La manne contemporaine continue

[18/11/2014]

 

A l’issue de ces grandes ventes de novembre, la maison de vente américaine Sotheby’s réaffirme son leadership sur l’art impressionniste et moderne et signe la meilleure vente de toute son histoire avec un résultat de 422,1 millions de dollars frais inclus (contre 165,6 m$ pour la cession impressionniste et moderne de Christie’s), face à l’incontestable domination de l’anglaise Christie’s sur le secteur contemporain. Dans ce domaine, Christie’s vient de réaliser, pour la troisième fois consécutive en un an, la meilleure performance de l’histoire des ventes aux enchères. Elle totalise 852 m$ de recettes frais inclus et 94 % de lots vendus contre 343,6 millions de dollars 85,9% de lots vendus chez sa concurrente.

Accoutumée du fait depuis un an, Christie’s écrit une nouvelle page dans l’histoire des ventes aux enchères. Le 12 novembre 2014 à New York, sa vente Post-War and contemporary Art Evening a généré des résultats époustouflants : plus de 852 m$ de recettes frais inclus (contre 695 à 738 millions de dollars attendus), 38 % des lots vendus au-dessus de l’estimation haute, plus de 500 enchérisseurs venus de 43 pays, 11 nouveaux records mondiaux, trois oeuvres vendues plus de 50 m$, 23 au-delà des 10 millions… Stephen Murphy, directeur de la société de ventes, évoque un moment historique, et voit là un témoignage du profond intérêt de l’art contemporain à travers le monde. L’accès à l’oeuvre d’art serait devenu l’une des quêtes universelles de notre époque.

La domination de Warhol

Les deux meilleurs résultats de Christie’s sont emportés pour le roi du Pop art Andy WARHOL, véritable pilier de cette cession avec plusieurs oeuvres majeures présentées, dont le très attendu Triple Elvis [ Ferus Type] de 1963, qui s’est arraché 73 m$, un coup de marteau qui porte son prix à 81,9 m$ avec les frais. Elvis ne décroche pas pour autant le nouveau record warholien, tenu depuis novembre 2013 par Silver Car Crash (Double disaster), une œuvre de la même année 1963, frappée 94 m$ l’an dernier chez Sotheby’s et vendue 104,5 m$ frais inclus. Triple Elvis [ Ferus Type] est une pièce rare, restée dans sa collection depuis 1977. Elle fait partie des nombreux lots dont Christie’s a garanti le prix auprès du vendeur.
Trois Elvis sur la même toile valent plus que quatre Marlon Brando. Le deuxième coup de marteau d’excellence de la soirée revient en effet à Four Marlons, une œuvre de 1966 tout aussi vierge d’enchère que la première toile avant sa mise en vente le 12 novembre. La compétition fut là-encore acharnée, jusqu’au coup final de 62 m$ (69,6 m$ avec les frais). Four Marlons est désormais la quatrième toile de Warhol la plus chère.

Sotheby’s vient quant à elle de vendre la Liz Taylor la plus chère de l’histoire des enchères ( Liz#3 (Early Colored Liz) vendue 28 m$ le 11 novembre soit 31,5 m$ frais inclus) et offrait un portrait de Brigitte Bardot dont la rentabilité affiche plus de 100 000 $ par an ! Cette pièce maîtresse warholienne s’est vendue 10,25 m$ (soit 11,6 m$ frais inclus), quand une toile similaire valait 9,4 m$ en 2007 chez Christie’s (Brigitte Bardot, 1974, Christie’s Londres le 8 février 2007, 10,6 m$ frais inclus).
Les experts attendaient mieux encore pour l’icône du cinéma français estimée jusqu’à 15 m$. Warhol affiche certes des performances spectaculaires, il n’en demeure pas moins quelques déconvenues lorsque les mises à prix sont trop fortes : personne, par exemple, n’a osé emmené son grand autoportrait à son estimation basse de 25 m$ chez Christie’s (Self-Portrait, 1986, 203 x 203 cm). Or, ces 25 m$ étaient le prix à payer – hors frais – pour un visage de Warhol d’un mètre de plus en 2011. Un portrait offert la veille chez Sotheby’s – 102 x 102 cm – s’est arrêté à 10 m$ contre une estimation fournie entre 12 et 18 m$.
Entre le 10 et le 13 novembre 2014, Christie’s, Sotheby’s, Phillips et Swann Gallery ont soumis plus de 100 Warhol à enchères. Ni l’offre, ni la demande, ni les prix ne faiblissent de cette manne.

Quelques nouveaux records

La vente du 12 novembre a établi de nouveaux records époustouflants pour quelques leaders du marché :

Cy TWOMBLY enterre son précédent record de 42,8 m$ ! Une œuvre sans titre issue de la série de peintures Blackboard, demeurée dans la même collection privée pendant 40 ans, a fait valser les enchères jusqu’à 62 m$, soit 69,6 m$ frais inclus. Ed RUSCHA augmente de plus de 10 m$ son précédent record. Son œuvre Smash, une toile « historique » de 1963 s’est arrachée 27 m$, 30,4 m$ avec frais. Peter DOIG flambe et affiche trois nouveaux records sur l’année. Il culmine désormais à 16 m$, plus de 18 m$ frais inclus, avec la grande huile sur toile “Pine House (Rooms for Rent). Arshile GORKY performe désormais jusqu’à 7,8 m$, 8,9 m$ avec frais, grâce à une œuvre de 1945 intitulée Child’s Companions.

De nouveaux sommets ont encore été atteints pour Martin KIPPENBERGER (22,5 m$ frais inclus), Georg BASELITZ (7,445 m$), Yayoi KUSAMA (7,1 m$), Cindy SHERMAN (6,773 m$), Mark TANSEY (5,765 m$), STURTEVANT (3,413 m$), et le jeune Seth PRICE qui culmine désormais à 785 000 $, l’année de ces 41 ans.