoptères. Or, le scarabée à la carapace irisée est un matériau phare dans l’œuvre de Fabre. Les reflets changeants d’1,4 million de carapaces réverbèrent la lumière de la salle des glaces du Palais de Bruxelles depuis 2002, dans sa commande officielle la plus impressionnante,
Plus récemment, il a fêté ses cinquante ans dans le plus prestigieux musée au monde : Le Louvre. Pendant trois mois, le musée fit dialoguer ses œuvres avec les peintures des maîtres des écoles du Nord (11-04-2008 au 07-07-2008). Comme à chacune de ses manifestations, qu’il s’agisse d’expositions, de théâtre, de danse ou de performance, cette entrée au Louvre ne se fit pas sans fracas. Une pétition « Contre l’exposition de Jan Fabre au Louvre » arriva même dans les mains le Madame Christine Albanel, ministre de la Culture. Fabre déclenche les passions et suscite la polémique, c’est le propre des œuvres fortes.

Outre la Belgique, son rayonnement est international, de la Dokumenta de Kassel aux biennales de Venise, ponctué par des expositions personnelles à Amsterdam, London, Barcelone, Varsovie ou Munich avant son intervention au Louvre en 2008. En regard de sa notoriété, le prix de ses œuvres est raisonnable avec 92% des lots adjugés pour moins de 10 000 euros. Si ses expositions sont passionnées, son marché reste réservé.

Le marché de Fabre se concentre en Belgique (De Vuyst), en Allemagne (Lempertz) et aux Pays-Bas. Sotheby’s l’intègre par exemple dans ses dispersions d’art moderne et contemporain à Amsterdam. En juin dernier, l’auctioneer proposait une pièce de 115 cm, virgule organique composée d’os et de coléoptères, les matériaux de prédilection de Fabre. Estimée 4 000 – 6 000 euros, la pièce ne trouvait pas preneur malgré la pénurie de sculptures sur le second marché : aucune n’avait été soumise à enchère depuis deux ans et demi.

Les premières apparitions aux enchères arrivèrent timidement en 1992 avec deux dessins chez De Vuyst et Campo & Campo. Ils ont décroché l’équivalent de 830 euros et 1 000 euros. Cinq ans plus tard, Sotheby’s intègrait un dessin au stylo – technique plus cotée que ses encres – dans ses vacations d’art moderne et contemporain à Amsterdam. Ce fut un premier succès : Sabel doublait son estimation basse pour une enchère gagnante équivalente à 5 255 euros. Un an plus tard, la maison de vente anglo-saxonne présentait deux petites installations représentants des insectes, vendues autour de 3 000 euros chacune (Spider Sculptures, 2 000 et 2 200 livres sterling).

En décembre 2003, pour la première fois, Fabre était présent dans un catalogue de vente new-yorkaise, avec une petite vanité en résine synthétique et matériaux organiques vendue l’équivalent de 2 300 euros chez Phillips, De Pury & Luxembourg.

Sa présence dans les vacations anglo-saxonnes n’en est qu’à ses balbutiements et c’est encore en Belgique que furent enregistrées les plus fortes adjudications : trois sculptures furent emportées entre 10 000 et 20 000 euros chez De Vuyst entre 2001 et 2005, dont Flemish Warrior (guerrier flamand) constituée d’une armure et d’une multitude de ces carapaces colorées. L’œuvre changeait de mains en 2005 pour 17 000 €, établissant la plus haute adjudication de l’artiste. Quatre ans plus tôt, cet auctioneer soumettait une œuvre similaire aux enchères : intitulée Le chapelet du guerrier et constituée des mêmes matériaux, l’œuvre décrochait à l’époque 500 000 francs belges, soit près de 12 400 €.

La pénurie du marché en sculptures n’est compensée que sporadiquement par les dispersions de dessins, photos, peintures ou estampes. Les dessins au sang réalisent les plus beaux scores : un ensemble de 6 dessins de 1978, «My blood, my body, my landscape», fut enlevé pour 12 000 € en décembre 2006 (De Vuyst). Depuis, sur huit œuvres de Fabre soumises à enchères entre mars et juin 2008, on compte cinq dessins dont un collage présenté en France (Massol) : le petit format de 20 cm représentant un bousier fut boudé dans une fourchette d’estimation de 600-800 euros.