Hong Kong s’ouvre à l’art contemporain occidental

[23/06/2015]

 

La société de ventes Sotheby’s a de quoi se satisfaire. Ses cessions hongkongaises se déroulent bien. La dernière en date, Boundless: Contemporary Art qui se tenait le 11 juin 2015, a conduit près de 60 % des œuvres au-dessus des estimations hautes. Le résultat global s’inscrit largement au-delà des attentes avec 41.5 mHK$ de produit de ventes, soit 5,3 m$ récoltés, et une oeuvre de Keith Haring disputée au quadruple des estimations, atteignant finalement l’équivalent de 536 000 $ frais inclus (Untitled, 1983).

Ce qu’implique la réussite de Keith Haring

Keith HARING vient ainsi d’emporter son record sur la place de marché hongkongaise. Or, ce record témoigne de l’ouverture en cours du marché asiatique pour les grandes signatures occidentales. Ces 536 000 $ ne sont pas seulement une réussite pour Keith Haring mais ils récompensent l’ensemble d’un travail mené par Sotheby’s (et par Christie’s) depuis plusieurs années à Hong Kong, car il fallut s’armer de patience avant que les collectionneurs chinois, taïwanais et issus d’Asie du Sud-Est développent un réel intérêt pour l’art occidental.
Poursuivons sur l’exemple de Keith Haring. Artiste emblématique en Occident, il fait partie des 100 artistes les plus performants du monde aux enchères et a emporté 13 adjudications millionnaires depuis 2007. Sotheby’s l’a introduit tout récemment dans une vente hongkongaise, en janvier 2014. A l’époque, personne ne veut des deux œuvres proposées entre 100 000 et 200 000 $. Le marché n’est pas prêt, ou les acheteurs trop timorés. Est-West auction tente une autre stratégie en proposant de petites pièces sans risque à moins de 5 000 $ quelques mois plus tard. Elles trouvent preneurs, mais une année de plus est nécessaire pour que la demande se consolide. Le 11 juin dernier, Sotheby’s a vendu non pas une, mais deux œuvres de Keith Haring. Les résultats du marché commencent tout juste à être probants et les sociétés de ventes occidentales vont pouvoir bénéficier autrement du pouvoir d’achat asiatique.

L’ouverture des ventes

Le principe de cette vente Boundless: Contemporary Art est de mixer des artistes contemporains phares chinois, japonais et occidentaux. Les noms de Chu Teh-Chun, Zao Wou-Ki, Yayoi Kusama, Yoshitomo Nara, Daido Moriyuama, Takashi Murakami se retrouvent ainsi égrenés dans le catalogue de ventes au même titre que Lucio Fontana, Vik Muniz, David Lachapelle, Jean-Michel Basquiat, Andy Warhol et même Space invader ! Or, outre Keith Haring, le Top 3 de cette vente donne gagnants le franco-chinois ZAO Wou-Ki (505 000 $ frais inclus pour 14.1.69) et l’américain Andy WARHOL (366 000$ pour le double portrait de Sofu Teshigahara), des signaux particulièrement positifs, renforcés par d’autres expériences… C’était notamment une première tentative de vente d’une œuvre de Lucio FONTANA à Hong Kong, avec un petit Concetto Spaziale sur 500 exemplaires parti au double de l’estimation haute (il se paie 177 000 $ frais inclus).

Néanmoins, les artistes occidentaux ne s’envolent pas sur place. Ils y sont même plus abordables qu’à Londres et New York ou la demande bat véritablement son plein. A titre d’exemple, le multiple Balloon Venus Dom Pérignon de Jeff KOONS, édité sur 650 exemplaires, s’est vendu 51 600 $ chez Sotheby’s quand un exemplaire identique se vendait le double le même jour à Londres (vendue 105 859 $ chez Phillips). Les œuvres de Marc QUINN et de David LACHAPELLE se sont certes vendues, mais à leurs estimations basses (Marc Quin, The Architecture of Nature se paie 161 250 $ frais inclus et David Lachapelle, A taste of power coûte 22 575 $ frais inclus). On note encore un accueil mitigé pour l’artiste brésilien Vik MUNIZ (une œuvre vendue sous l’estimation basse, la seconde ravalée) et des échecs de vente pour des artistes de l’envergure de Richard Prince ou du couple Christo et Jeanne-Claude. Tout ne se vend donc pas, y compris des artistes bien médiatisés comme l’américain néo-pop art Kaws, qui fut choisi par le galeriste français Emmanuel Perrotin en 2012 pour inaugurer son espace hongkongais. Kaws avait cinq œuvres au catalogue dont trois furent ravalées.

Entre petits coups d’éclats et ventes avortées, la vacation Boundless: Contemporary Art marque un tournant dans l’assise des artistes occidentaux à Hong Kong sans tomber dans l’excès ni la frénésie acheteuse. Hong Hong apparaît, en tous les cas, comme la première place de ventes asiatique travaillant pour une globalisation de la demande.

Tous les artistes cités dans cet article :
Keith HARINGCHU Teh-ChunZAO Wou-KiYayoi KUSAMAYoshitomo NARADaido MORIYAMATakashi MURAKAMILucio FONTANAVik MUNIZDavid LACHAPELLEJean-Michel BASQUIATAndy WARHOLINVADERJeff KOONSMarc QUINNDavid LACHAPELLEVik MUNIZRichard PRINCECHRISTOKAWS