En Bref !

[06/04/2012]

 

Tous les quinze jours, Artprice vous propose un tour d’actualité du marché de l’art en quelques mots et quelques chiffres. Cette semaine : Wim Delvoye investit le Louvre, les reliques de Victor Hugo ont toujours la côte, les audacieuses sculptures de Urs Fischer à la galerie Gagosian Paris, la perte de vitesse du Design, et une présentation de la Triennale qui ouvre ses portes dans quelques jours au Palais de Tokyo.

Wim Delvoye au Louvre

En octobre 2011, le Flamand Wim DELVOYE (né en 1965) plantait un record d’enchère de 190 000 £ pour des engins de chantier en dentelle métallique (près de 300 000 $, Flatbed Trailer Scale Model and Caterpillar 5C Scale Model, Sotheby’s Londres). Avec 5 coups de marteau portés à plus de 100 000 $ sur l’année 2011, la cote de ce trublion de l’art est en pleine explosion et cette formidable ascension est relayée par le prestige des expositions en cours. Dernière en date : le Louvre ! Il a conçu une sculpture monumentale en acier torsadé pour la colonne du belvédère. Du haut de ces 13 mètres, Suppo sera exposée jusqu’au 3 décembre 2012.
Au sein du même musée, une quinzaine d’œuvres en vitrail, en porcelaine et en bronze, dialogueront malicieusement avec les collections des Objets d’art (du 31 mai au 17 septembre 2012).
Sa galerie d’œuvres annonce un cabinet de curiosités jubilatoire, avec peut-être, quelques peaux de cochons tatouées. Ce sont en effet ces tirelires vivantes iconographiées qui ont contribué à rendre l’artiste célèbre. A la fin des années 90, un cochon tatoué et taxidermé se vendait moins de 12 000 $ chez Christie’s (6 500 £, le 22 avril 1998 à Londres). Comptez aujourd’hui entre 50 000 et 150 000 $ en moyenne selon la qualité du dessin, pour une œuvre pur porc.

Les reliques de Victor Hugo suscitent l’engouement en salle des ventes

Le 28 mars 2012, Artcurial a présenté plusieurs dessins de l’artiste français Victor Marie HUGO, plus connu pour son œuvre littéraire et poétique. Huit des neuf dessins et aquarelles ont trouvé acquéreurs, pour près de 670 000 $. Deux tiers de ce résultat sont attribués à Souvenir de Belgique (1858), une encre de Chine réhaussée d’aquarelle et gouache : ce dessin a pratiquement multiplié par deux le précédent record de l’artiste, avec une adjudication atteignant environ 482 000 $. En effet, la SVV Fraysse (Paris) avait adjugé en 2002 Burg sans nom Neckarsteinach (1857) près de 235 000 $.
Plus d’une centaine d’œuvres de l’artiste ont été présentées en salles des ventes depuis une vingtaine d’années, non seulement dans son pays d’origine mais également outre-manche et outre-atlantique. Christie’s New York notamment a frappé quelques belles adjudications : Ruins in an Imaginary Landscape (encre brune sur papier) a trouvé acquéreur pour 80 000 $ (22 janvier 2004) ; alors que Castle in a fantastic landscape (gouache, encre et peinture dorée sur papier) s’est adjugée environ 63 000 $ (22 mai 1990).
C’est cependant à Paris que Christie’s a consacré une vente complète à l’oeuvre et à la vie de Victor Hugo et ses descendants. Intitulée Collection Hugo, Victor, Georges, Jean et les autres, la vente s’est déroulée le 4 avril 2012, date de son 210ème anniversaire. 415 objets divers ont été présentés en vente publique : livres, meubles, photographies, peintures ou encore correspondance ont été dispersés. Avec moins de 21% d’invendus, les lots Fine Art (248) ont à eux seuls généré plus de 1,4 m€, dépassant les attentes de la maison de vente.

Urs Fischer à la galerie Gagosian Paris

En mai 2011, l’artiste Urs FISCHER signait une adjudication record à 6 m$ (Lamp Bear), devenant l’artiste de moins de 40 ans le plus cher du monde. Quelques mois plus tard, il était encore (après les éditions 2003 et 2007) exposé à la Biennale de Venise. Et dès cette semaine, c’est la galerie Gagosian Paris qui accueille ses sculptures jusqu’à fin mai. L’ascension fulgurante de l’artiste n’a d’égal que son habileté déroutante à contourner les règles établies de la sculpture. Chez Gagosian son travail audacieux prend la forme d’une frêle bicyclette coupée en deux se balançant entre ses deux extrémités, d’un champ de clous de taille humaine, ou de véritables fruits, simulant ici une éclipse, ou là un système solaire, subissant le temps et son inéluctable évolution vers la pourriture.
Présenté en salles de ventes dès 2007 avec Sigh, Sigh, Sherlock! vendu 10 000 $ chez Phillips de Pury New York), Urs Fischer dépasse dès sa troisième adjudication le seuil des 100 000 $ avec Cork (vendue 112 699 $ le 17 mars 2009 chez Christie’s Paris). La cote de l’artiste ne cesse de progresser puisqu’il réalise une adjudication à 900 000 $ en novembre de l’année suivante (Untitled (Candle) partie le 9 novembre 2010 chez Sotheby’s New York), la seconde plus belle enchère pour un artiste de moins de 40 ans en 2010. Mais c’est en 2011 que les prix d’Urs Fischer explosent : avec un seul lot invendu (sur les 14 présentés) et des prix moyens sur l’année allant de 442 250 $ pour une peinture à 1 255 655 $ pour une sculpture, les collectionneurs se sont rués sur les œuvres de l’artiste. En 2011 toujours, il devient le plus jeune artiste à obtenir une adjudication supérieure à 3m$ (Lamp Bear vendue 6 m$ chez Christie’s New York) à l’âge de 38 ans. A cet âge là, Jeff KOONS n’avait pas vendu une seule œuvre au dessus de 200 000 $ et Damien HIRST venait à peine de dépasser le million de dollars (Something Solid beneath the Surface of all Creatures Great and Small vendue 1 050 000 $ en 2003).

Le design en perte de vitesse ?

Si le marché haut de gamme de l’art contemporain se porte bien, il en est autrement de celui du design dont le segment le plus haut de gamme souffre d’une contraction des prix, voire d’une désaffection des acheteurs. Sotheby’s en pâtissait en mars 2012, basant le succès de sa vente 20th Century Design sur des pièces phares aux estimations gonflées. Parmi les pièces les plus chèrement estimées : la Monumental Moloch lampe de Gaetano PESCE et l’étagère de Charlotte PERRIAND, deux pièces annoncées entre 80 000 et 120 000 $, sont restées sur le carreau. En 2007, année de gloire pour la cote du design contemporain, la géante Moloch de Pesce se frappait 150 000 $ au marteau de Sotheby’s (16 novembre, New York).
Si le marché est ralenti aux Etats-Unis, il est un peu plus vif en France : les sociétés de vente Leclere (Marseille) et Tajan (Paris) ont assez bien vendu des pièces de Ron ARAD depuis le début de l’année 2012. Quant au marché de Marc NEWSON, autre enfant chéri du design actuel (il signait 3 enchères millionnaires entre 2007 et 2010), il est chiche en pièce majeure (seule la Black Hole Table atteignait son estimation basse de 40 000 £, soit 63 000 $, le 29 mars 2012, Bonhams, Londres). Espérons que les ventes de mai donneront un coup de fouet au marché !

La Triennale d’art contemporain envahit le nouveau Palais de Tokyo du 20 avril au 16 août.

Après 11 mois de travaux, le Palais de Tokyo rouvrira ses portes le 20 avril 2012 avec à la clef de nouvelles ambitions. Agrandi de près de 14 000 m2, l’objectif de son directeur Jean de Loisy est d’en faire un espace vivant, en continuel mutation. Ce n’est donc pas un hasard si ce nouvel espace d’échanges, ouvert aux nouvelles expériences, a choisi la Triennale d’art contemporain pour son inauguration.
Anciennement nommée La Force de l’Art et jusqu’alors présentée dans la nef du Grand Palais, la Triennale d’art contemporain fait, cette année, entièrement peau neuve. Conçu par un groupe de 5 commissaires internationaux avec à sa tête le critique d’art nigérien Okwui Enwezor, le projet d’exposition s’appuie sur des ethnologues (Marcel Griaule, Claude Levi-Strauss…), des réalisateurs (Rainer Werne Fassbinder, Ahmed Bouanani, Timothy Asch…) et des écrivains (André Gide, Ariella Azoulay…). Une centaine d’artistes sont associés au projet parmi lesquels Carol Rama, Daniel Buren, Sarkis, Thomas Struth, Jean-Luc Moulène, Isaac Julien, Abel Abdessemed, Barthélémy Toguo, François Vergès… Sous le concept d’Intense Proximité, la manifestation ouvre son champ d’exploration en mettant l’accent sur les relations entre la création en France et les autres foyers artistiques internationaux.
En plus d’investir les espaces tout frais du Palais de Tokyo, cette 3ème édition réactive ses ambitions en envahissant 7 autres lieux situés dans Paris et sa proche banlieue. Ce changement de lieu et d’organisation ajouté à la volonté de faire interagir la création et la société d’aujourd’hui pourraient permettre à la Triennale de faire un grand bon en avant.