Le Top d’Europe. Chapitre 1 : l’Italie

[12/09/2014]

 

Le vendredi, c’est Top ! Un vendredi sur deux, Artprice vous propose un classement d’adjudications par thème. Cette semaine : les dix meilleures enchères italiennes.

L’Italie est la 7ème place de marché mondiale pour la vente d’oeuvres d’art aux enchères (68 m$ d’oeuvres vendues sur le premier semestre 2014). Berceau artistique de l’Europe, elle valorise d’abord les Maîtres anciens et l’art moderne sans s’emballer sur les signatures contemporaines à la mode. Avec un ticket d’entrée de 1,6 m$ au Top 10 des adjudications italiennes et un record à 3,2 m$, l’Italie reste à l’abri des élans spéculatifs, y compris pour les plus grandes signatures de l’histoire de l’art.

Top 10 : les dix meilleures enchères italiennes.

Rang Artiste Adjudication Oeuvre Vente
1 TIZIANO VECELLIO 3282060$ Santa Maria Maddalena penitente 09/11/2003 FineArte – Semenzato Casa D’aste S.P.A., Venice VE
2 Arturo MARTINI 2542372$ Donna che nuota sott’acqua (1941-1942) 24/05/2005 Christie’s, Milan MI
3 Mariotto DI NARDO 2317920$ Madonna col Bambino in trono e angeli 06/11/2007 Sotheby’s, Florence FI
4 Umberto BOCCIONI 2300510$ Studio per foot-baller (1913) 27/11/2007 Christie’s, Milan MI
5 Claude MONET 2149200$ Leicester square, la nuit (1900-1901) 13/03/1990 Nuova Brerarte, Milan MI
6 Lucio FONTANA 1861245$ Concetto spaziale, Attese (1964/65) 02/04/2014 Christie’s, Milan MI
7 Jean-Baptiste MARTIN DES BATAILLES 1856400$ Le conquiste di Luigi Il Grande 22/02/1998 FineArte – Semenzato Casa D’aste S.P.A., Venice VE
8 Ippolito CAFFI 1819408$ Veduta di Piazza Navona, Roma (1853) 12/06/2007 Sotheby’s, Milan MI
9 Lucio FONTANA 1813320$ Concetto spaziale (1955) 27/05/2008 Sotheby’s, Milan MI
10 Giorgio MORANDI 1699125$ Natura morta (1940) 20/05/2009 Sotheby’s, Milan MI

 

Deux maitres anciens
Un quart de siècle pour 24 peintures. Voici le marché mondial de Tiziano Vecellio – le Titien en français – grand Maître de la peinture vénitienne du XVIème siècle. Les prix de cette denrée rare ne sont pas excessifs, notamment en regard des prix atteints aujourd’hui par des oeuvres contemporaines. Certes, il paraît difficile d’obtenir un tableau pour moins de 500 000 $. Néanmoins, le record de Titien culmine à 15 m$ lorsque plusieurs de nos contemporains ont déjà allègrement franchi ce seuil de prix. Le record absolu d’enchère n’est pas italien mais new-yorkais, fief du marché mondial haut de gamme (A Sacra Conversazione: the Madonna and Child with Saints Luke and Catherine of Alexandria, adjugée 15 m$ soit 16,8 m$ frais inclus, le 27 janvier 2011 chez Sotheby’s). La meilleure enchère enregistrée en Italie est cinq fois moins forte et remonte à plus de dix ans, avec l’adjudication d’une Sainte Marie Madeleine pénitente cédée l’équivalent de 3,2 m$ (soit 3,8 m$ frais inclus, Santa Maria Maddalena penitente, le 9 novembre 2003, Finarte). Les oeuvres sont si rares que certaines, confirmées comme authentiques, atteignent des résultats à six chiffres, tant l’espoir de la découverte d’un nouveau trésor stimule marchands et collectionneurs.

L’autre maître ancien récompensé est le florentin Mariotto Di Nardo (c.1394-1424) actif au XVème siècle. Malgré la brièveté de sa carrière, Di Nardo eu une production abondante, dont de nombreuses toiles de petits formats et d’importants retables. Ces derniers atteignent les meilleurs prix en salles. C’est l’un d’entre eux, une Vierge à l’enfant en Majesté avec les anges, spectaculaire avec ses 3 mètres de hauteur et son fond d’or, qui détient l’enchère record italienne de 2,3 m$ (soit 2,6 m$ frais inclus, Sotheby’s Milan le 6 novembre 2007). Des retables portatifs, certainement destinés aux dévotions privés sont bien plus accessibles entre l’Italie, le Royaume-Uni et la France. Il est possible d’en acquérir pour moins de 50 000 $, à de rares occasions néanmoins.

Deux Lucio Fontana
Né en 1899 en Argentine de père italien, Lucio Fontana, sculpteur de formation, passe la majeure partie de sa vie à Milan. Fontana fend la matière d’un geste lyrique sur l’infini. Célèbre pour ce geste radical, l’artiste ne se limite pas à cela. Entre élan métaphysique, kitsch et incarnation, cette œuvre immense a fait récemment l’objet d’une rétrospective au Musée d’art moderne de Paris allant bien au-delà des Concetti spaziale (25 avril-24 août 2014). Néanmoins, les collectionneurs privilégient les toiles fendues, comme le prouvent les deux enchères records, chacune à plus de 18 m$. En Italie, les deux records de Fontana affichent un zéro de moins (deux enchères à 1,8 m chacune).
L’envergure mondiale de Fontana et la faiblesse du marché haut de gamme en Italie draine les oeuvres majeures entre Londres et New York. C’est là que les millions pleuvent et que les records tombent. L’Italie a vendu 111 m$ d’oeuvres de Fontana depuis 2000, lorsque le Royaume-Uni a récolté 424 m$ sur la même période. Il en va de même pour d’autres artistes incontournables du XXème siècle, comme Giorgio, Morandi, dont les meilleures oeuvres partent se vendre à Londres ou Piero Manzoni, plus performant à New York (le record de Manzoni culmine à 1,2 m$ en Italie mais à 12,5 m$ à New York

Deux Français
Deux artistes français bien ancrés dans l’histoire parviennent à se classer. Le premier est lechef de file impressionniste Claude Monet dont le record italien remonte à l’envolée des prix de la fin des années 80 et du début des années 90. Le marché de l’art connu alors un pic avant une correction de quelques années. Durant la période faste, collectionneurs et investisseurs se sont rués sur les grandes signatures impressionnistes et modernes, artistes français en première ligne. Le record italien de Claude Monet remonte ainsi à 1990. Leicester square, la nuit, une toile aux confins de l’abstraction s’envole alors pour 2,1 m$ à Milan. Mais dans cette gamme de prix, les collectionneurs préfèrent largement les paysages des années 1880′ à cette toile sombre de 1901. Quinze ans après la vente italienne de Leicester square, la nuit, le tableau a perdu -67 % de sa valeur (revendue 700 000 $ le 4 mai 2005 chez Christie’s New York).

L’autre français fut plébiscité en Italie à hauteur d’une nouveau d’enchère. Il s’agit de Jean-Baptiste Martin des Batailles, spécialiste des scènes de batailles. Né en 1659 à Paris et mort en 1735, Jean-Baptiste Martin des Batailles fut actif auprès de Louis XIV. Son marché est comme son œuvre, français, à de rares exceptions près, comme la tapisserie des Gobelins représentant un épisode des conquêtes de Louis XIV, une œuvre d’histoire et de tradition que les italiens ont portée à 1,8 m$ en 1998 (Finarte, Venise).

Le marché italien manque de dynamisme car les oeuvres circulent moins qu’ailleurs. Les grandes collections italiennes, regorgeant de trésors anciens et modernes, ne sont pas destinées au marché des enchères et les rares chefs-d’oeuvre qui en sortent sont envoyés sur des places de marché plus dynamiques telles que Londres et New York. Les exceptions sont rares, les records de Jean-Baptiste Martin des Batailles, du Cavaliere Ippoloto Caffi ou du sculpteur Arturo Martini en font partie.