Coup de projecteur sur la Figuration narrative
[17/03/2015]
La Figuration Narrative, mouvement français né officiellement en 1965, fête son cinquantenaire et institutions comme sociétés de ventes se mettent au diapason de la date anniversaire.
Qu’est-ce que la Figuration Narrative ?
Ce courant émerge dans les années 1960 en réaction à l’abstraction ambiante. Il opère un retour à la figuration en recyclant les images, comme les Nouveaux Réalistes recyclaient les objets à la même époque. La Figuration narrative doit sa cohésion en tant que mouvement au critique d’art Gérald Gassiot-Talabot. En 1964, celui-ci organise, avec les peintres Bernard RANCILLAC et Hervé TELEMAQUE, une exposition manifeste au Musée d’art moderne de la Ville de Paris sous le titre « Mythologies quotidiennes ». Trente-quatre artistes (dont Arroyo, Bertholo, Bertini, Klasen, Monory, Rancillac, Recalcati, Saul, Télémaque…) figurent et racontent leur société contemporaine, faisant écho au Pop artistes américains et anglais qui emportent alors leur premiers succès internationaux. Restée en marge après les années 80′, la Figuration Narrative n’en est pas moins l’un des mouvements les plus importants de l’art contemporain en France. Il fut récemment honoré par une grande rétrospective d’ERRO présentée au Musée d’art contemporain de Lyon (du 3 octobre 2014 au 22 février 2015). Il l’est aujourd’hui par une rétrospective de Jacques MONORY aux Capucins de Landerneau (du 14 décembre 2014 au 17 mai 2015), une exposition d’Hervé TELEMAQUE au Centre Pompidou à Paris (jusqu’au 18 mai 2015) et le sera dans quelques jours sur le salon Art Paris et dans une vente aux enchères dédiée chez Cornette de Saint-Cyr. Une exposition consacrée à Gérard FROMANGER est par ailleurs annoncée au Centre Pompidou en 2016.
Quelle cote pour quel artiste ?
Les artistes français présentent notamment l’avantage d’être bien moins cotés que leurs homologues américains. Moins productifs, moins médiatiques et moins populaires, leur visibilité est surtout hexagonale, bien que des amateurs se profilent dans toute l’Europe et, dans une moindre mesure, aux Etats-Unis aussi. Pas question d’oeuvres millionnaires ici parce qu’il s’agirait d’artistes français ? Un tel constat serait fondé si nous parlions en devise euros seulement. En effet, bien que le fossé soit immense entre artistes français et américains (de plusieurs dizaines de millions de dollars pour les meilleurs œuvres…), la grand toile Comicscape d’Erró a tout de même été auréolée d’un coup de marteau équivalent à 1,056 m$ en 2007 (soit 1,23 m$ frais inclus chez Christie’s Paris), alors qu’elle était estimée pour moitié. Bien qu’il n’ait pas renouvelé avec un tel sommet, les hommages institutionnels ont suivi pour l’artiste, en passant par l’exposition Erro – 50 ans de collages, présentée au centre Pompidou de Paris en 2010, puis par la réunion récente de 500 œuvres au Musée d’art contemporain de Lyon.
Si la plupart des artistes plafonnent sous la barre des 150 000 $ (c’est la cas de Jacques MONORY, Gérard SCHLOSSER, Alain JACQUET, Eduardo ARROYO, Gérard FROMANGER, Ivan MESSAC), d’autres visent des seuils plus élevés. Le record d’Hervé Télémaque est certes ancien (2007), il tutoyait néanmoins les 450 000 $ au marteau (avec Portrait de famille, adjugé 305 000 €, soit plus de 447 000 $ et 537 000 $ frais inclus, Christie’s Paris). Cette œuvre, revendue sept années plus tard avec une décote de 20 000 $ prouve qu’il n’y a pas de spéculation forte sur ces signatures et que la demande est active. Le marché de la Figuration narrative se renforce depuis sept petites années où les prix à six chiffres se font récurrents. Plusieurs signes montrent que ce marché s’agite : en octobre 2014, Gérard Schlosser signait son deuxième résultat à plus de 100 000 $ (avec Il n’y a pas beaucoup de monde aujourd’hui, toile de 1970, adjugée 80 000 €, soit 102 000 $ chez Cannes Encheres) ; Peter KLASEN établissait un nouveau record équivalent à 116 000 $ en juin 2014 (Le bon magique, adjugée 86 000 € chez Cornette de Saint-Cyr, Paris) et surtout Valerio ADAMI venait culminer à 353 000 $ chez Versailles Enchères en avril 2014 (toile de 1966 intitulée Le Vasche Da Bagno, adjugée 255 000 €). L’artiste enterrait alors de 90 000 $ un précédent record d’enchère enregistré en 2013.
Tous les artistes affichent des cotes à la hausse avec, par ordre de croissance depuis 2000 : +83% pour Valerio Adami, +115% pour Peter Klasen, +117% pour Jacques Monory, +170% pour Gudmundur Erro, +491% pour Alain Jacquet , +538% pour Gérard Fromanger et enfin, une envolée impressionnante de +1 330% pour Hervé Télémaque.
Sur Art Paris Art Fair, dont l’ouverture est imminente (du 26 au 29 mars 2015 au Grand Palais), l’amateur trouvera des œuvres d’Yvan Messac proposées entre 5 000 et 10 000 euros sur le stand de la galerie Baudoin Lebon et des œuvres de Gérard Fromanger sur le stand de Caroline Smulders.
Après le salon, le 30 mars, la maison de ventes Cornette de Saint-Cyr fête le 50e anniversaire du mouvement artistique en proposant un ensemble d’œuvres choisies. La plupart des toiles sont estimées entre 10 000 et 25 000 euros en moyenne. Certaines dessins et photographiques sont quant à eux proposés entre 1 000 et 3 500 euros, de quoi rendre accessibles les signatures emblématiques.