Bilan du premier semestre

[30/08/2011]

 

Alors que la crise de la dette se propage et amplifie la panique sur les marchés financiers et que la croissance économique est au ralenti au premier semestre 2011, le marché de l’art vient de connaître son meilleur premier semestre de tous les temps.

Avec un produit des ventes Fine Art sur le premier semestre avoisinant les 6.3 milliards de dollars, le marché de l’art dépasse les sommets atteints en 2007/2008. Plus qu’un premier semestre d’exception, l’année 2011 est déjà assurée, en un semestre, de réaliser plus de ventes qu’en 2009.
Comparé au premier semestre 2010, le produit des ventes sur le marché de l’art croit de 34%, une croissance exceptionnelle dopée par l’essor du marché chinois et des choix structurels d’un marché séculaire.

En 2010, la Chine se révélait être la première place de marché au monde pour le Fine Art, au premier semestre 2011, cette position se confirme. Avec un produit des ventes de 2.2M$, la Chine se place encore devant l’Angleterre et les Etats-Unis (dont le produit des ventes est respectivement de 1.6 et 1.4 milliards de dollars). Alors qu’il y a encore quelques mois Christie’s et Sotheby’s se partageaient 72% du marché en 2008, au premier semestre, le duopole historique perd encore des parts de marché avec 53% du marché. Pour autant, les deux maisons de ventes ont beau peser plus lourd, les gains ne sont pas suffisants pour conserver leur leadership face au marché chinois : 7 des 10 premières maisons de ventes du monde sont désormais localisées en Chine, la concurrence empiète sur l’ordre des 40 dernières années.

Les stratégies de sortie de crise des maisons de ventes en 2009 continuent de payer. La fin des prix garantis, et le rapprochement de l’offre et la demande se répercutent sur un taux d’invendus historiquement bas sur le premier semestre. Avec seulement 34% des lots restant entre les mains des auctioneers, c’est encore moins que les 35% de 2006 quand le marché de l’art, en pleine frénésie spéculative, écoulait tout ou presque à des prix jugés alors excessifs. Les ajustements du marché de l’art s’observent aussi sur les gammes de prix abordables en adéquation avec la demande. Au premier semestre 2008, seulement 66% des lots étaient estimés à moins de 5 000$, lors du premier semestre 2011, plus de 72% des lots étaient proposés sous ce seuil.
Les estimations hautes séduisent aussi la demande, alors qu’il y a 3 ans, 73% seulement des œuvres proposées au-delà du million de dollars trouvaient preneurs, plus de 84% des œuvres estimées un million ou plus se sont vendues sur les six premiers mois de l’année 2011. Au total, de janvier à juin, pas moins de 944 œuvres franchirent le seuil symbolique du million de dollars, c’est 200 de plus que le premier semestre 2008, jusqu’ici le semestre le plus prolifique sur le marché de l’art.

En 2008, les prix de l’art étaient dopés par la frénésie financière, quelques mois après que les marchés financiers s’écroulent, le marché de l’art dévissait, les prix chutant de 31% en 16 mois. Il aura fallu l’émergence de la Chine, des stratégies agressives des maisons de ventes, pour faire revenir les acheteurs. Sans parler de spéculation, les prix de l’art ont augmenté de 36% depuis 2009, et de 15% sur le seul premier semestre 2011. En 2008, les prix étaient tirés par les artistes d’après-guerre et contemporain, depuis 2009, les acheteurs ont tourné leurs préférences vers les artistes Modernes et du XIXème siècle. Ainsi en 2011, sur les 100 plus belles enchères, seules 8 étaient frappées pour des œuvres contemporaines, alors qu’en 2008, 15 des 100 enchères les plus élevées étaient atteintes par des œuvres signées Jeff KOONS, Damien HIRST, Takashi MURAKAMI et les autres stars contemporaines.

Autre effet de la domination des ventes d’art en Chine, la présence en tête du classement provisoire sur le premier semestre des 100 artistes les plus cotés, de deux artistes chinois en tête du podium. Ainsi ZHANG Daqian et QI Baishi arrivent respectivement premier et second avec 360m$ et 274m$, juste devant le leader historique Pablo PICASSO (sur les dix dernières années il arriva en tête neuf fois). Au premier semestre 8 des 15 premiers artistes étaient chinois. Zhang Daqian réalise en un semestre quasiment le même produit des ventes aux enchères que Pablo Picasso lors de l’année 2010 dans sa totalité.

Alors que le marché démontre de plus en plus de similitudes avec le marché en 2008, les ajustements structurels du marché de l’art seront-ils suffisants pour endiguer la corrélation des prix de l’art aux prix en chute des actifs financiers. Le second semestre s’est amorcé cet été sous de bons augures avec le succès des ventes Old Master en Juillet à Londres, le mois de septembre devrait donner le ton après la chute estivale des bourses mondiales et la crise macro-économique de la dette.