André Derain (1880-1954)

[24/03/2003]

 

Malgré un regain d’intérêt pour les tableaux postérieurs ou les sculptures, l’écart demeure manifeste entre l’artiste fauve et « l’autre » Derain. Son marché a été relancé par la vente de l’atelier en mars 2002

Suivi par certains des plus grands marchands – Vollard, Kahnweiler puis Guillaume –, qualifié par André Lhote de «plus grand peintre français vivant», condamné à l’ostracisme suite à ses prises de position contre la superficialité des mouvements d’avant-garde et à son voyage en Allemagne durant l’Occupation, André Derain suscite des jugements contrastés. Derain entame une formation classique à l’atelier Carrière. En 1900, il rencontre Vlaminck avec lequel il partage l’atelier « La Baraque » à Chatou. Ensemble, ils se passionnent pour l’art africain. Avec Matisse, il passe l’été 1905 à Collioure, un séjour méditerranéen pendant lequel il développe le goût des couleurs saturées. À son retour, il expose au Salon d’automne dans la fameuse « cage aux fauves ». En 1908, installé à Montmartre, il fréquente les cubistes du Bateau-Lavoir : Picasso, Braque, … Assimilant la leçon cézanienne, il l’associe aux influences primitivistes dans un style souvent qualifié de « byzantin », en raison de ses figures hiératiques, étirées. Après la guerre, à laquelle il participe, le succès est au rendez-vous. Sa première exposition personnelle à la galerie Paul Guillaume est organisée en 1916. Inspiré par les maîtres anciens, il peint portraits, natures mortes et paysages. Une activité qu’il mène de front avec un travail de décorateur pour les Ballets russes ou pour l’Opéra. Avec ses nombreuses expositions, la dernière décennie a permis une appréciation moins dogmatique du travail de Derain.

Que trouve-t-on aux enchères ?

André DERAIN avait déjà une forte cote en son temps. Ce qui s’est affirmé après sa mort, c’est la différence entre ses œuvres. De son vivant, on pouvait payer très cher pour un portrait ou un nu, postérieurs à sa période fauve … Mais, aujourd’hui, ces toiles peintes en grand nombre et parfois sur commande intéressent moins. En revanche, les toiles fauves sont devenues très chères. Elles suscitent toujours plus de passion. Sept des dix plus fortes adjudications des dix dernières années concernent des tableaux des années 1905 à 1907. Certaines toiles de cette époque peuvent s’échanger plus d’1 million d’euros tandis que 80% de ses tableaux sont adjugés moins de 100 000 euros. Ces dix dernières années, sa toile la plus chère reste Barques au port de Collioure (c.1905), adjugée 2,4 millions de dollars chez Christie’s New York en novembre 1993. Cependant, le reste de son œuvre est progressivement reconnu, à l’instar des sculptures (13% du volume de ventes). Derain a travaillé le bois, la pierre et la terre dès 1906. Si les originaux s’envolent parfois à 150 000 euros, la plupart des pièces disponibles sur le marché sont des bronzes fondus à la demande de son épouse. Ses dessins sont abondants et prisés. Représentant 59% des transactions, ils s’adjugent aux alentours de 1500 euros. Tout comme pour les toiles, ce sont les œuvres réalisées à Collioure qui se vendent le mieux.

Les places de marché

Son marché est situé en France. 80% des échanges s’y déroulent pour 58% du chiffre d’affaires. De nombreux dessins sont proposés en province mais les plus belles pièces continuent à se vendre à Paris. Quant aux toiles fauves exceptionnelles, il faudra aller les chercher à New York ou à Londres.

Acheter / vendre

Entre 1997 et 2001, le prix des œuvres de Derain a progressé de 55%. Mais les 23 et 24 mars 2002, la vente d’atelier, organisée à Saint-Germain-en-Laye par Loiseau, Schmitz et Digard, avait de quoi déstabiliser le marché. Il s’agissait de la succession de Raymonde Kanublich, la mère du fils de Derain, Bobby. Certes ce n’était pas la totalité du fonds d’atelier, mais jamais autant de dessins de l’artiste n’avaient alimenté le marché. La dispersion de plus de 4 000 dessins ne l’a pas écroulé – la provenance directe de l’atelier avait de quoi séduire les amateurs les plus exigeants ! De nombreuses feuilles ont même quintuplé leur estimation. Certes, leur cote s’est quelque peu infléchie par rapport à 2001, mais elle reste bien supérieur eau niveau de 2000. Celle des toiles est restée stable. Les lots se sont globalement bien vendus en 2002 : 91% des dessins ont trouvé preneur. Il semblerait même que cette vente d’exception a donné un coup de fouet au marché… Aurait-elle suscité de nouvelles collections ? Une demande aussi soutenue limite les risques de mévente.

    André DerainArtprice Index toutes catégories, base 100 en janvier 1997, devise : EUR   André Derain Nombre de lots vendus aux enchères   André Derain Parts de marché Répartition par pays du chiffre d’affaires réalisé entre 1999 et 2002 © Artprice