La Section d’Or, l’autre cubisme

[16/09/2014]

 

Considérés comme les seconds couteaux du cubisme, les artistes de la Section d’Or n’ont pas la cote d’un Picasso. Leurs prix n’ont pas fini de grimper (en témoigne le nouveau record de Juan Gris cette année) mais de nombreuses oeuvres de la grande avant-garde demeurent très accessibles.

Loin de s’arrêter à ses initiateurs Braque et Picasso, le Cubisme a rayonné dans le monde entier, via divers regroupements d’artistes comme celui de la Section d’Or, aussi appelé Groupe de Puteaux. Cette forme particulière de Cubisme émerge sous l’impulsion de Jacques Villon (frère de Marcel Duchamp), lorsque celui-ci réunit ses amis en 1911 à Puteaux, afin de tracer les contours d’un cubisme non orthodoxe sous un nom en référence à la proportion idéale régie par le nombre d’Or. La Section d’Or prend consistance en 1912 avec une première exposition à la Galerie La Boétie à Paris et se trouve porté par des personnalités fortes comme Jean METZINGER, les frères Villon, Roger DE LA FRESNAYE, Louis MARCOUSSIS, Robert DELAUNAY, Frantisek KUPKA, Henri LE FAUCONNIER, Fernand LÉGER ou Albert GLEIZES.

Que vaudrait le Grand Nu descendant l’escalier de Marcel DUCHAMP sur le marché des enchères ? La version définitive de cette œuvre, à la fois cubiste et futuriste, refusée au Salon de Printemps (Paris en 1912) puis accueillie à grand fracas à l’Armory Show (New York, 1913) serait l’une des oeuvres modernes les plus cotées au monde si le Philadelphia museum of art décidait de s’en défaire. En 1937, Marcel Duchamp décline ce Grand Nu au moyen d’un collotype colorié au pochoir (env. 30 cm x 20 cm). Les collectionneurs se consolent avec ce petit format, qui atteignait tout de même 72 000 $ en 2012, trois fois son prix de 2008 (adjugée 72 000 $ le 25 avril 2014, soit 88 900 $ frais inclus chez Phillips de Pury et Company, New York). Tant qu’un chef-d’oeuvre tel que le Grand Nu descendant l’escalier restera sur ces précieuses cimaises, Juan GRIS et Fernand LÉGER devraient rester les aventuriers les plus cotés de la Section d’Or. Ce sont les seuls artistes affichant des enchères à plus de 10 millions de dollars, dont un record de 35 millions pour Léger (La Femme en bleu, 1912/1913, Sotheby’s New York, le 7 mai 2008) et un récent sommet de 50,7 millions pour Gris (Nature morte à la nappe à carreaux, 1915, soit 57 m$ frais inclus, Christie’s Londres, 4 février 2014).

Les autres « cubisteurs » aptent à passer le million sont aujourd’hui Jean METZINGER, Albert GLEIZES, Alexander ARCHIPENKO, Jacques VILLON, André LHOTE, Sonia DELAUNAY-TERK,Robert DELAUNAY ou Francis PICABIA. Leurs prix avaient déjà flambé en 1990, suivant la cote explosive des maîtres modernes, avant de s’écrouler. Après une décennie morose, la Section d’Or a largement renoué avec la hausse, d’autant que le manque d’oeuvres cubistes signées Braque et Picasso conduit naturellement les collectionneurs vers des artistes autrefois considérés comme secondaires.

Si les toiles les mieux datées (les années 1910′) affichent des prix en hausse, de petites peintures de Gleizes, De La Fresnaye ou Jacques Villon sont encore accessibles dans une fourchette de 3 000 à 10 000 $. A ces prix, les travaux à l’huile proposés sont tardifs ou peu aboutis, mais la signature est mère de sureté. Les œuvres sur papier offrent un choix plus large et des prix qui ne flambent pas tant l’offre se trouve concentrée sur le marché français. Un portrait cubiste au fusain de Jean Metzinger autour de 7 000 $ ? C’était possible en avril dernier à Paris…