Suite de l’interview de Thierry Ehrmann, PDG d’Artprice.com (9 Octobre 2011)

[09/10/2011]

 

Boursica : Depuis notre interview de début juin, de nombreux événements ont marqué l’actualité d’Artprice et les marchés financiers.
Nous avons beaucoup de questions auxquelles nous aimerions des réponses précises de votre part.
En premier lieu, pourquoi, selon vous, l’interview exclusif de Boursica en Juin 2011 sur Artprice présenté en plusieurs langues sur Google, avec plus de 210 000 résultats à ce jour, a fait l’objet d’un tel intérêt du public ?
(Interview de Juin 2011)

Thierry Ehrmann :
Je pense tout simplement que les actionnaires français sont exaspérés des communiqués politiquement corrects pour lesquels il faut une formation bac+9 pour décrypter les messages des sociétés cotées sur le marché réglementé.
Relisez attentivement le 1er interview et vous verrez, qu’en racontant simplement, avec un parler vrai, l’histoire atypique et hors du commun d’Artprice, de sa création ex-nihilo pour devenir en 14 ans le leader mondial de l’information sur le marché de l’art, vous comprendrez ainsi qu’il y a avant tout, une aventure humaine extraordinaire et une équipe hors du commun, un projet titanesque considéré presque comme une utopie, qui est devenu désormais une réalité implacable, qu’utilise chaque jour les 1,3 million membres d’Artprice ainsi que des millions d’utilisateurs gratuits qui tôt ou tard achèteront l’information payante sur Artprice le moment propice.

Boursica : En relisant le 1er interview, on s’aperçoit que l’histoire d’Artprice est aussi une suite ininterrompue de combats judiciaires hors normes, l’histoire n’est donc pas seulement idyllique ?

Thierry Ehrmann :
Il est vrai que l’histoire d’Artprice est parsemée de nombreuses guerres judiciaires sur les différents continents. On n’accède pas au monopole du plus vieux marché du monde qu’est l’Art sans hélas, des fleuves de sang. Mais dans cet interview, on met aussi en lumière qu’on ne peut pas appréhender un groupe simplement par ses comptes, bilans et annexes, notamment en 2011, où l’immatériel et la propriété intellectuelle deviennent selon le célèbre Paul Getty, le pétrole du 21ème siècle. Les normes IFRS n’appréhendent pas encore de nombreux indicateurs humains, financiers et scientifiques qui pourtant, sont fondamentaux pour décrypter un groupe comme Artprice.

Boursica : Ces propos visent uniquement les petits porteurs mais certainement pas les professionnels de la finance !

Thierry Ehrmann :
Détrompez vous ! Vous n’imaginez pas le nombre de gérants de fonds, banquiers d’affaires et analystes financiers qui m’ont avoué qu’ils avaient enfin eu, avec cet interview, la véritable perception qu’ils n’avaient pas perçu dans son intégralité, dans nos 10 années de document de référence et d’informations réglementées. Il est possible un jour qu’Artprice soit l’objet d’une session à la SFAF (Société Française des Analystes Financiers).

Boursica : Donc selon vous, les sociétés cotées sur le marché réglementé sont victimes de la langue de bois ?

Thierry Ehrmann :
L’information réglementée, contrairement à des idées reçues, permet de dire beaucoup plus de choses que l’on imagine. Que certaines sociétés cotées arrêtent de pester contre l’AMF ou autres Autorités de régulation. Simplement les sociétés émettrices sont victimes de ce qu’on appelle en presse écrite l’auto-censure. Qui peut aujourd’hui acheter des actions sur une publication trimestrielle dénuée de toute réalité concrète. Un très bon exemple nous est donné avec les communiqués de certaines banques, notamment sur leurs stress tests et leurs expositions aux risques où l’on s’aperçoit, qu’en moins de trois mois, leurs communiqués disent tout et son contraire …

Boursica : Alors que doivent faire les dirigeants ?

Thierry Ehrmann :
Il appartient aux dirigeants d’avoir une relation intègre et presque charnelle avec le marché et les actionnaires. Bien sûr, cela implique du temps, de l’endurance et la gestion des retours parfois passionnels, mais c’est la règle du jeu. Toute communication franche, passionnée et entière entraîne mécaniquement des désinhibitions d’actionnaires ou de gérants de fonds qui subissent le diktat des communiqués stériles et qui de facto, se lâchent parfois avec Artprice.

Boursica : Revenons à la loi du 20 juillet 2011 qui adopte la Directive Services européenne en droit interne, et notamment sur les enchères électroniques en ligne. Où en êtes vous ?

Thierry Ehrmann :
Elle représente pour nous une immense victoire après onze années de chemin de croix législatif, de lobbying Européen et une guerre sans pitié contre un tout petit nombre d’individus d’une caste qui était persuadé de perpétuer ce monopole, né en 1556, au 21ème siècle. Tous les coups les plus tordus nous ont certes fatigués, mais ont renforcé notre certitude que nous détenions, avec la place de marché normalisée d’Artprice et les logs de comportement de nos 1,3 million membres dans le respect des lois européennes sur les données personnelles, une part très importante du marché de l’art mondial. La plainte diligentée par Artprice pour entente illicite devant l’Autorité de la Concurrence est en cours d’instruction avec des pièces confondantes pour les adversaires. Des rebonds sont à attendre prochainement.

Boursica : Cet acharnement d’un petit nombre des membres de cette caste, selon vos propos, naît-il d’un raisonnement économique ou de la perte d’un rang social ?

Thierry Ehrmann :
Une vieille règle édicte que le degré d’agressivité de l’adversaire vous donne, en temps réel, la distance à parcourir pour rentrer dans la salle des coffres où il règne en maître. De ce point de vue, avec 126 procès dont 117 gagnés sur différents continents (voir le 1er interview), notre religion a été faite sans l’ombre d’un doute que nous étions extrêmement proches de détenir, en toute légalité, ce monopole, sans pour autant constituer un abus de position dominante. Pour résumer les guerres contre la vieille garde de la caste, le roman “Le Guépard” de Tomasi de Lampedusa est la parfaite adaptation de ce que nous avons vécu.

Boursica : Cette loi est donc applicable depuis le 1er septembre 2011. Pourquoi attendre ?

Thierry Ehrmann :
Effectivement, le 1er septembre 2011 est la date d’application de la loi mais je vous invite à lire l’article 5, où nous sommes dans l’attente, d’un arrêté conjoint du Ministère de la Justice et du Ministère de la Culture, relative à la circulation des biens culturels. Cet arrêté arrivera prochainement. Il est bon de préciser qu’un arrêté ne fait l’objet d’aucun débat législatif et comme son nom l’indique, permet juste de définir des modalités. Il n’existe donc aucun risque qu’un tiers puisse ralentir de quelques manières que ce soit ce communiqué unilatéral.

Boursica : Certains de nos membres nous ont parlé du Figaro qui partait dans les ventes aux enchères.

Thierry Ehrmann :
Rien de neuf, je vous rappelle que la famille Dassault est à la fois propriétaire du Figaro et d’une des principales Maisons de Vente françaises, Artcurial. Depuis des années, le Figaro a des pleines pages de promotion pour Artcurial. Il était donc normal que le Figaro, sous sa propre marque, pousse les enchères vers entre autres les maisons de vente du Groupe mais le Figaro, en tant que personne morale, n’est pas opérateur au sens de la loi du 20 juillet 2011. Je vous rappelle qu’Artprice dans le cadre d’un partenariat, fournit la quasi intégralité des données et textes depuis plusieurs années pour le hors série Figaro Beaux Art – Guide du marché de l’art.

Boursica : Concrètement, les enchères sur Artprice vont se dérouler comme par exemple sur eBay ?

Thierry Ehrmann :
Absolument pas ! Et ce, pour une multitude de raisons : l’enchère moyenne se situant, selon nos études, autour de 12 000 euros, ceci implique une approche juridique et commerciale fondamentalement différentes. Notre principe réside avant tout sur des membres parfaitement identifiés, avec des œuvres où les acheteurs peuvent utiliser à tout moment, sur l’ensemble de nos pages, grâce à notre accord , INTERPOL’s Stolen Works of Art database, permettant à la clientèle d’Artprice de vérifier si l’oeuvre présentée fait l’objet d’une poursuite judiciaire.
A contrario de services de ventes aux enchères grand public et notoirement connus, Artprice impose à sa clientèle une présence judiciaire permanente qui donne, selon moi, la confiance nécessaire au bon déroulement de sa Place de Marché Normalisée en tant qu’opérateur de courtage aux enchères réalisées à distance par voie électronique. Je précise qu’Artprice travaille depuis 5 ans avec près de 70 polices judiciaires de différentes nationalités, ce qui a permis à Artprice d’établir un niveau de confiance rarement égalé sur l’Internet, renforcé par la collaboration constante avec les Artistes, les Ayants droits et les Experts.
Notre vraie force est la notion de compte séquestre et mainlevée dans lequel Artprice a conceptualisé tous les scénarios juridiques possibles pour que l’enchère réalisée soit incontestable dans un niveau de confiance rarement égalé sur Internet. Ce séquestre est le même principe qu’utilisent les notaires ou les avocats lors de transactions.

Boursica : Pouvez vous être plus clair dans la notion de compte séquestre ?

Thierry Ehrmann :
Je vais donc vous décrire brièvement le process : lorsque le vendeur, à travers une série de procédures, valide le meilleur acheteur de l’enchère, l’acheteur doit consigner physiquement par tout moyen de paiement à sa convenance la somme sur un compte séquestre de banque, avec un identifiant et compte unique. Il existe une règle intangible: un escroc par nature, n’avance jamais le premier euro. Dans notre cadre, le vendeur détient un gage fort avec la somme consignée par un tiers de confiance . Puis, après toute une série de procédures extrêmement codifiées, l’acheteur valide définitivement la vente et donne mainlevée pour que le vendeur puisse percevoir le produit de son enchère et qu’Artprice, de son côté, perçoive sa commission entre 4,5 % et 9 %, selon les produits et services proposés pour cette enchère. Notre grande force est que nous partons avec une base de données où chacun de nos 1,3 million de membres sont scorés en indice de confiance dans le respect des directives européennes sur les données personnelles.

Boursica : A vous entendre, la sécurité sur Artprice serait presque supérieure à une maison de vente traditionnelle.

Thierry Ehrmann :
Effectivement, si on a une bonne connaissance de l’économie numérique, je persiste à dire que le niveau de sécurité sur les enchères et l’ensemble de nos services, compte tenu de nos développements informatiques et process juridique sont supérieurs à l’ancienne économie. Nous avons toujours eu, depuis plus de 10 ans, un des taux les plus bas de répudiation sur les cartes de crédit selon le GIE carte bancaire.

Boursica : Dans notre 1er interview vous décrivez précisément comment Artprice peut, sur sa place de marché, répondre à la demande d’un client désirant vendre, par exemple, une sculpture d’Armand : Les Poubelles Organiques où Artprice est capable d’extraire de ses milliards de logs les clients qui sont à la fois amateurs d’Armand, de ses sculptures et plus précisément de la période relative à ses Poubelles Organiques mais vous avez fait état depuis de nouvelles avancées, quelles sont-elles ?

Thierry Ehrmann :
Une fois de plus, le marché de l’art a toujours un retard chronique. Il faut rappeler que nous sommes passés de 50 millions d’internautes en 2000 à plus de 2,5 milliards de connectés à l’Internet en 2011. En 2013, les 3 milliards seront très largement franchis. C’est pourquoi, nous avons reçu du monde entier, après la loi adoptée le 20 juillet 2011, des propositions intellectuellement très construites de groupes opérant sur le marché de l’art, ainsi que des groupes financiers qui considèrent, à l’instar des bourses avec la corbeille que les bourses électroniques ont tuées, que notre place de marché normalisée n’est pas une option mais une obligation. Je vous rappelle que notre maison mère le Groupe Serveur, dont je suis le fondateur, est sur Internet depuis 1985.

Boursica : En clair, cela représente quoi ? Des clients ou des concurrents potentiels contre Artprice ?

Thierry Ehrmann :
Dans le 1er interview, je vous ai clairement expliqué que la place de marché normalisée d’Artprice faisait l’objet d’une multitude de protections au titre de la propriété intellectuelle et ce, sur les différents continents. Nous parlons donc bien de clients et grands comptes potentiels.

Boursica : Qu’entendez vous par clients potentiels ? Vu que vous avez selon vos communiqués près de 83 % des Maisons de Vente et des experts qui travaillent avec vous.

Thierry Ehrmann :
Effectivement, ce chiffre est exact et acquis. Je vous parle de nouveaux clients et groupes principalement asiatiques, relativement jeunes et très fortunés qui ne peuvent conceptualiser le marché de l’art du 21ème siècle, selon eux, qu’avec une alliance commerciale ou capitalistique avec la place de marché normalisée d’Artprice. Ils nous amènent des réseaux communautaires, des centaines de milliers d’acheteurs ou vendeurs car ils considèrent à juste titre que le marché de l’art va exploser quand on va effondrer la marge d’intermédiation, qui rappelons-le, est, selon le Conseil des Ventes Volontaires, à environ 37,5 %.

Boursica : Quel est donc leur modèle économique et où se situe votre avantage ?

Thierry Ehrmann :
Malgré une position dominante, il y a toujours, et notamment dans les pays asiatiques, comme bien sûr la Chine, le numéro 1 mondial du marché de l’Art mais aussi Singapour, Hong Kong … etc., des réseaux capillaires que vous ne pouvez pas appréhender. Nos interlocuteurs ont parfaitement compris la valeur ajoutée qu’ils nous amènent et ils ont intégré, contrairement aux idées reçues, la barrière infranchissable de la propriété intellectuelle qui est une terrible barrière d’entrée (cf. Apple c/ Samsung). Ils ont donc modélisé, avec des fonds très importants ce qu’aucun Européen n’est capable d’engager, une machine de guerre se greffant par un marketing affinitaire sur notre place de marché normalisée. Pour faire simple nous mettons en place des marques blanches et/ou franches. Pour eux, la messe est dite, et ils prévoient déjà pour certains leur introduction en bourse. Ce n’est pas pour rien que nous préparons patiemment l’ouverture d’une filiale et des salles machines à Hong Kong qui est le laboratoire d’essai de la République Populaire de Chine et la porte d’entrée de toute l’Asie. Hong Kong est déjà dans les cinq premières places du marché de l’art mondial.

Boursica : Concrètement, Artprice va donc participer à des introductions ?

Thierry Ehrmann :
Il faut comprendre que la crise qui a démarrée en 2007 est selon moi, le signe d’un déclin de l’Occident et certainement pas une énième récession. Je n’ai pas de temps à perdre. Quand en Europe, je mets trois mois pour faire aboutir un rendez vous avec un acteur clé, en Asie, nous sommes déjà en train de rédiger des protocoles d’accord. A ce titre, il est évident qu’Artprice utilisera pour son propre compte tout l’intérêt des futures introductions de ces acteurs majeurs dont les projections de capitalisation seraient, pour quelques uns, supérieures à Sotheby’s qui est cotée au NYSE.

Boursica : Qui peut en capitalisation dépasser Sotheby’s ?

Thierry Ehrmann :
Je pense par exemple Poly International Auction, une des principales maisons de vente chinoises que nous connaissons physiquement depuis un temps certain et qui est en train de préparer son IPO sans se soucier une seconde de l’effondrement des marchés financiers occidentaux. Il y a par ailleurs une multitude d’acteurs qui ont compris le mécanisme sociologique des Foires d’art contemporain et des Biennales et qui retrouvent dans le réseau social Artprice Insider, que nous développons depuis près de deux ans, avec des sociologues, des acteurs du marché et ses membres, une manière révolutionnaire de faire perdurer une foire qui, par nature, est un phénomène éphémère mais pour autant nécessaire.

Boursica : C’est donc la fin des Foires d’art contemporain ?

Thierry Ehrmann :
Dans l’absolu oui, dans la pratique bien sûr que non, elles vont encore perdurer et se situeront comme des moments forts de l’actualité artistique, dont la continuité dans l’année sera, entre autre, sur Artprice Insider. Là aussi, il fallait démonter patiemment le mécanisme sociologique et économique des foires internationales. Pour comprendre cette révolution, les marchands et galeries, dans les années 90, considéraient les foires internationales comme un moyen de booster leur chiffre d’affaires. Aujourd’hui, leur préoccupation essentielle est d’échanger de l’information avec leur clients et confrères et, de manière subsidiaire, de pouvoir a minima payer leur stand. Une fois de plus, on substitue au réseau physique, onéreux et éphémère par nature un réseau numérique peu coûteux et permanent. Il ne faut pas oublier que nous sommes à plus de 300 foires internationales par an, ce qui est une hérésie d’un point de vue économique. Seules des Foires historiques et puissantes comme par exemple la Fiac, avec laquelle nous éditons en commun depuis 5 ans le rapport annuel bilingue sur le marché de l’Art contemporain, survivront.

Boursica : Dans la crise économique actuelle qui est sans précédent, l’art est-il vraiment une valeur refuge ?

Thierry Ehrmann :
Beaucoup d’études d’économistes, de sociologues et de chercheurs ont été éditées au cours du 20ème sur la rentabilité des œuvres d’art, mais ces chercheurs ne possédaient pas les bons outils économétriques. Ils utilisaient, en règle générale, des moyennes arithmétiques, usaient de la méthode des comparables, mais cela induisait des erreurs car leurs études portaient sur un marché de type hétérogène comme je vous ai expliqué dans le 1er interview. Pour rappel, une oeuvre qui a été identifiée et normée par nous sur un catalogue de vente de 1908 et qui passe encore régulièrement, de maisons de vente en maisons de vente au travers des décennies, nous permet d’affirmer qu’il s’agit de la même oeuvre. On en connaît donc la cote et le rendement année par année, et c’est pour cela, qu’on est la seule société au monde à pouvoir avoir une méthode économétrique irréprochable (les ventes répétées) portant sur l’ensemble des œuvres homogènes.
C’est la raison pour laquelle nous avons mis en place des indices et des outils issus des milieux financiers pour mesurer les performances, des anciens, modernes et contemporains. Il est incontestable, chiffres à l’appui, que sur certaines fourchettes de prix, avec une typologie d’artistes ou d’œuvres précises, on passe à travers les crises et la performance est quasiment constante, quels que soient les éléments exogènes et notamment l’effondrement des marchés financiers.

Boursica : On peut donc imaginer une bourse avec des produits dérivés ?

Thierry Ehrmann :
Effectivement, nous avons différents partenaires internationaux issus du private banking et de la finance qui, avec nos données, préparent la titrisation sur des œuvres d’art dont nous maîtrisons tout l’historique des prix et indices. Il ne faut pas oublier, que les œuvres d’art ont été au démarrage des premières banques en Europe, et durant de nombreux siècles, objets de nantissements et gages et donc de valeurs fiduciaires.

Boursica : Quels seront donc ces acheteurs professionnels et leurs clients finaux ?

Thierry Ehrmann :
Essentiellement des financiers qui, par ailleurs, possèdent généralement une très bonne culture du marché de l’art et qui considèrent que ces produits dérivés, adossés à des indices incontestables que nous produisons, leur donneront un peu de répit face aux marchés boursiers.
Les premiers tests marketing ont donné des résultats très positifs. La clientèle du private banking ou family office (plus de 30 millions de clients très haut de gamme dans le monde) a fait un très bon accueil à ce type d’actifs financiers.

Boursica : Comment expliquez-vous que devant de telles révolutions, la chaîne des acteurs du marché de l’art, en occident reste aussi conservatrice ?

Thierry Ehrmann :
Je mettrais une nuance. L’ancienne génération, il est vrai, a plus de 30 ans de retard car elle ne négociait majoritairement que des œuvres d’artistes décédés pour avoir la certitude de ne pas connaître d’émissions d’œuvres nouvelles de cet artiste. Aujourd’hui, principalement en Asie mais aussi en Amérique du Nord et en Europe, les artistes vivants et contemporains dépassent souvent en rendement les modernes qui, selon les critères de l’histoire de l’art, sont tous décédés. Nous sommes donc en présence de près d’un million d’artistes plasticiens reconnus, vivant exclusivement de leurs œuvres, avec un prix moyen de cession au premier marché de 8000 à 15 000 euros (galeries) et au second marché (ventes aux enchères) de 30 000 à 70 000 euros. Artprice est la seule société au monde qui possède l’intégralité des biographies et données indicielles de ces artistes. D’où le fait que le premier et second marché sont constamment sur Artprice en mode gratuit ou payant. Pour comprendre le retard de l’ancienne génération, je vous livre une anecdote très révélatrice: le Président d’une des plus grandes Maisons de Vente françaises m’a avoué cet été qu’il réfléchissait à Internet, “compte tenu que nous venions de dépasser dans le monde les 200 millions de connectés”. C’est terrorisant d’entendre de la part de ce Président par ailleurs très érudit une telle ineptie, alors que nous sommes plus de 2,5 milliards d’internautes dans le monde. Cela vous permet de comprendre le retard abyssal pris par la vieille garde.

Boursica : Votre connaissance intime des artistes vient du fait que vous êtes vous-même sculpteur-plasticien, depuis 30 ans, si on lit votre document de référence en chapitre “facteurs risques” le paragraphe “personne clé” ?

Thierry Ehrmann :
Oui effectivement, mon statut de sculpteur-plasticien me permet d’être au cœur de la communauté artistique pour comprendre sa mutation, ses besoins, ses interrogations, et ses désirs.

Boursica : Vous trouvez encore le temps de produire vos œuvres ?

Thierry Ehrmann :
Tout à fait ! Je viens par exemple de finir cet été une installation monumentale de 99 sculptures d’acier brut de 50 tonnes dénommée ” Les Sentinelles Alchimiques”, sur 9000 m2 qui enveloppent comme un infra mince, décrit par Marcel Duchamp, mes 3600 œuvres constituant le corpus de la Demeure du Chaos / Abode of Chaos dixit le New York Times, qui est aussi le siège social d’Artprice et de Groupe Serveur. C’est à ce jour une des installations statuaires les plus importantes d’Europe.

Boursica : Le marché s’est donc décuplé en combien de temps ?

Thierry Ehrmann :
En moins de 20 ans, nous sommes passés de la peinture traditionnelle à l’huile où le temps de séchage de la toile se chiffrait en mois alors que désormais, les jeunes artistes utilisent l’acrylique en peinture et les innovations technologiques et industrielles pour produire leurs sculptures et installations et l’on considère désormais qu’une production d’œuvre se mesure en semaines. D’où une production d’œuvres dans le monde qui a été multipliée par 20 en moins de 25 ans. L’explosion de ce marché, qui touche désormais une multitude de générations et de statuts sociaux avec près de 300 millions d’amateurs, collectionneurs et de professionnels de l’Art, provient du coût unitaire des oeuvres qui baisse, les rendant accessibles à un très grand nombre.

Boursica : On a quand même sur les jeunes artistes des variations de prix très importantes ?

Thierry Ehrmann :
Je ne dis pas le contraire mais ces jeunes artistes, grâce à l’Internet et notamment notre place de marché normalisée où ils ont un espace dédié, savent très vite s’adapter à la correction du marché, en diminuant leur production ou en changeant de continents au profit des zones de croissance. En face, nous avons les vieux acteurs qui sont parfois obligés d’arrêter des ventes, voire bloquer des catalogues déjà imprimés car la correction des prix est beaucoup plus rapide qu’une vente aux enchères classique, qui demande un minimum de 4 à 9 mois de préparation. Dans l’absolu, ils ont acquis, de manière intuitive, une réaction au marché proche des meilleurs marchands. Le mythe de l’artiste maudit est définitivement révolu.

Boursica : Est-ce une des raisons qui vous amène la majeure partie des Maisons de Vente du monde entier sur Artprice ?

Thierry Ehrmann :
Evidemment, les Maisons de Vente, avec la place de marché normalisée d’Artprice, vont pouvoir construire ou modifier au fil des jours leurs ventes aux enchères par notre intranet sécurisé, en collant littéralement au marché avec la certitude de pousser leurs ventes sur notre fichier client ultra qualifié qui est le plus important au monde à ce jour. On passe donc d’une fourchette d’un semestre à quelques jours pour faire aboutir la vente aux enchères dans de bonnes conditions, tant pour l’acheteur que pour le vendeur et de plus avec la certitude de déboucler la vente et la trésorerie en quelques jours.

Boursica : Jusqu’où Artprice compte aller diffuser ses informations, gratuites ou payantes ?

Thierry Ehrmann :
Disposant de ressources serveurs et de bandes passantes en surcapacité, car nous sommes, à travers Groupe Serveur, notre propre opérateur, nous diffusons nos données gratuites ou dans de rares cas, à très faible prix dans les milieux universitaires, les écoles d’art dans le monde, les associations d’artistes, les sociétés de droits d’auteur, les historiens d’art, les chercheurs etc… J’assume de dire que nous avons la volonté de créer une véritable addiction à toute personne dans le monde qui a une quelconque relation avec le marché ou l’histoire de l’art. Artprice pour 2010 a fourni en données gratuites près de 54 millions de visiteurs. Dans la mesure où nous ne perdons pas d’argent, cette addiction a pénétré pratiquement tous les organismes institutionnels ou privés qui s’intéressent à l’art dans le monde. Il faut savoir être très patient mais avec la croissance de l’Internet, nous sommes bien dans la loi de Robert Metcalfe qui dit que “l’utilité d’un réseau est proportionnelle au carré du nombre de ses utilisateurs.”

Boursica : Suite au 1er interview, vous avez eu un conflit avec Artnet, qu’en est-il ?

Thierry Ehrmann :
La société Artnet qui n’a pas le même métier que nous, a du baisser la garde sur les propos de l’interview que nous maintenons en tous points alors que nous avons mis en place les procédures à son encontre pour violation de nos droits de propriété intellectuelle. Au passage, je modifie mes propos du 1er interview en indiquant qu’une simple journée de bourse d’Artprice correspond désormais pour l’année 2011, en volume financier, à environ 3 mois de bourse d’Artnet. De plus, on peut constater qu’Artnet est sorti en septembre du marché officiel pour aller au marché libre allemand. Ce qui correspond a une régression terrible pour les actionnaires comme pour la société.

Boursica : Puisque vous parlez de bourse, Artprice en est où ?

Thierry Ehrmann :
Au 5 Octobre 2011, Artprice connaît la meilleure performance boursière française sur le marché réglementé avec +158% de variation et un volume traité sur le titre de plus de 702 millions d’euros depuis le 1er janvier 2011. Une fois de plus, le marché est animal et instinctif. De tels chiffres indiquent clairement que le marché a fait ses propres investigations, diligenté ses propres études et enquêtes au cœur du marché de l’Art. On ne traite pas une somme de 700 millions d’euros en neuf mois de transactions par hasard, surtout dans le pire krach boursier de l’histoire. En vieux boursier, je dirais qu’on a parlé vrai au marché, et que le marché a parfaitement entendu et répondu par les volumes et le cours d’Artprice.

Boursica : Puisqu’on parle toujours de bourse, avez-vous malgré le krach de cet été les mêmes objectifs que lors de notre 1er interview de juin 2011 ?

Thierry Ehrmann :
Absolument ! Je maintiens rigoureusement nos objectifs de juin 2011, à savoir, que le cours est d’abord revenu sur les niveaux atteints en 2005/2006, soit 30 euros quand on a commencé à parler de la transposition de la Directive Services. Ce cours a été une simple remise à niveau avant que la France n’exaspère pendant 5 ans l’Europe par son coté pathétique en refusant la réforme des enchères notamment par voie électronique. Je maintiens sérieusement qu’on ne peut que partir d’une base de 67 euros qui était notre plus haut cours de cotation avant la création de la place de marche normalisée en 2005. On a tenu l’ensemble des engagements de notre prospectus d’introduction. Nous sommes même très au-dessus des engagements du prospectus de 1999. Je vous rappelle que nous avons atteint, il y a encore 3 mois, 58 euros, dans des volumes très conséquents.
Je réitère donc que le dicton “cours vu, cours revu” est une très vieille règle de la bourse. Artprice qui a démontré que cet adage s’appliquait à elle de manière incontestable même en pleine crise.

Boursica : Au fond de vous, quelle est votre vision de l’économie actuelle en occident ?

Thierry Ehrmann :
Je vous répondrai simplement avec ce propos du théoricien Antonio Gramsci ” il y a crise quand l’ancien monde ne veut pas mourir et que le nouveau monde ne peut pas naître”. En restant dans la métaphore, “le monde est une grande famille où quand je vais en Europe, je trouve un vieil ami rongé par une longue maladie incurable. Puis quant je vais en Asie, je suis confronté à un adolescent plein d’énergie et d’insolence et quant je reviens aux USA, je vois un homme obèse qui refuse de constater son état et continue sa boulimie frénétique”. Ces propos doivent nous faire comprendre que la crise est désormais existentielle et qu’elle demande un supplément d’âme et d’histoire sans quoi nous allons droit dans le mur.

Boursica : L’actualité étant ce qu’elle est, que pensez vous de Steve Jobs qui vient de décéder ?

Thierry Ehrmann :
Il était tout simplement iconoclaste et avait cette capacité d’accomplir ses rêves en les incarnant dans l’industrie de l’informatique qui est sans pitié. Sa passion lui a permis d’imaginer et conceptualiser le 21 ème siècle. Je le décrirais à mes yeux, plus comme un philosophe de l’ère numérique et du nomadisme qu’un chef d’entreprise. Je pense que là où il est aujourd’hui, il est déjà en train de nous préparer la version 9.0 de l’iPad tridimensionnelle 7G !

Boursica : Je vous repose donc à nouveau la question du 1er interview : avez-vous une prédiction pour l’avenir d’Artprice ?

Thierry Ehrmann :
Je réitère que nous avons tenu tous nos engagements bien au-delà du prospectus d’introduction de 1999, en passant à travers la crise du NASDAQ de 2000, les attentats du 11 septembre 2001, la guerre en Irak de 2003, la grande crise financière démarrée en 2007 et qui est loin d’être finie avec la pire débâcle que constituent les dettes étatiques. Je connais très peu de sociétés cotées sur le marché réglementé qui en sont sorties vivantes sans jamais avoir procédé à des augmentations de capital et qui ont acquis durant cette période une position de leader mondial incontesté. Par rapport à l’interview de juin 2011, je modifie par contre ma position pour l’avenir d’Artprice car je pense que nous sommes désormais qu’à 5 % de l’histoire d’Artprice compte tenu des accords et contacts que nous avons bâtis depuis trois mois après l’adoption de la loi du 20 juillet 2011 et que désormais, une grande partie de notre histoire future se situe en Asie.

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Pour lire la première interview : 5 juin 2011 Interview exclusive de Thierry Ehrmann, PDG d’Artprice.com : http://serveur.serveur.com/Press_Release/pressreleaseFR.htm#20110606

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