Les résultats des dernières grandes ventes impressionniste et moderne de Londres

[28/06/2016]

 

Les résultats des dernières grandes ventes impressionniste et moderne de Londres s’avèrent tendus : la chute drastique des produits de ventes (-47% pour Sotheby’s et -39% pour Christie’s) est en partie liée à la prudence des sociétés de ventes, qui ont considérablement restreint leur offre pour ne pas « griller » les œuvres, et pour éviter d’éveiller la défiance dans cette période d’accalmie et de re-positionnement.

Le 21 juin 2016, la vente Impressionniste et Moderne de prestige, organisée chez Sotheby’s, donnait une tendance baissière confirmée le lendemain chez sa concurrente : les 149,9 m$ de chef-d’oeuvres vendus par Sotheby’s constituent une baisse de 47% par rapport à la même session de juin 2015 (281,7 m$ le 24 juin 2015). Une baisse attendue, Sotheby’s affichant un catalogue particulièrement restreint de 27 lots dont 24 se sont vendus, contre 40 lots vendus en moyenne sur la décennie… Cette perte est à relativiser, sachant que Sotheby’s enregistrait l’an dernier la deuxième meilleure vente de son histoire londonienne. Il s’agit néanmoins d’un résultat baissier de 10% par rapport à la moyenne des ventes de prestige de juin organisées depuis 10 ans à Londres par l’honorable maison de ventes ! Le marché impressionniste et moderne est certes ralenti il n’en demeure pas moins puissant, avec deux chef-d’oeuvres vendus plusieurs dizaines de millions chacun.

Le record de cette semaine de ventes est tenu par un chef-d’oeuvre cubiste de Pablo PICASSO, une Femme assise (1909, 81 x 65 cm), vendu l’équivalent de 63,5 m$ par Sotheby’s. Il s’agit d’un montant record pour une vente de juin et de la septième meilleure enchère au monde pour Picasso, dont le record fut signé l’an dernier à plus de 179 m$ (vente de la toile Les femmes d’Alger (Version ‘O’), Christie’s, New York, le 11 mai 2015). Cette Femme assise est un petit miracle pour les grandes ventes, une pièce absolument muséale émergeant après 40 années passées dans la même collection particulière, celle de l’américain Richard K. Weil. Le modèle n’est autre que Fernande Olivier, la première compagne de Picasso et la muse de la période cubiste.
Le deuxième grand chef-d’oeuvre de la vacation Sotheby’s fut Jeanne Hébuterne au foulard d’Amedeo MODIGLIANI (1919, 92 x 54 cm), une toile remarquable adjugée pour 2,7 m$ il y a 30 ans (vente Christie’s, Londres, le 23 juin 1986, lot 42) et emportée cette fois pour 56,7 m$ ! Entre temps, Modigliani est devenu l’auteur de la deuxième toile la plus chère du monde, avec son Nu Couché (1917-1918) achetée 170,4m$ par le milliardaire chinois Liu Yiqian, président du groupe Sunline., pour le prestige de son Long Museum à Shanghai.

La vente Christie’s du lendemain, construite sur 36 lots – dont une vingtaine d’oeuvres attendues pour atteindre le million de dollars – offrait aussi les plus belles signatures du genre : Kirchner, Jawlensky, Chagall, Kandinsky, Léger, Magritte, Renoir, mais aussi trois toiles de Picasso, un Claude Monet et, surtout, un autre Modigliani, Madame Hanka Zborowska. Annoncée en couverture de catalogue, Madame Zborowska a changé de propriétaire dans son estimation (12,1 m$), après avoir passé 37 ans dans la même collection. Cette session du 22 juin a rapporté l’équivalent de 68,3 m$, soit un résultat amputé de 39% par rapport à la session impressionniste et moderne de juin 2015 (113,3 m$), et le plus mauvais score de Christie’s enregistré sur les six dernières années sur ce type de vente. Christie’s renoue avec le creux de la vague de 2009 (61 m$le 23 juin 2009), un moment de contraction forte mais passagère.
Le marché ralentit et se contracte, c’est indéniable. Cependant, les acteurs du marché ne tirent pas la sonnette d’alarme pour autant… Politique de l’autruche ? Ou stratégie prudente pour créer cette rareté qui crée de la valeur ?