En Bref : Le Sphinx de Delft au Louvre – Photographies Collection Claude Berri – Art et climat en force à Marrakech

[18/11/2016]

Le Sphinx de Delft arrive au Louvre

L’un des joyaux du musée du Louvre est une peinture hollandaise, La Dentellière de Jan VERMEER VAN DELFT (1632-1675), que Renoir considérait comme le plus beau tableau du monde avec le Pèlerinage à l’île de Cythère de Watteau. Un autre Vermeer, parmi les plus célèbres, orne les collections permanentes du Louvre : L’Astronome, ce savant observé la main posée sur un globe céleste, recevant une lumière douce de sa fenêtre. L’énigmatique Sphinx de Delft, comme le surnomma Théophile Thoré-Bürger à qui l’on doit la redécouverte de l’artiste au XIXème siècle, est aussi célèbre que confidentiel, précieux que rare. L’artiste créait ses scènes intimistes, bercées d’une douce lumière, sans heurts, à un rythme apaisé, ne réalisant pas plus de trois toiles par an. Sa production est donc ténue, ne dépassant pas une cinquantaine de tableaux en 20 ans de création. Il est rare de voir rassembler plusieurs chefs-d’oeuvres en France… l’exposition que lui consacre le Louvre du 22 février au 22 mai 2017 est donc un événement à ne pas manquer. Organisée en partenariat avec la National Gallery of Ireland de Dublin et la National Gallery of Art de Washington, elle réunit les grands chefs-d’œuvre de l’artiste et de ses contemporains les autres maîtres de la peinture de genre du Siècle d’or : Gérard Dou, Gerard ter Borch, Jan Steen, Pieter de Hooch, Gabriel Metsu, Caspar Netscher ou Frans van Mieris.

Le principe de rareté de Vermeer s’applique plus encore sur le marché que dans les musées. Ce principe jouant évidemment sur sa cote, l’une des plus importantes dans le secteur des Maîtres anciens. Le 7 juillet 2004, chez Sotheby’s à Londres, une petite peinture de 25 centimètres de haut, Young Woman seated at the Virginals, flirtait avec les 30 m$, contre une estimation inititale de 5m$. Les estimations ne veulent plus dire grand chose pour de petits bijoux historiques de la sorte, surtout lorsque l’artiste reste absent du marché plus de 80 années… Ce qui fut le cas l’époque de la vente de Young Woman seated at the Virginals. Il y a deux ans, Christie’s est parvenu à mettre en vente une toile ancienne, Saint Praxedis (1655), authentifiée après des années de recherches et de débats. Son style éloigné de celui de pleine maturité de Vermeer en fit une œuvre bien moins onéreuse : 10,7 m$ malgré un format quatre fois plus imposant que l’oeuvre de 2004.

Photographies – la Collection Claude Berri

En marge du salon Paris Photo qui s’est déroulé au Grand Palais mi-novembre, Christie’s dispersait un nouveau volet de la collection Claude Berri, l’un des plus importants collectionneurs français. La vente du 12 novembre dernier témoignait en effet d’un aspect plus confidentiel de sa collection : l’intérêt qu’il porta au domaine de la photographie à partir des années 1990. Une partie de cette superbe collection fut dévoilée il y a 13 ans lors des Rencontres de la photographie à Arles (Icônes. Photographies de la collection Claude Berri, 2003) rendait déjà compte d’un regard sensible porté sur la photographie d’avant-garde et surréaliste. La vente aux enchères de Christie’s révéla aussi l’élargissement de sa passion à quelques grands artistes actuels. La dispersion du 12 novembre comprenait ainsi six épreuves de Brassai, cinq de Sugimoto, quatre de Nan Goldin, trois de Louise Lawler, de Charles Nègre, de Thomas Ruff, deux de Molinier, ainsi que des œuvres signées Alexander Rodchenko, Raoul Ubac, Roni Horn, John Coplans, Eugène Atget… Le fruit de 45 lots vendus (sur une soixantaine) porte le résultat à 820 750 euros. Clou absolu de cette dispersion : le lot 43, un ektachrome sous caisson lumineux de l’américain Jeff WALL, intitulé Rear view, open air theatre, Vancouver, une œuvre de près de trois mètres inspirée du tableau de Paul Cézanne Le pont de Maincy (1879), fut cédée pour 290,500 euros, soit 317 000$. Ce sujet de Wall affrontait pour la première fois les enchères. Les trois épreuves de Louise LAWLER se classent parmi les 10 meilleures enchères de la vente, avec des résultats compris entre 20 000 et 74 500 euros (entre 22 000 et 81 000 $). Et puisque le meilleur de la photographie offre une large gamme d’oeuvres accessibles pour moinde 3 000 euros, quelques amateurs ont pu apporter chez eux des épreuves de Charles Nègre, Aaron Siskind, Yann Charbonnier et de Jan Groover entre 1 200 et 3 000 euros… quelques feuilles d’autant plus intéressantes et émouvantes que l’est leur provenance.

Art et climat en force à Marrakech

En marge de la conférence sur le climat organisée en novembre à Marrakech, le Musée d’art contemporain africain Al Maaden (MACAAL), premier musée du Maroc dédié à l’art du continent, inaugurait sa première exposition : Essentiel Paysage, réunissant 80 œuvres de 40 artistes africains autour de cinq séquences (Nature contée, L’arbre de la vie, L’homme et la Mer, Recycler/ Résister et Nature en devenir). S’appuyant sur l’actualité des débats sur les changements climatiques, cette première exposition apparaît comme un engagement fort de la part de son organisatrice, La Fondation Alliances, qui s’applique à valoriser l’art du continent africain dans toute sa diversité, ainsi qu’à éveiller les consciences par le biais de la création. Les fondateurs d’Alliances, Farida et Alami Lazraq, sont des mécènes et des collectionneurs engagés, dont la collection rassemble plus de 2000 œuvres qu’ils souhaitent partager avec le public. Une partie de cette collection est dévoilée dans le cadre de l’exposition Essentiel Paysage qui se prolonge jusqu’en mars 2017. Farida et Alami Lazraq ont puisé dans leur ensemble exceptionnel avec la complicité de Brahim Alaoui, commissaire de l’exposition, pour offrir au public des œuvres de Leila Alaoui, Farid Belkahia, Amani Bodo, Cheri Cherin, Mohamed El Baz, Mounir Fatmi, Romuald Hazoumé, Yazid Oulab, Chéri Samba, Pascale Marthine Tayou Barthélémy Toguo ou Billie Zangewa. Cette exposition est un signal fort, prouvant que la ville de Marrakech, portée par sa biennale (6ème édition en 2016) et par le projet du Parc de sculpture Al Maaden dédié aux sculptures monumentales, s’érige de plus en plus fermement en destination culturelle.