En bref : Anselm Kiefer – Alberto Burri – Alex Katz – Guggenheim – New York – Bilbao

[29/10/2015]

 

Tous les quinze jours, Artprice vous propose un tour d’actualité du marché de l’art en quelques mots et quelques chiffres. La bibliothèque selon Anselm Kiefer. Alberto Burri, au Guggenheim de New York. Alex Katz, au Guggenheim de Bilbao.

La bibliothèque selon Anselm Kiefer
L’artiste allemand aurait aimé être écrivain. Il n’a jamais cessé de consigner ses notes et ses réflexions dans des carnets personnels. “Dans mon œuvre, le livre est très important”, confie-il. “Son aspect esthétique, son aspect matériel, m’intéresse beaucoup. Certains sont de véritables sculptures, plus grands que la taille humaine, ouverts mais impossibles à feuilleter” (entretien avec Pierre Assouline, Anselm KIEFER, Sternenfall, Editions du Regard). L’écriture et les livres constituent l’un des socles fondateurs de l’œuvre, et l’artiste transforme des livres en sculptures depuis le milieu des années 1960, y intégrant sable, cendre, argile, paille, photographie, ou plomb. Son exposition en cours à la à la BnF François-Mitterrand à Paris – Kiefer, l’alchimie du livre, jusqu’au 7 février 2016 – s’attachent aux œuvres consacrées aux livres qui représentent 60% de son travail. Kiefer s’est attelé lui-même à la scénographie, dévoilant une centaine de livres réalisés depuis 1968.
L’exposition est conçue comme un espace intime, avec ce sentiment unique de déambuler dans l’atelier de l’artiste et d’accéder à sa propre bibliothèque, aménagée dans les deux premières salles latérales. Il s’agit en quelque sorte d’une exposition laboratoire, tandis que sa grande rétrospective se prépare au Centre Pompidou (du 16 décembre 2015 au 18 avril 2016). Cette dernière explorera notamment le versant monumental de l’artiste, qui fut, rappelons-le, invité à investir le Grand Palais en 2007 dans le cadre de Monumenta. Cette année là, en 2007, l’une de ses toiles chargées de matières – Lasst Tausend blumen blühen! – de près de trois mètres de large, fut emportée pour 3,5 m$ au cours d’une vacation de Christie’s Londres. Un record toujours d’actualité.

Alberto Burri, au Guggenheim de New York
Figure majeure dans l’histoire d’art du XXe siècle, Alberto BURRI avait déjà exposé au musée Guggenheim de New York en 1953, dans le cadre d’une exposition collective où il était le seul artiste italien (Younger European Painters, organisée par James-Johnson Sweeney). Cette fois, le prestigieux musée lui consacre une grande rétrospective sous le titre The Trauma of painting, jusqu’au 6 janvier 2016. Cet hommage important couvre près de 40 ans de création et fait le tour de toutes les grandes séries de l’artiste : depuis les Sacchi (sacs) constitués de sacs d’emballage déchirés dont les restes sont cousus et rapiécés, les Catrami (goudrons), Muffe (terreaux), Gobbi (bossus), Bianchi (blancs), Legni (bois), Ferri (fers), et Combustioni (combustions en plastique).
Ancien médecin ébranlé par l’expérience de la Seconde Guerre Mondiale (il est fait prisonnier par les Anglais en 1941, puis est transféré dans un camp américain au Texas), Burri plonge définitivement dans l’art dès son retour en Italie en 1946.

Après quelques années de tâtonnements, il co-fonde le groupe Origine en 1951, rejetant les effets décoratifs de l’art abstrait. Il participe l’année suivante à la 26e Biennale de Venise, et Lucio Fontana achète une de ses œuvres. C’est le début d’une carrière internationale… Les années 1950 révèlent son art de l’assemblage, avec des objets dérisoires détournés dans une ligne sensible convoquant l’Arte Povera, et des “peintures non peintes” réalisées en déchirant, cousant, soudant, fondant et en utilisant la combustion.
Alberto Burri fait partie, avec Lucio FONTANA et Enrico CASTELLANI, du triumvirat italien pour lequel le marché s’agite de plus en plus fermement. L’indice de ses prix affiche une hausse de +305% depuis l’année 2000 et trois œuvres ont passé les 5 m$ (frais inclus) en salles de ventes depuis février 2014. Les prix explosent pour les oeuvres créées il y a plus de 50 ans, car les acheteurs ont conscience de la contraction prochaine du marché. Il faut acheter maintenant, puisque l’acquisition d’une œuvre italienne réalisée il y a plus de 50 ans ou 50 ans après le décès de l’auteur, est soumise à la législation italienne (loi de 1939) obligeant l’obtention d’une licence d’exportation du gouvernement.

Alex Katz, au Guggenheim de Bilbao
Le musée Guggenheim de Bilbao, en Espagne, a ouvert son exposition dédiée à Alex KATZ, jusqu’au 7 février 2016. Le musée a sélectionné 35 paysages, un versant peu connu du peintre américain célèbre pour ses portraits, qui l’ont associé au mouvement Pop Art. Car l’oeuvre de Katz émerge avec dans les années 1950, à l’époque où l’Expressionnisme abstrait domine la scène artistique américaine. Ses œuvres figuratives offrent une alternative radicale aux tendances artistiques de l’époque et préfigurent le Pop Art, car Katz choisit le réalisme du portrait, en procédant par masses colorées. Ses toiles lisses interrogent sur la nature de la représentation, sur la perception des images par le biais du portrait, comme le fit Andy Warhol en détournant le principe de sérigraphie. Artiste incontournable de la scène américaine du XXe siècle, il est plus discret que les papes du Pop Art (Warhol, Wesselman, Rauschenberg), pourtant, le marché des enchères le soutient fermement, avec un indice de prix en hausse de 800 % depuis 2000. Si cette hausse parait phénoménale, elle n’illustre en fait qu’un réajustement de prix concernant les meilleures œuvres bien datées, sachant que les petites toiles de Katz s’achetaient entre 10 000 et 20 000 $ en moyenne en 2000. C’est aujourd’hui le prix à payer pour une belle sérigraphie, mais de petites oeuvres originales des années 1980 sont encore achetables dans cette gamme de prix, à l’instar du Red Nude vendue 23 000 $ frais inclus le 17 octobre 2015 chez Christie’s à Londres.