Biennale de Venise : le prix du Lion d’Or

[08/06/2009]

 

La Biennale de Venise ouvre sa 53ème édition au public le 7 juin 2009. Elle présente, six mois durant, un panorama mondial de l’art contemporain réparti en pavillons représentant les artistes et les pays invités. Initiée en 1895, la Biennale est un rendez-vous plus que centenaire au cours duquel une poignée d’artistes est récompensée. Les Lions D’or décernés au compte-gouttes constituent-ils un tremplin pour la cote d’un artiste ?

A l’issue de la première édition, deux artistes furent couronnés : Giovanni SEGANTINI et Francesco Francesco Paolo MICHETTI. Plus d’un siècle après leurs récompenses, ces deux peintres aguerris en portraits et scènes de genre ne sont pas des oubliés du marché. Quelques enchères ont d’ailleurs dépoussiéré la cote de Francesco Paolo Michetti en 2008, avec à la clef un record pour Ritorno dai campi, une toile exécutée vers 1875 qui représente une jeune bergère guidant sont troupeau sous un ciel lourd. L’œuvre se vendait 110 000€ le 18 nov. 2008 chez Finarte à Milan, propulsant son chiffre d’affaires annuel de près de +400%. Si les lauréats italiens de l’époque affichent un marché localisé sur leur pays d’origine, il en est autrement depuis 1907, année qui signe l’internationalisation de l’événement. Depuis les années 1980, les lauréats du Lion d’Or sont des artistes venus de tous horizons, dont certains comptent désormais parmi les mieux cotés de la planète tels que Jasper JOHNS (1988), Antoni TAPIES (1993), Gerhard RICHTER (1997) ou CAI Guoqiang (1999).

Les artistes sélectionnés pour l’événement ont déjà une réputation dans le milieu mais pas toujours de cote sur le second marché. On constate que le Lion d’Or agit comme un label avec un effet rapide sur l’ascension de la cote en salles des ventes. L’artiste français Pierre HUYGHE par exemple, n’avait que deux maigres adjudications à son actif en 2000, frappées autour de 200€ dans une province du Nord de la France (à Armentières, pour des huiles sur bois : les Glaneuses). Passé 2001 et son Lion d’Or, la présence de Pierre Huyghe sur le second marché gagnait Paris et les grandes salles de ventes (Cornette de Saint-Cyr, Christie’s), puis une enchère à 32 000€ pour un tirage offset sur carton intitulé Rue Longvic, Dijon dispersé chez Christie’s le 26 avr. 2006. Depuis 2008, son marché s’élargit en intégrant les catalogues de ventes de Phillips de Pury & Company et Christie’s Londres. Il en est de même pour l’iranienne Shirin NESHAT primée en 1999 et adjugée pour la première fois l’année suivante au quadruple de son estimation (Untitled (Woman Clasping Rifle)), 16 000$, Sotheby’s , New York, 18 mai 2000).

Gerhard Richter, classé en 7ème position du Top10 d’Artprice en 2008, exposait déjà à la Biennale de Venise et à la Documenta de Cassel en 1972. Il fallut attendre les années 80 pour que sa cote soit soutenue. L’année de l’obtention de son Lion d’Or en 1997, son meilleur coup de marteau culminait à 410 000£, soit 677 000$ (Reisebüro (Tourist Office)), Sotheby’s, Londres, 26 juin 1997). La décennie suivante, sa cote grimpait en flèche : +450% de hausse enregistrée entre 1998 et 2008 et cinq enchères de plus de 10M$ frappées sur la seule année 2008 !

L’un des artistes chinois les plus prisés de la planète, Cai Guo-Qiang fut récompensé en 1999 avant la flambée des prix de l’art contemporain chinois (+255% entre janvier 2005 et janvier 2008). L’obtention du prix vénitien fut suivie par sa première apparition aux enchères le 15 octobre 2000, dans l’antenne Christie’s située à Taipei. A l’époque, un dessin à la poudre de canon monumental (305×403 cm) triplait son estimation pour une enchère gagnante équivalent à 95 000$. En 2007 et 2008, les dessins de cette envergure s’échangeaient entre 400 000$ et 800 000$. Il signait même un record de 8,4M$ pour une série de 14 dessins dispersée en 2007 par l’antenne chinoise de Christie’s.
L’artiste primé en 2009 est l’Allemand Tobias REHBERGER, une récompense bienvenue pour relancer une demande éteinte depuis 2006. L’ancien élève de Martin KIPPENBERGER n’a en effet emporté aucune enchère notable depuis les 13 000£ de ses sculptures lumineuses sans titre dispersées chez Sotheby’s Londres (13 octobre 2006).

Outre la présence d’artistes venus d’Europe, d’Amérique du Sud ou d’Asie, la Biennale de Venise s’est ouverte au continent africain pour la première fois en 2007. En 2009, elle a ouvert encore les frontières notamment avec un pavillon dédié aux Emirats-Arabes Unis. Gageons que les artistes émiratis sélectionnés pour Venise seront présents dans les prochains catalogues de Christie’s et Bonhams, récemment installés à Dubai (respectivement en 2006 et 2008).