Les premiers résultats de Londres

[10/02/2015]

 

Les premières grandes ventes Impressionist and Modern Art Evening Sale et The Art of the Surreal se sont tenues a Londres les 3 et 4 février entre Sotheby’s et Christie’s. Ces premières ventes de prestige sont toujours très attendues car elles donnent le pouls des vacations à venir, notamment celles d’art contemporain qui les suivent de près. Apres les sommets atteints en février 2014, Christie’s révise son résultat à la baisse de… 70 m$ cette année. La vénérable société de ventes généraient en effet 222 m$ (frais inclus) le 4 février 2015 contre 292 m$ l’année dernière. Elle affiche néanmoins un parfait optimiste, annonçant des enchérisseurs issus de 34 pays et 45 oeuvres achetées au-delà du million de dollars (frais inclus). Sotheby’s fait mieux que sa concurrente avec 285,6 m$, soit la meilleure vente de son histoire à Londres. Les deux leaders de l’art moderne ont généré 507 m$ (frais inclus) en deux soirées. L’année commence fort.

Il faut dire que parmi les œuvres signées Picasso, Chagall, Derain, Klee, Morandi, Magritte, Ernst, Dominguez, Signac, Pissarro, Joan Miro ou Matisse, plusieurs n’étaient pas apparues sur le marché depuis plusieurs générations et beaucoup d’entre elles étaient de qualité (sujet, époque) irréprochable. Les œuvres les plus disputées sont celles de l’avant-garde française, celles des artistes phares de la modernité, dont certains tableaux cotent plusieurs dizaines de millions de dollars. Christie’s présentait notamment deux vues de l’Estaque. Des sujets importants car le petit port marsellais de l’Estaque a vu naître la modernité à travers Braque, Cézanne et Picasso, entre autres. Deux œuvres historiques de l’Estaque se sont bien vendues : le paysage pré-cubiste aux couleurs vives de Georges BRAQUE est parti pour 5,1 m$ (Paysage a l’Estaque, 1907, soit 5,8 m$ frais inclus), et la Vue sur L’Estaque et le Château d’If de Paul CÉZANNE pour 18 m$ (20,3 m$ frais inclus). Cette dernière œuvre, issue de la collection Samuel Courtauld, intègre le Top 10 des meilleures adjudications cézaniennes.
Christie’s avait Cézanne et Sotheby’s misait sur Monet, en offrant cinq œuvres du maître impressionniste. Elles se sont toutes vendues, entre 2,8 m$ et 31,6 m$. Sotheby’s et Claude MONET emportent même la meilleure enchère de ces deux jours de ventes avec Le Grand Canal, un chef d’oeuvre de 1908 dont le prix a grimpé de… 20 m$ en 10 ans ! Sotheby’s adjugeait en effet cette toile pour 11,5 m$ en 2005 pour la revendre 31,6 m$ cette année.

Puis, ces ventes de prestige ne sauraient compter sans Alberto GIACOMETTI, à qui l’on doit le meilleur coup de marteau de l’année 2014. Les deux maisons de ventes font leur possible pour alimenter au mieux leurs catalogues en œuvres. Elles en ont proposé neuf (4 et 5 février), depuis des dessins vendus entre 22 000 et 50 000 $ lors des ventes de jour, jusqu’à d’importantes sculptures, dont Femme de Venise V (4/6, 110 cm). Ce bronze est issu d’une série de femmes debout réalisée par Giacometti spécialement pour le pavillon français de la Biennale de Venise de 1956. Femme de Venise V s’est vendue 9 m$ (10,2 m$ frais inclus). Par ailleurs, deux importants bronzes représentant le frère de l’artiste ont passé les 3 m$ (Tête de Diego sur socle, 2/6, 37 cm, adjugé 3,9 m$, soit 4,49 m$ frais inclus, et Diego au chandail, 4/6, adjugé pour 3,2 m$, soit 3,7 m$ frais inclus).

Les ventes surréalistes comptaient quant à elles avec Max Ernst, Dali, Redon, Picabia, avec un nombre exceptionnel d’oeuvres de Magritte, et avec un superbe Joan MIRO, qui emporte la meilleure enchère chez Christie’s. Intitulée Painting (Women, Moon, Birds) s’est vendue au double de son estimation haute. Résultat final : 20,7 m$ (soit 23,5 m$ frais inclus). Ce chef-d’oeuvre était resté dans la même collection privée européenne depuis 1963. La partie la plus stimulante de ces vacations tenait dans la quantité et la qualité d’oeuvres de René MAGRITTE : neuf chef-d’oeuvres offerts chez Christies, dont Les compagnons de la peur, une huile sur toile de 1942 qui a changé de mains pour 5,4 m$ (6,1 m$ frais inclus) et Quand l’heure sonnera (1964), partie pour 5,7 m$ (6,5 m$ frais inclus). Sotheby’s tenait pour sa part trois bons Magritte, dont L’Explication, vendue 4,8 m$ (5,6 m$ frais inclus).
Par ailleurs, les œuvres sur papier de l’artiste surréaliste ont explosé leurs estimations. Elles présentaient des images particulièrement célèbres, comme la pomme masquée de Souvenir de voyage (que l’on retrouve dans la fameuse huile sur toile Le Prêtre marié). Cette petite gouache de 35,9 x 27 cm, a grassement triplé son estimation haute pour un coup de marteau a 3,4 m$ (3,9 m$ frais inclus). Elle talonne de près le record de Magritte sur papier (avec Le Maître d’école vendu 3,5 m$, soit 4 m$ frais inclus, 8 février 2011, Sotheby’s Londres). D’autres dessins de Magritte sont partis bien au-dessus des estimations hautes : La Clairvoyance a emporté 500 000 $ de plus que prévu (vendu 1,2 m$ chez Christie’s), La Recherche de l’absolu 700 000 $ de plus (vendu 1,6 m$ chez Christie’s) et Le thérapeute est parti 1,2 m$ au-dessus de l’estimation optimiste (vendu 2,5 m$). Le fait n’est pas anodin : Magritte vient d’enregistrer cinq nouvelles enchères millionnaires pour des œuvres sur papier en deux jours de ventes, contre trois sur l’ensemble de l’année 2014.