Christie’s et Sotheby’s à Hong-Kong : état des lieux

[07/12/2008]

 

En 2007, la Chine redistribuait les cartes en devenant la troisième place de marché mondiale pour les ventes aux enchères. Pékin et Hong-Kong se sont rapidement imposées comme de nouveaux relais de croissance, théâtres d’investissements particulièrement agressifs ces deux dernières années. Les plus beaux coups de marteau de Pékin sont frappés chez Poly International Auction et China Guardian. A Hong-Kong, le marché est notamment animé par les auctionneers Sotheby’s et Christie’s, secouant le marché de l’art deux fois par an avec leurs vacations d’art moderne et contemporain asiatique : Sotheby’s ouvre le bal en avril et Christie’s ferme la danse en décembre. Cette année 2008 fut, pour les deux auctioneers, l’année des plus beaux espoirs et des plus grandes déceptions.

Christie’s et Sotheby’s étaient pourtant habitués à voir progresser leurs produits de ventes de Hong-Kong de quelques millions de dollars de plus tous les six mois. Entre avril et mai 2007, ils enregistraient plus de 120 millions de dollars, puis 173 millions entre octobre et novembre. Au printemps 2008, le résultat grimpait à 198 millions de dollars. Cependant, un premier signe d’alerte était décelable : Christie’s ravalait près de 20% des lots, contre un ratio habituellement situé entre 9 et 14%. En Automne, leur taux d’invendus a plafonné à 35% !

L’art contemporain asiatique, chinois en particulier, subi de plein fouet les effets pervers de deux années d’envolées spéculatives. Rappelons que le 9 avril 2008, Sotheby’s adjugeait 90% des œuvres issues de la collection Estella. Un collectionneur privé asiatique déboursait l’équivalent de 5,4 millions de dollars pour s’offrir l’œuvre la plus chèrement adjugée de ZHANG Xiaogang, intitulée Bloodline: The Big Family No.3. Six mois plus tard une seule des quatre toiles de ZHANG Xiaogang proposées par Sotheby’s trouvait preneur à Hong-Kong, sans être convoitée au-delà de son estimation basse (soit 2,75 millions de dollars, Bloodline: Big Family No.1). Au printemps 2008 toujours, le record mondial pour un artiste contemporain chinois était frappé pour ZENG Fanzhi. L’œuvre élue, le diptyque Mask series 1996 No.6 partait au quintuple de son estimation, à près de 8,6 millions de dollars chez Christie’s (67 millions de Hong-Kong dollars). Le 30 novembre 2008, Christie’s espérait réitérer ce bel exploit en misant à nouveau sur ZENG Fanzhi avec From the Masses, to the Masses. Cette œuvre, réalisée en 1993, était annoncée comme une “œuvre historique”, anticipatrice de la fameuse série des Masques, si disputée sur le marché. Annoncée comme œuvre phare de la vente d’art contemporain asiatique du soir pour une estimation tenue secrète, la star de l’art contemporain chinois ne rencontrait aucun acheteur ce soir là…Le lendemain, le taux d’invendus des œuvres contemporaines culminait à 43% chez Christie’s. Quant à l’art moderne, près de 52% des lots présentés le 1er décembre étaient ravalés. Seuls quelques collectionneurs privés asiatiques furent en mesure de porter de belles enchères sur des maîtres abstraits comme ZAO Wou-Ki et CHU Teh-Chun. Le plus beau résultat fut emporté par une abstraction de ZAO Wou-Ki avec Hommage à Tou-Fou, adjugé l’équivalent de 5,16 millions de dollars, un nouveau record pour l’artiste. Un réajustement s’opère mais les prix de l’art asiatique maintiennent un haut niveau, inimaginable il y a encore trois ans. Les premières enchères millionnaires furent en effet enregistrées en 2005 puis se sont accélérer en 2007 jusqu’au pic atteint au premier semestre 2008.

La crise économique mondiale a mis un terme à la frénésie spéculative, les collectionneurs deviennent plus prudents et plus exigeants, les fourchettes d’estimation fournies au printemps 2009 devront être révisées à la baisse.