Les impressionnistes de Durand-Ruel

[17/08/2009]

 

Le marché de l’art sommeille pendant la période estivale mais le calendrier des grandes ventes de la rentrée est déjà annoncé. L’ouverture des festivités aura lieu à New-York avec les cessions d’art indien, chinois, japonais et coréen (16 septembre chez Christie’s, 17 septembre chez Sotheby’s) et celles des cessions d’art contemporain (23 septembre chez Christie’s, 24 septembre chez Sotheby’s).Les catalogues de ces grandes vacations n’étant pas encore dévoilés, c’est surtout l’annonce de la dispersion de toiles impressionnistes issues de la collection Paul Durand-Ruel chez Sotheby’s NY le 4 novembre prochain qui est particulièrement attendue.

Les œuvres de la collection Paul Durand-Ruel furent directement achetées aux artistes. La plupart ne sont pas sorties de la collection depuis et aucune n’est apparue sur le second marché depuis leur acquisition. Rappelons que Paul Durand-Ruel (1831-1922) a mené une politique de soutien auprès des peintres Impressionnistes, achetant leurs toiles autant qu’il le pouvait. Riche d’un stock conséquent d’œuvres, il exposait ses artistes à New-York en 1886, leur permettant de prendre un véritable tournant international. Jusqu’à sa mort en 1922, il achète une quantité incroyable de tableaux, estimée à près de 12 000 œuvres dont plus de 1 000 Claude MONET, 1 500 Pierre-Auguste RENOIR, 400 Edgar DEGAS, 400 Alfred SISLEY, 800 Camille PISSARRO, 200 Édouard MANET, 400 Mary CASSATT.

Le prestige de la provenance, du choix opéré par l’oeil et l’esprit du plus grand marchand et collectionneur de l’art impressionniste, sont de superbes atouts pour les oeuvres présentées. Sotheby’s a pris cependant le parti de rester mesuré et de ne pas gonfler les estimations en regard du fabuleux pedigree.
Ainsi, la fourchette d’estimation de la vue de Rouen peinte par Camille Pissarro en 1898 et intitulée, Le Pont Boieldieu et la Gare d’Orléans, Rouen, Soleil est proposée entre 2M$ et 3M$. Une estimation raisonnable puisque cette toile fait partie d’une série sur le Pont de Boieldieu, dont une toile trouvait acquéreur pour 2,6M$ le 20 juin 2006 chez Christie’s (Londres, 1,4M£, Le Pont Boïeldieu et la gare d’Orléans, Rouen, matin, cinq heures Un autre Pissarro est au catalogue : Jardin du Louvre, Effet de Neige (1899) qui fait partie d’une série de toiles réalisées depuis la fenêtre de son appartement parisien. L’oeuvre est estimée entre 1,25M$ et 1,85M$. Quelques semaines avant de l’achever, Pissaro posait le dernier coup de pinceau au Carousel, matin d’automne, un chef-d’oeuvre prenant lui aussi le Louvre pour sujet, et doublant les prévisions chez Sotheby’s Londres le 8 février 2005, pour une adjudication à 1,55M£, soit près de 2,9M$.

Parmi les lots phares, les collectionneurs se voient proposer la Seine à Argenteuil (1870) d’Alfred Sisley qui pourrait décrocher la meilleure enchère 2009 pour l’artiste si elle atteignait son estimation de 1,5M$ – 2M$, et des oeuvres de Pierre-Auguste Renoir, dont une Baigneuse attendue entre 700 000 et 1M$ et une Nature Morte aux Pommes et Poires, entre 350 000 et 450 000$. Le chef-d’œuvre le plus abouti offert pour Renoir est intitulé Femme au chapeau blanc. Il s’agit d’un profil de jeune fille, réalisé au début des années 1890, prétexte à traiter une longue chevelure rousse et un immense chapeau blanc, élaboré en rangées de tulle retombant sur le visage. L’œuvre est estimée entre 2,5 et 3,5 M$. Nous n’avions pas vu de coiffe si élégante aux enchères depuis l’adjudication de la Jeune fille au chapeau fleuri (1900) frappée 3,2M$, le 8 novembre 2006, chez Christie’s New-York. Dans les années 1890, Durand-Ruel fit remarquer au peintre que les chapeaux se démodaient et que ses œuvres auraient plus de succès si les femmes étaient représentées en cheveux. L’art de Renoir a bien sûr dépassé la mode du moment et un simple chapeau de paille enrubanné et vissé sur la tête d’une jeune fille décrochait 5M$ au pic de l’avant-dernière bulle spéculative, le 17 mai 1990 chez Sotheby’s New-York.