Marché des maîtres anciens : Raphaël vs Wu Bin

[15/12/2009]

 

Après deux jours de ventes de prestige pour l’art ancien à Londres, Christie’s sort gagnant face à Sotheby’s avec 99,4M$ de produit de ventes contre 20,7M$ et quatre records mondiaux, dont celui de Raphaël qui déclasse le record du chinois Wu Bin.

Les résultats du 8 décembre 2009 sont au-delà des espérances de Christie’s qui enregistre quatre records historiques : le meilleur résultat pour une vente d’art ancien, le record mondial pour un dessin ancien avec Head of a muse de Raphaël adjugé 26 M£ (l’œuvre est également seconde sur le podium des meilleures ventes en peinture ancienne), un nouveau sommet pour REMBRANDT VAN RIJN (Portrait of a man with arms akimbo vendu dans sa fourchette d’estimation à 20M£) et pour Domenico ZAMPIERI (9,2M£ soit 13,5M$, Saint John the Evangelist).
Le lendemain, les deux temps forts annoncés chez Sotheby’s n’emportaient pas tout le succès escompté. Si le self-portrait d’Antony van Dyck doublait son estimation pour un record de 8,3M£, l’œuvre de Peter Paul RUBENS, Portrait of a Young Woman, half-length, holding a Chain, fut ravalée contre une estimation basse de 4M£. Rappelons que Rubens détient toujours le plus beau coup de marteau de l’art ancien avec le Massacre des innocents frappé l’équivalent de 69,7M$ le 10 juillet 2002 chez Sotheby’s.

Les sommets de RAPHAEL et Anthonius VAN DYCK à l’appui, la rareté se paie au prix fort, d’autant qu’il est de plus en plus difficile pour les auctioneers d’offrir des œuvres de qualité irréprochable. Les 42% de lots ravalés chez Sotheby’s (contre 35% chez Christie’s) le prouvent. Afin de gonfler son catalogue d’art ancien cette année, Christie’s ajoutait d’ailleurs des peintures du XIXème. Mais tandis que l’offre européenne s’assèche, les maîtres chinois gagnent de plus en plus de terrain.

TOP 10 Adjudication : Dessin ancien

Dessin ancien : la Chine gagne du terrain

Le doux visage de muse par Raphaël a certes frappé un record absolu à 26M£ cependant, deux semaines avant ce coup de marteau historique, le record était détenu par un maître chinois, WU Bin, spécialiste du paysage ayant exercé sous la dynastie Ming. Le Vieux Continent s’est imposé comme le vivier mondial de l’art ancien et le berceau des œuvres les plus valorisées, jusqu’en octobre 2008. Depuis, le marché de l’art ancien s’est transformé en profondeur… Le 8 octobre 2008 en effet, un premier dessin chinois se hissait dans le Top 10 des records mondiaux (JIN & LANG Kun & Shining, The Emperor Qianlong’s review of the Grand Parade of Troops, 7,7M$, Sotheby’s Hong-Kong). L’année suivante, cinq maîtres chinois avaient gagné le Top10, déclassant MICHELANGELO, LEONARDO DA VINCI, ANDREA DEL SARTO, Francisco José DE GOYA Y LUCIENTES, William BLAKE ou Rembrandt que l’on pensait indélogeables !

Ce bouleversement du marché tient à de retentissants coups de marteau frappés à Pékin et à Hong-Kong en mai, juin et novembre 2009 (chez Poly International Auction, Beijing Council International Auctions et Sotheby’s Hong Kong). Le 22 novembre 2009, la vacation chez Poly International enregistrait trois des vingt plus belles enchères mondiales. Point culminant de la vente, une fresque de près de six mètres de Wu Bin, Eighteen arhats, quintuplait son estimation haute pour une adjudication équivalente à 22,1M$. Un second record fut frappé à 97 millions de yuan, soit 14,2 M$ pour la calligraphie Letter leaf de ZENG Gong (Song Dynasty, 960-1279) et un troisième à 24 millions de yuan, soit 3,5M$, pour le rouleau Landscape and Calligraphy de SHI Tao (1642-1707). Durant quelques jours, Wu Bin et Zeng Gong emportaient les deux plus belles enchères mondiales du dessin ancien.

Après le boom de l’art contemporain chinois, le prix des œuvres traditionnelles explose. Cette montée en puissance est à surveiller de près car bien que le marché soit local, il est amené à s’internationaliser, notamment par le biais de Christie’s et Sotheby’s.