En Bref ! Drawing Now – Peggy Cooper Cafritz

[16/03/2018]

Drawing Now 2018

Mars – c’est désormais une tradition – est le mois du dessin `à Paris. Le Salon du Dessin au Palais Brongniart, la Foire DDESSIN {18} à l’Atelier Richelieu et le Salon DRAWING NOW au Carreau du Temple proposent au même moment, en écho aux grandes vacations dédiées aux dessins anciens et contemporains dans les maisons de ventes, un parcours parisien exclusivement centré sur ce médium qui a trouvé sa place dans le calendrier bien chargé des événements artistiques, son public et son marché parmi les différentes disciplines.

72 galeries internationales présentent cette année, pour la 12e édition de DRAWING NOW, près de 400 artistes et plus de 2000 œuvres. Outre les découvertes promises d’un stand à l’autre, la foire propose comme chaque année des talks qui ont pour objectif d’approfondir la réflexion autour du dessin contemporain et d’approcher du processus de création en allant à la rencontre des artistes. Cette année, les talks seront résolument internationaux avec le Drawing Center New York, la Drawing Room Londres ou la Menil Collection Houston. L’exposition « BD/Drawing : Correspondances » attirera sans doute aussi un public nombreux, puisqu’elle présente un ensemble d’œuvres issues des collections de la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image, ainsi que des ateliers des artistes ou du fonds de leurs galeries. Ce choix permet de mettre en lumière une influence croisée entre dessin contemporain et BD : dépasser le cadre ou la vignette, défaire le héros – créer un anti-héros -, éclater la narration sont des préoccupations qui se dessinent autant dans les deux média.

Philippe Piguet, le directeur artistique du salon, réitère par ailleurs le parcours Master Now initié en 2016, un parcours au sein même du Salon pour redécouvrir quelques maîtres du dessin d’une feuille à l’autre, d’un stand à l’autre. L’occasion de redécouvrir Fornicon, de Tomi UNGERER à la Galerie Martel ou Entwurf de Bruno GIRONCOLI à la Galerie Bernard Jordan. Autre artiste mis en valeur à ne pas manquer : Lionel SABATTÉ (1975), lauréat du prix DRAWING NOW qui soutient depuis 2011 un artiste de moins de 45 ans et dont le travail est particulièrement représentatif du dessin contemporain dans toute sa diversité. L’artiste, né en 1975 à Toulouse, entend le dessin comme un passe-frontière entre les différentes disciplines qu’il explore. Ce prix est de bon augure pour le marché de l’artiste encore peu développé : le lauréat du Prix 2016 Jochen Gerner expose en ce moment même ses œuvres chez Christie’s France en concomitance avec les vacations de dessin.

Peggy Cooper Cafritz, la grande dame de l’art Afro-américain

Peggy Cooper Cafritz était célèbre aux États-Unis pour avoir fondé la Duke Ellington School of the Arts et posséder l’une des plus grandes collections privées d’art afro-américain et africain. Elle comprenait plus de 300 œuvres, avec des artistes de renom dont El Anatsui, Glenn Ligon, Chris Ofili, Kara Walker ou Kehinde Wiley. Une partie de ce trésor a disparu pour toujours en 2009, lorsqu’un incendie a ravagé sa demeure à Washington.

Née Pearl Alice Cooper en 1947, la grande dame est issue d’une famille aisée de Mobile en Alabama, dans le sud des États-Unis. Elle n’a pas échappé pas aux discriminations raciales et aux lois de ségrégation dans ses années de jeunesse. De son aveu même, ces années marquent le point de départ de sa volonté de s’engager et de militer en faveur de l’égalité de traitement entre les Américains. A la George Washington University, elle créé, du haut de ses 17 ans, le premier club étudiants pour les noirs. C’est aussi durant cette période en 1968, qu’elle initie avec le chorégraphe Mike Malone, un atelier d’art plastique, un summer camp ouvert aux jeunes ayant le goût de l’art mais dont l’accès aux institutions culturelles est malaisé. Cette expérience se mue en projet pérenne avec l’ouverture de la Duke Ellington School of the Arts en 1974. C’est une révolution pour l’époque à Washington, et sa co-fondatrice s’impose avec ses idées dans le paysage social et culturel de la côte Est.

Les artistes qu’elle a suivi et encouragé au fil des ans reviennent souvent sur sa vision de l’acte de collectionner, qui impliquait pour elle un investissement sur l’artiste comme être humain. Elle avait une relation personnelle avec chacun d’eux. Sa première œuvre de l’artiste d’origine nigériane Njideka Akunyili CROSBY est à ce titre une belle histoire : l’artiste, qui vit désormais à Los Angeles, crée de grands formats en peinture et collage, reflétant son héritage africain et documentant son quotidien américain. En un clin d’œil, Akunyili Crosby a gagné le prix d’art contemporain du Smithsonian American Art Museum (2014); rejoint la prestigieuse galerie Victoria Miro à Londres, a reçu le prix Joyce Alexander Wein du Studio Museum in Harlem (2015); et l’an dernier le prix de la fondation MacArthur. Bien avant cette explosion de succès, Peggy Cafritz avait vu en elle une artiste d’avenir. En 2013, et après trois ans d’attente, elle acquérait “The Beautiful Ones, #1a” (2012), qui montre la grande sœur de l’artiste dans sa jeunesse. Cette pièce magistrale détient le record d’enchères de l’artiste à près de 3m$ (Christie’s Londres, mars 2017). C’est aussi cette œuvre que Peggy Cafritz a choisi comme couverture de son livre « Fired up! : Finding Beauty, Demanding Equity: An African American Life in Art. The Collections of Peggy Cooper Cafritz ». Peggy Cooper Cafritz est décédée deux jours avant la parution de l’ouvrage en février dernier, qui explore sa collection, sa vie et son cercle artistique.