En Bref : Wols le mystérieux chez Sotheby’s – Cindy Sherman à Londres

[05/07/2019]

Wols le mystérieux chez Sotheby’s

Le 26 juin dernier, parmi les 42 lots du catalogue de la grande vente d’Art Contemporain chez Sotheby’s Londres, se trouvait Vert Strié Noir Rouge (Green Stripe Black Red) (1946-47) d’Otto WOLS (1913-1951). De cet artiste allemand travaillant en France, mort à seulement 38 ans mais ayant indéniablement marqué la création artistique des années 1930 à 1950, on ne sait que peu de choses. Son art, qui s’exprimait sur de nombreux supports, valsait du Surréalisme au Tâchisme en passant par l’Art Informel d’un Fautrier ou Dubuffet. Le corpus de Wols est restreint, pas plus d’une cinquantaine d’œuvres. Ce qui fait du numéro 23 du catalogue de Sotheby’s un petit événement, car depuis 2011, date de la vente à Drouot d’une partie de son atelier, Wols se fait rare en vente publique. Cette pièce a donc fait l’objet d’une petite bataille au téléphone qui se solde par un nouveau record absolu de l’artiste, près de 7 fois son estimation haute pour un total de 5,7 m$. Cela représente près de 35 fois son adjudication de 151 000$ lors de la prestigieuse vente de la Hélène Anavi Collection of Surrealist and Post-War Art chez Sotheby’s en 1984.

Le seul lot à surpasser la performance de Vert Strié Noir Rouge lors de cette vente est un Self-Portrait de Francis BACON (1909-1992) datant de 1975, qui part à près de 21m$, juste au dessus de son estimation basse à 19 m$. Ces deux pics ont relevé une Contemporary Art Evening sale sinon un peu terne. Même si 90 % des lots ont trouvé acquéreur, le produit final de 73,67m$ (87,79m$m avec les frais), se hisse à peine au-delà de l’estimation basse, un recul de près de 40 % pour Sotheby’s par rapport à la vente de l’an dernier. Le choix des œuvres plutôt classiques de cette vacation en est sûrement la cause principale, comparé à celui de son alter ego Christie’s, qui avait risqué des pièces de jeunes artistes lors de sa vente d’Art Contemporain le même soir, pour un total des ventes certes moindre (57m$), mais un catalogue peut-être moins convenu.

Cindy Sherman à l’honneur à Londres

La National Portrait Gallery de Londres consacre une rétrospective inédite à l’artiste américaine jusqu’au 15 septembre. Connue pour ses photographies où elle se métamorphose, Cindy SHERMAN (1954) adopte toute sorte d’apparences à l’aide de multiples artifices jusqu’à devenir parfois méconnaissable. L’ensemble de son travail questionne la notion de représentation et la frontière parfois ambiguë qu’il existe entre réalité et fiction.
Le musée londonien explore l’évolution de son œuvre du milieu des années 1970 à nos jours. Organisée par le conservateur et écrivain Paul Moorhouse, l’exposition rassemble plus de 150 œuvres dont certaines n’ont encore jamais été exposées au public. Parmi elles, la série iconique qui a marqué sa carrière : Untitled Film Stills est montrée pour la 1ère fois dans son ensemble au Royaume-Uni. Créée entre 1977 et 1980, elle comprend 70 photographies en noir et blanc où l’artiste se photographie dans la peau d’archétypes du cinéma des années 1950 et 1960. Lors de sa sortie la série rencontre un mélange de confusion et d’indifférence, elle vend quelques tirages à 50$ pièce et lutte pour être exposée dans les galeries new-yorkaises. En 2014, soit plus de 30 ans plus tard, une partie de la série (21 photographies) se vend chez Christie’s à NY pour 6,8m$ , record absolu pour l’artiste et en mars dernier, la photographie Untitled Film Still #21 se vend plus de 800 000$ chez Sotheby’s à Londres!

La série «Cover Girl » est également exposée ainsi que d’importantes séries comme «Centerfolds» ou «History Portraits». Et parmi les inédits, l’on peut admirer le portrait de Madame Moitessier de Ingres, spécialement emprunté pour être exposé à côté de la version de Sherman : Untitled (#204). L’artiste au style parfois excentrique voire choquant a su au fil du temps, se faire une place solide dans l’art contemporain avec un message fort et toujours aussi percutant, où l’apparence n’est qu’un masque utilisé pour dissimuler la véritable identité de chacun. Elle permet, à l’ère du selfie et des avatars, de reconsidérer l’art de l’autoportrait.