Ces artistes que vous connaissez et qui se lancent dans les NFTs

[11/03/2022]

Il y a un an que les NFTs ont pris d’assaut le Marché de l’Art avec l’aide médiatique des grandes Maisons de Ventes, Christie’s tout d’abord, puis Sotheby’s et Phillips. Quelques galeries ont rapidement voulu s’y essayer et certaines, comme la Pace Gallery, ont été jusqu’à développer leur propre plateforme. La plupart d’entre elles cependant préfèrent encore attendre un peu, quand bien même leurs artistes ont déjà de grandes idées et se sont même pour certains lancés dans l’aventure.

Vhils, Delphic (2012). Affiche lacérée, arrachage, résine époxy. Vendue 39 300 $ le 5 mai 2019 ©Artcurial

.

thierry Ehrmann, Président et Fondateur d’Artmarket.com et de son département Artprice : « La tentation est grande pour les artistes de tester le nouveau marché des NFTs, porté par une croissance étourdissante et qui offre toutes sortes d’ouvertures sur la mode, sur la musique, sur les jeux vidéo, etc. Cependant, cet univers est régi par ses propres codes : pour y réussir il est nécessaire de pouvoir construire un ritable projet digital, rassembler une communauté de collectionneurs, rédiger des smart contracts, maîtriser des drops, etc. ».

Plusieurs de ces tâches logistiques incombent normalement à une galerie, mais jusqu’à présent elles sont prises en charge par les artistes eux-mêmes et leurs équipes, avec plus ou moins de succès.

 

Des grands noms de l’Art Contemporain

Adepte des collaborations avec les grandes marques, l’artiste japonais Takashi MURAKAMI a travaillé au cours des derniers mois avec le studio RTFKT, récemment acquis par la société Nike : « J‘ai senti que je pouvais apprendre beaucoup sur le métavers avec ces jeunes ». Fin mars 2021, Murakami avait publié 108 fleurs sur la plateforme OpenSea mais les avait retirées quelques jours plus tard. Fort de sa nouvelle collaboration avec RTFKT et ayant pu retravailler ses oeuvres ainsi que ses smart contracts, il est en passe de réaliser un nouveau drop de ses Murakami Flowers.

Urs FISCHER a lui aussi sorti une collection de NFTs dès le printemps 2021. Interrogé par le Wall Street Journal, son galeriste Larry Gagosian a pour sa part dit vouloir prendre le temps d’ explorer les enjeux de la technologie NFT avant de la commercialiser. Entre-temps, Damien HIRST a lui aussi lancé une collection de NFTs, nommée The Currency. Sur les traces d’Andy WARHOL (dont cinq créations digitales ont été vendues aux enchères par Christie’s sous forme de NFT en mai 2021), Damien Hirst a ainsi créé 10 000 œuvres à la frontière entre créations uniques et un investissement interchangeable, questionnant ainsi l’aspect non fongible des NFTs : « Quand l’art change et devient une monnaie, et quand une monnaie devient de l’art ».

 

Un temps d’avance pour la culture street art

Habitués à travailler avec mais aussi sans l’assistance de leur galerie, les artistes urbains sont un peu mieux armés pour se frayer un chemin dans la jungle des NFTs. La plupart d’entre eux évoluent d’ailleurs sous pseudo et ont commencé à travailler dans l’ombre, souvent pendant la nuit, tandis que leurs oeuvres n’étaient découvertes qu’au petit jour, avant de faire le tour du monde sur les réseaux sociaux. Autant de façons de faire que l’on retrouve avec les NFTs.

Le portugais VHILS, célèbre pour ses œuvres murales créées par enlèvement de matière au burin ou à l’explosif, fait certainement partie de ceux qui maîtrisent au mieux les codes digitaux. Très actif sur Twitter, Discord et Instagram, il compte déjà une dizaine de collections sur la plateforme Nifty Gateway. Ses créations éphémères trouvent ainsi une seconde façon d’exister dans l’espace numérique. Il est désormais possible d’acquérir les vidéos de ses explosions ou les « détritus » qui en résultent.

Vhils imagine d’ailleurs utiliser l’une des caractéristiques même des NFTs, le burn : opération qui consiste à effacer le contrat de la Blockchain et fait quelque part écho à la pratique artistique de l’artiste. « À travers le burning, les détenteurs de NFT de mes drops précédents peuvent les échanger contre de nouveaux et plus rares. Ce processus permet aux collectionneurs de mon travail de l‘influencer, en choisissant quelles pièces survivent et lesquelles périssent » .

Faile et Futura 2000, deux autres street artistes de la galerie Danysz, ont eux aussi déjà minté des tokens sur la plateforme Nifty Gateway. C’est aussi le cas de D*Face, de Mr Doodle ou encore de Kenny Scharf.

 

Les novateurs

Daniel ARSHAM a très tôt vu de son côté la possibilité d’étendre son univers dans le Métavers grâce à une collaboration avec le studio SixN.Five. En mai 2021, ils ont lancé ensemble une Open Edition intitulée Eroding and Reforming Bust of Rome (One Year) : 671 NFT ont été mintés pour un prix de lancement de 1,500$, alors que le prix bas atteint aujourd’hui 4 900$. Représenté par la galerie Perrotin, Daniel Arsham a déjà réalisé six autres séries de NFT en édition plus ou moins rares, depuis l’oeuvre unique Eroding and Reforming Venus of Arles (72.6 Years) jusqu’à une édition en 200 exemplaires, appelée Eroding and Reforming 356.

Parmi les propositions d’artistes contemporains jouant le mieux les codes des NFTs, le projet Rocket Factory est sans doute des plus remarquables. L’artiste Tom SACHS, représenté par la galerie Thaddaeus Ropac, a inventé 1 000 fusées formées de trois parties (nose cone, body et tail assembly) qui peuvent être achetées séparément et recombinées pour créer une fusée complète. Celle-ci peut alors décoller : les trois parties sont effacées et remplacées par une nouvelle fusée, pendant qu’une copie réelle est réalisée par Tom Sachs et envoyée dans les airs : « Le NFT de la fusée complète, sa jumelle physique (si récupérée) et la vidéo documentant le lancement forment une Sainte Trinité ».

Malgré les problèmes liés à la sécurité des collections dans les portefeuilles électroniques et à l’origine des NFTs sur les plateformes d’échange (à commencer par OpenSea), un nombre croissant d’artistes contemporains voient ainsi dans la technologie NFT une formidable opportunité de faire vivre toute une partie de leur œuvre qui ne pouvait s’échanger auparavant et inventer de nouvelles créations dans le Métavers.